Ce qui n'était que rumeurs - encore une fois la communication aura fait défaut - est désormais un fait concret. L'Entreprise nationale Sonatrach reprendra le Mouloudia Club d'Alger (MCA). Parallèlement, trois de ses filiales en feront de même pour le MC Oran, le JS Saoura et le CS Constantine. Pour ces trois derniers clubs il faudra cependant attendre confirmation et le nom des filiales repreneuses. Mais en vérité, le problème n'est plus là. Il n'est même pas dans le critère qui présida au choix de ces clubs parmi les 32 formations professionnelles des Ligues 1 et 2. En fait, nombre de ces clubs, non concernés, menacent de boycotter le championnat si la Société des hydrocarbures n'étend pas ses «bienfaits» à leur association. Peut-on les blâmer de dénoncer ce deux poids, deux mesures et une distribution opaque des deniers de l'Etat? La Sonatrach, qui a repris la totalité du CSA (Club sportif amateur MC Alger), en fera de même de la société sportive par actions (SSPA-MCA). C'est ce qu'a confirmé le P-DG de Sonatrach dans des déclarations à la presse. Les choses sont-elles aussi simples qu'elles le paraissent? Cette intrusion ou retour des sociétés nationales dans la gestion directe du football est-elle la chose à faire, ou plutôt un désastre? En fait, les avis sont partagés et beaucoup ne comprennent pas la précipitation, l'opacité et le manque de consultation dans le rachat - d'aucuns parlent plutôt de secours pour calmer les turbulents supporters du MCA /- d'un club surendetté dont le sauvetage ne peut constituer en l'état actuel des choses la priorité de Sonatrach. Le retour des sociétés nationales dans la gestion du sport - dans une déclaration à El Khabar, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Hachemi Djiar, a affirmé que l'Etat «encourage» les sociétés à reprendre les clubs sportifs sans préciser dans quel cadre ce retour doit se faire, avec quels moyens et pour quels objectifs - servira-t-il réellement le sport algérien, sans pour autant nuire à une gestion saine et à la rentabilité des entreprises nationales? Ça se discute! D'autant plus que l'expérience ratée - dans la mesure où elle n'eut pas de suite positive au niveau de clubs budgétivores - de la réforme sportive des années 1970 est là pour en témoigner. La question, donc, se pose d'un retour intempestif et sans réelle étude quant à la légitimité d'un tel retour. Nonobstant ce point d'ordre, d'aucuns de se demander s'il faut néanmoins se féliciter de cette initiative du retour des sociétés nationales à la proximité du sport ou, a contrario, la déplorer? S'en féliciter, certes oui, dès lors que ce retour s'effectue dans les normes et la transparence et dans l'observance d'un cadre réglementaire adossé à la loi et aux pratiques pour ce faire sans que soient déstabilisées les sociétés repreneuses. Non, si l'on excipe du fait que ce retour s'effectue à la hussarde sans prospective et, surtout, selon d'aucuns, sur «injonction». Ce qui changerait du tout au tout la donne sportive, éthique et économique de ce retour des sociétés à la chose sportive. Mais le fait est là: la Sonatrach reprend le MCA - et sans doute aussi, par ses filiales, le CSC, le MCO et la JSS - et partant leurs dettes. Les difficultés financières dans lesquelles se débat, notamment, le doyen des clubs d'Alger sont récurrentes. En réalité, la question que l'on se pose est de savoir si la Société des hydrocarbures va «garder» les salaires mirifiques alloués aux joueurs professionnels? Si tel est le cas, sur quel budget de l'Entreprise va émarger la «prodigieuse» masse salariale de ces «travailleurs» du football? Il n'y a rien d'impertinent dans ce questionnement mais il est curieux, cependant, de savoir d'où Sonatrach va tirer une masse salariale mensuelle estimée au minimum à 5 milliards de centimes par mois (salaire des 25 joueurs professionnels) outre les autres charges afférentes à la gestion du club? Multipliez cette «manne» par 4 dans l'optique de la reprise - outre le MCA - du CSC, du MCO et de la JSS, et vous aurez une idée de la galère dans laquelle s'est engagée la première entreprise nationale et à quoi elle sera confrontée. D'aucuns estiment que Sonatrach s'est engagée dans un cercle vicieux. Or, par le retour des sociétés nationales dans le sport n'a-t-on pas plutôt ouvert la boîte de Pandore?