L'attentat a fait 11 morts et 122 blessés. Peu prolixes sur ce qui s'est passé, dans la nuit de samedi à dimanche, les autorités saoudiennes semblent temporiser avant de livrer les tenants de ce nouvel attentat qui survient à un moment où Riyad donnait l'impression d'avoir la situation sous contrôle et surtout au moment où les Etats-Unis et la Grande-Bretagne mettaient en garde leurs ressortissants leur enjoignant de demeurer chez eux. Hier, le bilan provisoire disponible faisait état d'au moins 11 morts et 122 blessés. L'attentat à la voiture piégée a pris pour cible le complexe résidentiel Al Mouhaya, dans la banlieue nantie de la capitale saoudienne, fréquentée par la communauté arabe expatriée. Cette résidence huppée jouxte le quartier diplomatique et se trouve non loin du palais Al-Yamama où réside le roi Fahd Ben Abdelaziz, et du palais de l'un de ses fils, le prince Abdelaziz. Ce complexe de haut standing eu égard à sa proximité avec les palais royaux et les résidences diplomatiques était dans une zone sécurisée et sous la protection de gardes armés. C'est vers minuit locale (21 heures GMT) qu'une explosion suivie immédiatement d'une seconde a ébranlé la capitale saoudienne. Selon des témoins, le feu dévastait des villas alors que les résidents tentaient d'échapper à cet enfer de flammes. Le premier bilan connu donnait alors cinq morts et 99 blessés sans que les nationalités et qualité des morts et des blessés soient établies. Ce n'est qu'en début d'après-midi que le porte parole du ministère saoudien de l'Intérieur donne les premières informations officielles qualifiant l'attentat «d'acte terroriste», indiquant: «Une explosion d'origine terroriste a eu lieu ce soir (samedi) dans le complexe résidentiel d'Al-Mouhaya, à l'ouest de Riyad», sans autre précision ajoutant toutefois que d'autres informations seront livrées ensuite. Un officier de police saoudien, dans une déclaration aux agences de presse a estimé pour sa part que l'attentat était «une opération suicide. Une voiture bourrée d'explosifs a réussi à pénétrer dans le complexe entouré de blocs de ciment. La voiture a ensuite explosé à l'intérieur du complexe». Le propriétaire du complexe, Mohaed Salah Al-Mouhaya, apporte d'autres précisions en indiquant que «des hommes armés, postés sur une colline surplombant le complexe, ont tiré en direction des gardiens à l'entrée du site» ajoutant «Dans la foulée, la Jeep (une Jeep de la police sans doute volée) est arrivée et les gardiens ont cru qu'il s'agissait des forces de sécurité». M.Al-Mouhaya indique que le complexe était «l'objet de strictes mesures de sécurité». La version du prince Turki Al-Fayçal, ambassadeur d'Arabie saoudite en Grande- Bretagne, était légèrement différente, lorsque celui déclare à une agence de presse que le kamikaze «n'avait pas réussi à pénétrer dans le complexe», indiquant «Nous remercions Dieu. Grâce à de récentes mesures de sécurité, le kamikaze n'avait pas réussi à entrer dans le complexe où auraient pu être causés de plus grands et impensables dégâts, destructions et morts». Quoi qu'il en soit, et malgré les précautions prises et les mesures draconiennes de sécurité, Al-Qaîda, -si l'on en croit un haut responsable saoudien qui s'exprimait sous le couvert de l'anonymat-, a de nouveau frappé en Arabie saoudite. Celui-ci mettait en relief les similitudes avec l'attentat du 12 mai dernier qui se solda par la mort de 35 personnes, dans un autre complexe résidentiel, Al-Hamra, indiquant «La technique d'exécution de l'attentat est similaire à celle des explosions du 12 mai à Riyad, ce qui confirme que les auteurs du (nouvel) attentat appartiennent au mouvement Al-Qaîda, traqués par les autorités saoudiennes». En effet, les autorités saoudiennes avaient attribué à l'époque le triple attentat à l'organisation de Ben Laden. De plus, ces derniers jours, et semaines, les autorités saoudiennes avaient annoncé le démantèlement et l'arrestation de groupes terroristes et d'éléments se réclamant d'Al Qaîda. D'autre part, il y a le fait que ce week-end, Washington et Londres ont mis en garde leurs ressortissants sur les possibilités d'attentats en Arabie saoudite au Qatar et à Bahreïn. Aussi, un communiqué, publié sur le web de l'ambassade américaine à Riyad, faisait-il état «d'informations crédibles selon lesquelles des terroristes en Arabie saoudite sont passés au stade de la planification des attaques dans le royaume à celui de leur mise en exécution», soulignant: «A la lumière de ces sérieuses menaces, l'ambassade à Riyad ainsi que les consulats généraux à Djedda et à Dhahran fermeront samedi 8 novembre, afin de revoir les mesures de sécurité». Le soir de ce samedi eut lieu donc l'attentat qui accrédite les inquiétudes de l'ambassade américaine dont le porte-parole indiquait hier que l'ambassade pouvait rester fermée plus d'une journée. De fait, cette même ambassade américaine à Riyad avait déjà, le mois dernier, annoncé que «des terroristes pourraient passer à l'action durant le ramadan (qui a débuté le 26 octobre)». Ainsi, à son tour l'Arabie saoudite se trouve directement confronté à la nuisance terroriste, Riyad ayant longtemps fait preuve de laxisme envers l'intégrisme islamiste. C'est en fait le grief principal que font les Etats-Unis envers les Saoudiens leur reprochant leur mollesse dans la lutte anti-terroriste d'autant plus que 15 des 19 kamikazes des attentats anti-américains du 11 septembre étaient des Saoudiens. Ayant longtemps joué avec le feu, l'Arabie Saoudite se retrouve aujourd'hui en première ligne des cibles du terrorisme islamiste.