Pour faire face aux répercussions budgétaires de la baisse des prix du pétrole, le gouvernement avance ce qu'il appelle «la gestion prudentielle des dépenses publiques». Excluant toute réduction de salaires, de transferts sociaux et de soutien des prix, Karim Djoudi, ministre des Finances, a affirmé hier à Alger qu'«une bonne conduite des affaires publiques nécessite de limiter et de plafonner les dépenses de fonctionnement». «Je peux vous assurer que la dépense salariale, les transferts sociaux et les soutiens des prix ne seront pas touchés», a indiqué le ministre à la Radio nationale. Selon lui, «la baisse des prix du pétrole, observée ces derniers mois, inquiète l'Algérie mais ne menace pas ses équilibres budgétaires actuellement, les dépenses effectives de l'Etat étant fondées sur un baril à 75 dollars seulement», a assuré hier à Alger le grand argentier. «La tendance baissière du prix du pétrole nous inquiète et nous impose d'être prudents, mais nous ne devons pas perdre de vue deux éléments importants: nos dépenses effectives constatées en fin de l'exercice sont basées sur un baril à 75 dollars et nos capacités de financement, cumulées grâce au FRR, aux réserves de change et au remboursement de la dette, sont considérables», a expliqué M. Djoudi à la Radio nationale. A ces éléments de sécurité budgétaire s'ajoute l'accroissement annuel de 20% des recettes de la fiscalité ordinaire, tirées par la demande publique et une croissance hors hydrocarbures croissante. La prudence doit s'entendre, poursuit-il, juste comme «un élément de gestion active de notre politique économique et financière pour anticiper des phénomènes susceptibles de gêner nos équilibres internes et externes». La gestion prudentielle prônée exclut cependant toute réduction de salaires, de transferts sociaux et de soutiens des prix, a encore assuré le ministre. La Banque d'Algérie avait dernièrement averti contre le maintien de la croissance des dépenses publiques, notamment celle de fonctionnement estimant que l'Algérie aura besoin d'un baril supérieur à 110 dollars pour maintenir son équilibre budgétaire. La baisse observée des cours du pétrole pourrait faire perdre à l'Algérie, dépendante à hauteur de 97% des recettes de brut, quelque 20 milliards de dollars par an, avait de son côté prévenu le ministre de l'Energie et des Mines, M.Youcef Yousfi. «Nous avons perdu 30 dollars depuis le niveau qu'avait atteint (le baril de pétrole) depuis quelques mois, 30 dollars, c'est une chute drastique et sur une année, ça représente pour nous entre 18 et 20 milliards de dollars de revenus en moins. En moins, ceci est inquiétant», a-t-il déclaré récemment. Les cours du pétrole reculaient nettement vendredi dernier perdant plus de deux dollars le baril à Londres comme à New York. Le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en août valait 98,37 dollars, en baisse de 2,33 dollars par rapport à la clôture de jeudi. En avril dernier, le Brent s'échangeait à plus de 120 dollars/baril, soit une perte de plus de 20 dollars en quatre mois. Mais les prix du baril constatés à un moment donné «ne devraient pas dicter à l'Algérie des actions structurelles, notamment en matière de dépenses d'investissement», a noté M.Djoudi. Les dépenses d'équipement génèrent en fait de la croissance, de l'emploi et des revenus, et «toute action sur ces dépenses, forcément lourde sur le plan économique, ne peut résulter que d'une constatation confirmée dans le temps». «La baisse des cours du pétrole n'est pas source de mise en difficulté de nos équilibres internes et externes pour le moment» soutient M.Djoudi. Aujourd'hui, «vous avez de la croissance économique et de l'emploi grâce à ces dépenses, si nous avions attendu que la croissance soit générée par le secteur privé, on n'aurait jamais eu le nombre d'entreprises qui sont créées, ni le nombre d'emplois, ni de revenus distribués», s'est-il félicité. Et d'ajouter: «La dépense publique a été un moteur de croissance pour l'Algérie.»