Jusqu'ici en arrière-plan dans le conflit syrien, les Etats-Unis semblent vouloir accélérer les choses De nouveaux combats opposaient mardi armée et rebelles à Alep, la deuxième ville de Syrie, un pays dans la ligne de mire des Etats-Unis qui ont évoqué pour la première fois une intervention militaire. «Jusqu'à présent, je n'ai pas donné l'ordre d'intervenir militairement» en Syrie, a déclaré lundi soir le président américain Barack Obama, dans un avertissement très ferme au régime syrien. Mais «si nous commencions à voir des quantités d'armes chimiques déplacées ou utilisées, cela changerait mon calcul et mon équation», a-t-il ajouté. La question de ces armes, dont Damas a reconnu posséder des stocks importants, ne concerne «pas seulement (...) la Syrie, mais aussi nos proches alliés dans la région, dont Israël. Cela nous inquiète», a-t-il insisté, évoquant la possibilité que ces armes tombent en de mauvaises mains. Washington comme Paris ont en outre répété que le président Bachar Al Assad devait quitter le pouvoir. Un préalable qui risque de rendre caduque et sans objet la mission du médiateur de l'ONU dont le challenge est d'établir des passerelles entre les parties syriennes pour instaurer la paix. Y a-t-il eu erreur d'interprétation dans le cahier des charges confié à M.Brahimi? De fait, dans ses premières déclarations après son acceptation de la sollicitation de l'ONU de reprendre la médiation de Kofi Annan, Lakhdar Brahimi a fermement indiqué qu'il était tôt pour discuter du départ ou non de Bachar Al Assad. Lors d'un entretien, lundi à Paris, avec le nouveau médiateur des Nations unies pour la Syrie, le président français François Hollande avait également réaffirmé que toute solution politique en Syrie passait par le départ de M. Assad du pouvoir. En fait, ces exigences des grandes puissances occidentales qui avaient, pour les mêmes raisons, fait échouer la mission de Kofi Annan, risquent fort d'avoir le même résultat avec Lakhdar Brahimi, dès lors que l'on veut faire jouer au «médiateur» onusien (selon le dictionnaire, le médiateur est une personne qui s'entremet entre deux ou plusieurs personnes en vue d'une conciliation) un rôle qui outrepasse celui de «conciliateur» pour lequel il a été appelé. Plus, cela change en fait la nature de la mission confiée au médiateur onusien, qui consisterait alors, selon MM Obama et Hollande et l'opposition syrienne, à uniquement obtenir le «départ» de Bachar Al Assad. Que va dire Lakhdar Brahimi dont l'indépendance de la mission semble déjà bridée par le diktat des grandes puissances occidentales? M.Brahimi, connu pour son indépendance d'esprit, aura des discussions au Conseil de sécurité dans les prochains jours et aura sans doute à préciser sa position sur le conflit syrien, disant s'il accepte ou non les conditions que lui posent ainsi les Etats-Unis et la France notamment. Ceci dit, les combats se poursuivaient hier dans la seconde ville de Syrie, Alep, où la rébellion affirmait contrôler les deux tiers de la ville. Affirmation démentie par les forces de sécurité syriennes qui indiquent qu'ils continuaient, au contraire, à progresser dans le centre de la ville. Toutefois, faute de sources fiables et indépendantes sur ce qui se passe en Syrie, nombre d'informations en provenance des champs de bataille syriens se sont avérées sans fondement. Sur le front diplomatique, le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, devait recevoir hier à Paris le président du Conseil national syrien (CNS, principale coalition de l'opposition), Abdel Basset Sayda. Par ailleurs, le ministère japonais des Affaires étrangères a confirmé hier la mort de la journaliste Mika Yamamoto, 45 ans, qui couvrait les combats à Alep pour une petite agence de presse nippone, Japan Press. Mika Yamamoto est le quatrième journaliste étranger tué dans les violences en Syrie depuis mars 2011, après le reporter français Gilles Jacquier, tué par une roquette le 11 janvier lors d'une visite sous l'égide des autorités à Homs (centre), l'Américaine Marie Colvin et le photographe français Rémi Ochlik, morts le 22 février dans le bombardement d'un centre de presse improvisé par les militants à Homs. Plusieurs reporters syriens et journalistes ont également été tués par la rébellion.