Les histoires populaires sont un trésor inépuisable de sagesse et une source illimitée d'enseignement. On raconte qu'un paysan dit à son ami en montrant un objet noirâtre à l'horizon lointain: «Regarde ce corbeau, combien il est grand. Son ami conteste: Mais c'est une chèvre.» Brusquement, l'objet s'envole et le paysan frotte ses mains en disant: «Je t'avais dit c'est un corbeau.» L'autre répond avec un air bien énervé: «C'est toujours une chèvre, même si elle s'envole.» Cette obstination n'a rien à comparer avec la phrase célèbre de Galilée: «Pourtant il tourne», mais plutôt avec le comportement de certains opposants égyptiens qui n'essayent pas de voir la réalité en face, et, comme certains chez nous, ne savent pas qu'il y a un temps de repli, au moins pour mieux sauter. Il y a plusieurs semaines, des contradictions se sont créées entre le président de la République égyptienne et un certains nombre de juristes. C'est la levée de boucliers par la gauche ankylosée dans sa rhétorique du siècle passé, et certains dirigeants nasséristes qui n'ont pas compris qu'en politique, la sagesse n'est pas de choisir entre le bon et le mauvais mais entre le mauvais et le moins mauvais. Tous ont fait l'éloge des hommes de loi égyptiens, au point que certains les ont élevés au niveau des prophètes, condamnant la tendance dictatoriale de Morsi et ds ses «frèrots», et le traitant de tous les noms à sens péjoratifs,...dictateur...ikhouandji...pro-américain...novice... etc. etc. Je me suis dis: C'est de bonne guerre. La semaine passée, un journal privé étale sur sa première page une série d'accusations, qui, une fois confirmées, peuvent conduire Morsi à la potence. Tentatives d'assassinat d'opposants, complicité avec «Hamas» pour vendre une partie du Sinaï pour installer un futur Etat palestinien. Comme n'importe quel régime qui se respecte, la présidence de la République égyptienne dépose une plainte contre le journaliste qui a été présenté pour examen judiciaire. Preuve à l'appui, le juge d'instruction place le journaliste en détention provisoire. Bien que tout le monde insistait sur la séparation des pouvoirs, c'est une autre levée de boucliers contre Morsi qui commence son mandat, dit-on, par l'emprisonnement des représentants du quatrième pouvoir, comme prélude à l'instauration de «l'ikhouanisation» de l'Etat et instituer une nouvelle dictature, pire de celle de Moubarak. Personne n'a prononcé un mot d'accusation contre le juge qui a prononcé le verdict. Plus malin, Morsi signe le jour même une ordonnance interdisant la détention provisoire de journalistes. C'est le premier acte législatif du président. Mais la contestation continue en accusant Morsi d'hégémonie politique, bien qu'il y ait seulement cinq postes ministériels occupés par le parti qui a gagné les élections, c'est-à-dire, les Frères musulmans. Aucun n'a eu un ministère de souveraineté (Justice, Défense, Intérieur). Mais les chats affamés qui n'ont pas trouvé leur place au gouvernement ou aux postes supérieurs de la presse ont continué leur contestation médiatique et regroupement «pré paid», avec l'intention maligne de faire perdre au président sa stabilité. Les cent jours de grâce seront donc perdus dans les réactions épidermiques et les contre-coups provoqués par des coups au-dessous de la ceinture. Les bribes de l'ancien régime et les restes de l'ancien décor démocratique n'arrivent pas à comprendre qu'il y a une nouvelle génération de dirigeants islamiques qui se sont frottés aux pays développés, ont servi comme professeurs dans leurs universités, une génération qui n'a rien des anciens «frérots» et qui a appris comment être rationnels, clairvoyants, bons joueurs d'échecs politiques. Une génération loin des joueurs de dominos et «kharb'ga» et qui sait comment traiter les brebis galeuses.