Un trio d'enfer Le Maghreb United s'est donné rendez-vous dimanche soir dans un show extraordinaire, fusionnel et intense. Le chapiteau du Hilton abritant les nuits de Khaïmetkoum chez Djezzy s'est embrasé dimanche dernier au son du tagnawite. Une chaude et merveilleuse soirée sous le rythme des karkabous et le chant spirituel venu tout droit du Maroc. La réunion de deux grands artistes, des maâlemine du tagnawite, Abdelkebir Merchane et Hamid El Kasri et de leur compagnon de route aux multiples influences -dont le jazz, Karim Ziad, pour un voyage initiatique à la (re)découverte de la musique gnawa. Chef d'orchestre d'Ifrikya, programmateur du Festival d'Essaouira, des «folles nuits berbères» du Cabaret Sauvage à Paris et avant tout batteur talentueux, Karim Ziad qui partage son identité musicale entre ses origines maghrébines et sa passion pour le jazz, a carrément mouillé sa chemise en faisant honneur à cette musique qui épure l'âme et revigore l'esprit. Pour rappel, Karim Ziad a déjà travaillé en étroite collaboration avec Hamid El Kasri en réalisant son formidable album Yobadi. Ce projet est le fruit d'un travail continu entre les deux musiciens qui ont joué ensemble de nombreuses fois au Maroc et à l'étranger. Hamid avait émis à plusieurs occasions le désir de chanter sur les arrangement de Karim. Il s'agissait de proposer de nouvelles dynamiques rythmiques, de nouvelles couleurs harmoniques à partir de la musique gnaoua traditionnelle. Yobadi qui veut dire «les amis» en bambara, était donc la résultante naturelle d'une coopération chargée de partage et d'amitié. En véritables ambassadeurs de la musique gnaoua, nos trois hôtes, en compagnie aussi de la surprise de la soirée, la formation diwan Ouled Haousa ont mis le feu sur les planches du chapiteau. Ils nous donneront à voir et à ressentir un spectacle haut en couleur et en effusion spirituelle, entre danse, rythme et transe à couper le souffle. Karim Ziad, l'éternel animal en cadence, amarré à sa batterie, apportait sa touche moderne à cette sauce gnawi qui se fondait très bien dans le décor pour lui apporter encore plus d'énergie et de puissance. Enfant prodige de la musique, né dans une famille de musiciens- sa grand-mère joue de la percussion et ses deux frères sont aussi musiciens- Karim Ziad a baigné tôt dans les ambiances festives où la mesure se veut tempo avec lequel le diable n'a qu'à bien se tenir. Présente ce soir-là, sa mère ne rate en général aucun de ses concerts et son frère Nazim, qui joue entre autres avec Djmawi Africa, assure la relève en fin batteur comme pas possible. C'est devant un public en délire que se sont produits nos artistes mais aussi sous l'oeil attentif et admiratif des musiciens du groupe Tinariwen, presque au complet- manquait juste Brahim à l'appel qui devait arriver le lendemain- pour animer en soirée un concert de folie au chapiteau du Hilton. «Je suis supercontent d'être à Alger avec mes frères Marocains. On a fait un Maghreb United. Et c'était génial: J'ai beaucoup aimé.» a indiqué à la fin du concert Karim Ziad dont son nouveau disque aux couleurs jazzy sortira à la fin de l'année. Un album dans lequel on retrouvera ses amis compagnons de route depuis longtemps, notamment Boyan Z, Linley Marthe ou encore Ngyuyen Le. «Ce sera assez chaud», confiera l'icône de la batterie, le visage ayant pris des couleurs après s'être donné à fond en chauffant les cymbales comme un dieu. Pour Hamid El Kasri jouer du tagnawite avec Karim Ziad n'a rien d'anormal. «Lui, c'est un ganwi», affirme-t-il en regardant Karim Ziad. Et d'ajouter: «J'ai grandi dans une zaouia gnawia depuis mon enfance. J'ai toujours fait des recherches autour de cette musique aux côtés des maâlmine.» Karim Ziad connaît pratiquement depuis 24 ans mâalam Merchane et moi je le connais maintenant depuis 15 ans. Il y a un grand amour entre nous, personne ne peut me convaincre dans le tagnawite autant que Karim. Il joue sur le gumbri, il connaît les makams gnawis. Il connaît par coeur le patrimoine marocain à tel point qu'il a commencé à assister au layali des gnawa et nous fait écouter le gnawi du diwan. On apprend tous les jours.», a souligné avec modestie le sémillant Hamid El Kasri. Boyandi, La ilaha ila lah et tant d'autres morceaux tirés du patrimoine traditionnel marocain, tels Hamdouchia, Moulay Ahmed, Lala Aïcha, Hadja Mimouna, Segro autant de titres sur lesquels se sont déchaînés les jeunes, cheveux au vent et les pieds en furie pour une soirée déjantée comme on aime...