La France et la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) sont désormais parties engagées dans le brasier sahélien. Même si le quitus autorisant le va-t-en guerre au nord du Mali n'est pas encore arraché, le principe est néanmoins acté entre les parties concernées. C'est juste une question de temps, paraît-il. Les pays occidentaux et leurs relais, comptant des intérêts stratégiques au Mali en général et au Sahel en particulier, s'ingénient à trouver des formules et des pistes pour rendre effective une intervention militaire au nord du Mali. La France et la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) sont désormais parties engagées dans le brasier sahélien. Une attaque militaire pour, disons déloger les groupes terroristes et restaurer l'intégrité territoriale du Mali, se précise. Dans l'entretien accordé le 29 juillet au Journal du Dimanche (JDD), le président de la Côte d'Ivoire, Alassane Ouattara, qui assure actuellement la présidence tournante de la Cédéao a précisé qu'«il y a urgence à intervenir militairement au Mali». «Je pense que nous pouvons parler en semaines et non en mois», déclare M.Ouattara. Le fait que la France, a-t-il soutenu, assure en août la présidence tournante du Conseil de sécurité de l'ONU «est une très bonne nouvelle». D'autant plus, a-t-il souligné, que la Cédeao est totalement en phase avec les autorités françaises. «Je pense que nous pouvons parler en semaines et non en mois. Il y a urgence», a-t-il tranché. M.Ouattara a indiqué également qu'en cas d'intervention, qui se traduirait dans un premier temps par un déploiement de gendarmes et de policiers, puis de militaires, les forces africaines demanderont un appui logistique, notamment à la France et aux Etats-Unis. «Je parle d'un appui logistique, matériel, je parle également de conseillers. Nous ne disposons pas non plus d'une aviation de combat et nous en aurons besoin. A l'inverse, je n'envisage pas la présence de troupes au sol qui ne soient pas africaines», dit-il. La Cédéao prévoit de constituer une force composée à 50% de soldats maliens, et pour l'autre moitié de soldats du Niger, du Nigeria, du Tchad et d'autres pays, précise le président ivoirien. Tandis que François Hollande avait réaffirmé lors d'un point de presse commun avec Alassane Ouattara que la France soutiendrait une éventuelle intervention africaine au Mali, dans le même sillage, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a indiqué que pour assurer la stabilité politique à Bamako, garantir un gouvernement d'union nationale, lui donner la souveraineté nécessaire et étendre cette souveraineté au Nord-Mali, cela se passera «inévitablement» par une «intervention armée que la France pourra soutenir mais dont elle ne prendra pas l'initiative». La déclaration de Jean-Yves Le Drian renseigne par ailleurs sur l'esprit de va-t-en guerre de la France. Une position qu'elle avait manifestée dés le début de la crise malienne, en parrainant les desseins de la Cédeao. Tandis que des experts et des centres de recherche, fins connaisseurs de la crise malienne, avertissent, quant aux conséquences désastreuses qui peuvent découler d'une éventuelle intervention militaire au Mali.«Une intervention armée extérieure au Mali comporte des «risques considérables», a souligné l'ONG International Crisis Group (ICG) de Bruxelles, qui a appelé la communauté internationale à privilégier le dialogue pour «préserver les chances d'une sortie de crise politique dans ce pays». Selon un récent document de l'ICG, il est souligné qu'une intervention armée, soutenue par la Cédéao, ferait du Mali «un nouveau front de la guerre contre la terreur aux dépens des revendications politiques exprimées depuis des décennies au Nord, et au risque de rendre illusoire toute possibilité de nouvelle cohabitation pacifique des différentes communautés de ces régions». Le texte de l'ICG exhorte enfin le Conseil de sécurité des Nations unies à soutenir un processus de sortie de crise global, dans le cadre de la résolution 2056 du 5 juillet 2012. Dans cette résolution, le Conseil exige la dissolution de la junte et appelle les autorités civiles à élaborer une feuille de route en concertation avec l'ensemble des partis politiques maliens et la société civile pour consolider la transition au Mali. En outre, l'ICG rappelle que l'intégrité territoriale du Mali ne peut pas être remise en cause, position à laquelle adhèrent la Mauritanie et le Maroc. Ainsi, la Mauritanie «n'interviendra pas militairement au Mali», a affirmé, dimanche dernier, le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, estimant que son pays ne possède pas la solution à la crise malienne, qu'il a qualifiée de «complexe». Dans le même contexte, il a fait savoir qu'une intervention militaire peut ajouter de l'huile au brasier sahélien. Il en est de même pour le Maroc. Sa Majesté qui, il y a quelque temps le roi soutenait une intervention au nord du Mali, considère aujourd'hui qu'une attaque militaire au nord du Mali aggravera encore plus la crise. Le Maroc s'aligne visiblement sur la position algérienne privilégiant le règlement politique de la crise par la voie du dialogue entre toutes les parties concernées.