Le Mnla «est infiltré par des courants antagonistes» Tout porte à croire que le Mouvement national pour la libération de l'Azawad, né à la fin de l'année 2011, qui prétend à une partition du Mali, est «mort-né». Tout porte à croire que le Mouvement national pour la libération de l'Azawad, né à la fin de l'année 2011, qui prétend à une partition du Mali, est «mort-né». S'étant engagé sur un terrain miné par la prédominance des groupes terroristes, ce mouvement aux motivations anodines a démontré son incapacité et son manque d'influence, dans une région rongée par une instabilité politico-sécuritaire et socio-économique. Prévu comme le plus grand gagnant après le coup d'Etat militaire du 22 mars contre le régime d'Amadou Toumani Touré, le Mnla est, en un mot, «une défaite», notamment en présence des réseaux terroristes, qui rendent une intervention militaire, une opération à haut risque selon des experts. Comment ce mouvement, qui se présente comme un bastion contre Al Qaîda au Maghreb, a pu basculer dans la défaite? Chassé de son quartier général à Gao sous contrôle désormais des groupes terroristes d'Ansar Eddine et le mouvement pour l'Unicité et le Jihad en Afrique de l'Ouest, le Mnla, selon le chercheur Pierre Boilley, directeur du Centre d'études des mondes africains (Cémaf) à Paris, «est infiltré par des courants antagonistes». Il souligne dans ce même contexte «l'incapacité des Touareg à fédérer l'ensemble des populations du Nord, notamment les Arabes et les Songhaïs». La plus grande tare de ce mouvement, confient des stratèges bien avertis, est le fait «d'avoir réclamé l'indépendance d'une partie du Mali», alors qu'une telle revendication est inadmissible pour la communauté internationale. Surtout, souligne encore le directeur du Centre d'études des mondes africains, que «la crise en Libye, qui a fourni hommes et armes aux factions armées du Nord-Mali (Mnla, comme islamistes), a précipité le déclenchement de la rébellion sans que le projet du Mnla pour un Etat indépendant au Nord soit très abouti». Pour un autre chercheur, l'islamologue Mathieu Guidère, «les combattants du Mnla se sont démobilisés après la prise des grandes villes, alors que les islamistes locaux d'Ansar Eddine, commandés par le charismatique leader touareg Iyad Ag Ghaly, ont labouré le terrain, restauré l'ordre dans les villes, rassuré les commerçants». Et d'ajouter: «Le Nord est clairement contrôlé par des islamistes, avec un groupe dominant qui est Ansar Eddine». Ce dernier prévoit l'instauration d'un Etat islamique et l'application de la charia avec la complaisance d'Al Qaîda au Maghreb, avec laquelle il a convenu une plate-forme commune. A ce propos, l'islamologue soutient que «les liens hiérarchiques entre eux sont très codifiés, les islamistes du Nord-Mali ont reconnu Iyad Ag Ghaly comme le maître du territoire». Une reconnaissance à la demande du présumé numéro un d'Al Qaîda au Maghreb, Abdelmalek Droukdel, dont plusieurs éléments sont ancrés dans la région depuis des années. Cette situation encore confuse, représente, néanmoins pour la communauté internationale, une nouvelle donne dans la région pour laquelle les dirigeants d'Afrique de l'Ouest réclament une intervention militaire par l'envoi de 3000 soldats sur place. Réunis vendredi à Yamoussoukro en Côte d'Ivoire, la Cédéao a de nouveau exhorté le Conseil de sécurité de l'ONU à autoriser l'envoi d'une force au Mali. Cependant, le recours à la force ne se fera pas sans l'aval des USA qui semblent être pleinement d'accord sur cette question avec l'Algérie. Une solution pacifique et politique à la crise serait-elle encore possible après la grande défaite du Mnla? En tout état de cause, pour l'Algérie, l'une des pièces maîtresses dans cet échiquier, l'envoi de forces militaires dans cette zone est presque une folie et peut engendrer des conséquences encore plus néfastes et compliquées sur l'ensemble des pays du Sahel. De même pour les Etats-Unis qui n'ont pas exprimé que de simples réserves, mais lancé un sérieux avertissement à peine déguisé à la France et à la Cédéao qui revendiquent une intervention militaire au nord du Mali. Les deux pays, qui partagent une même vision sur le dossier malien, seraient les deux acteurs principaux à maitriser les nouvelles donnes qui sévissent actuellement et certainement conscients qu'une intervention étrangère donnera naissance à une nouvelle Somalie et qui risque de menacer la stabilité des pays voisins.