La chambre basse du Parlement russe (Douma) a adopté hier en troisième et dernière lecture un texte de loi controversé qualifiant d' «agents de l'étranger» et plaçant sous un contrôle étroit les ONG qui bénéficient d'un financement étranger et ont une activité «politique». La proposition de loi déposée par le parti au pouvoir Russie unie, votée en première lecture il y a une semaine et mise d'urgence à l'ordre du jour de la Douma malgré les protestations des défenseurs des libertés, de l'opposition libérale et de juristes, a été adoptée par 374 voix pour, trois contre et une abstention. Russie unie dispose de la majorité absolue, avec 238 sièges sur 450, à la Douma, et le Parti communiste, opposé au Kremlin, mais également à toute «ingérence» occidentale - implicitement visée par cette loi -, ainsi que le Parti libéral-démocrate (populiste) avaient annoncé qu'ils voteraient pour. Le texte prévoit un enregistrement séparé des ONG bénéficiaires d'un financement étranger et engagées dans une «activité politique» sur le territoire russe. Introduite au début du mois, cette proposition de loi constitue «une nouvelle initiative qui discrédite la société civile en vue de dresser les citoyens les uns contre les autres», a déclaré avant le vote le député Ilia Ponomarev (du parti Russie juste, centre gauche), l'un des rares parlementaires dénonçant la politique de Vladmir Poutine. «Je suis moi-même certainement devenu un agent de l'étranger en collectant auprès de 1000 personnes à l'étranger des dons pour Krymsk», district de la région de Krasnodar (sud-ouest) où 172 personnes ont péri le week-end dernier dans de fortes crues, a ajouté M.Ponomarev. Toute violation de cette loi est passible de lourdes amendes ou de peines d'emprisonnement. Les députés ont aussi adopté une proposition de loi qui fait de la diffamation un délit passible d'amendes allant jusqu'à cinq millions de roubles (environ 125.000 euros), un vote accueilli par des protestations à l'intérieur comme à l'extérieur de la Douma. Ce texte a été voté par 238 voix pour et 91 contre, tandis que les députés communistes ont quitté la salle pour marquer leur désapprobation face à ces nouvelles dispositions également dénoncées par des journalistes qui ont manifesté devant le bâtiment de la Douma avant le scrutin. «Les articles de la loi sur la diffamation permettent aux fonctionnaires d'interdire la profession de journaliste, qui essaie de dire ce qui va et ce qui ne va pas, dans la mesure où pas une seule personne ne sera en mesure de payer jusqu'à la fin de sa vie une amende de cinq millions de roubles», a mis en garde l'un des manifestants, le journaliste Timour Olevskiï.