Rached Ghannouchi à l'ouverture des travaux du 9e congrès du mouvement Ennahda «Ce congrès est celui de l'union du peuple tunisien. Nous sommes un peuple uni», a déclaré le chef du parti, Rached Ghannouchi, devant une vaste foule de partisans. Les ténors d'Ennahda, parti islamiste au pouvoir en Tunisie, ont appelé jeudi au «consensus» lors de son premier congrès dans le pays depuis 1988, un discours conciliateur alors que l'opposition craint une dérive autoritaire de ce mouvement qui se dit modéré. «Ce congrès est celui de l'union du peuple tunisien. Nous sommes un peuple uni», a déclaré le chef du parti Rached Ghannouchi devant une vaste foule de ses partisans. «Je veux rassurer le peuple, le pays est entre de bonnes mains», a ajouté M.Ghannouchi. «Ce pays a besoin d'un consensus national», a-t-il poursuivi, en ouverture du congrès qui se tient jusqu'à dimanche au Kram, une banlieue de Tunis. Il a qualifié les crises secouant la Tunisie et la coalition au pouvoir de «normales» après une révolution, en référence aux tensions dans l'alliance entre Ennahda et deux partis de centre-gauche, le Congrès pour la République (CPR) et Ettakatol. Le président de l'Assemblée nationale constituante (ANC) et chef d'Ettakatol, Mustapha Ben Jafaar, a pour sa part appelé à combattre toute forme de dictature notamment celle fondée sur le religieux. «Il faut affronter la dictature qu'elle soit au nom de la religion ou de la modernité», a-t-il déclaré. «Notre réussite est liée à notre capacité à préserver l'esprit de consensus», a-t-il ajouté, appelant à «un régime républicain civil pour instaurer un Etat moderne qui préserve l'identité du peuple arabo-musulman». Le Premier ministre Hamadi Jebali, issu d'Ennahda, a promis un «engagement pour la démocratie et les droits de l'Homme» et envers le «consensus et la coalition au niveau du pouvoir». Au sujet d'Ennahda, il a jugé qu'il fallait «renforcer le critère civique du mouvement et son attachement à la liberté, aux acquis de la société et à la défense de l'identité et de la référence islamique». «Il faut que le mouvement renforce sa présence en tant que leader et force modérée», a-t-il déclaré. L'opposition craint une dérive autoritaire d'Ennahda, après notamment la décision du gouvernement d'extrader l'ancien Premier ministre libyen al-Baghdadi al-Mahmoudi, malgré l'opposition du président Moncef Marzouki. Le gouvernement a en outre été accusé par l'instance chargée de réformer le secteur des médias pour garantir leur indépendance, qui s'est sabordée, d'user d' «outils de désinformation et de censure». Ennahda a aussi été critiqué pour son manque de fermeté à l'égard de la mouvance salafiste, responsable de plusieurs coups d'éclats ces derniers mois. Le parti de M.Ghannouchi a cependant renoncé à inscrire la chari'â dans la Constitution en cours de rédaction et dont le contenu fait l'objet de profondes divergences, notamment au sein de la coalition au pouvoir. Ennahda, plus grand parti politique tunisien, a été violemment réprimé par le président Zine El Abidine Ben Ali chassé par la révolution de 2011. Il tablait sur quelque 25.000 à 30.000 participants à ce congrès, le premier public et non dans la clandestinité. Hier et aujourd'hui, les quelque mille délégués devaient débattre de motions dont le contenu n'a pas été transmis à la presse et alors que le congrès doit concilier les modérés et les tenants de positions plus radicales. Demain, ils se prononceront sur ces textes qui détermineront la stratégie politique du parti, sa position sur ses alliances, son orientation sur les questions de société et sur l'organisation interne du parti. Ils éliront la direction du mouvement, qui, sauf surprise, devrait garder à sa tête M.Ghannouchi. Des invités de marque sont par ailleurs présents comme Khaled Mechaal, chef du mouvement islamiste palestinien Hamas, chaleureusement accueilli par le slogan «Le peuple veut libérer la Palestine». Les militants ont aussi lancé des appels au départ du président syrien, Bachar Al Assad, criant «Bachar, dégage!» en soutien à la révolte en Syrie.