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«Je continue à explorer mon identité à travers le cinéma»
LYÈS SALEM, REALISATEUR ET COMEDIEN, À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 27 - 09 - 2012

Il vient de décrocher le Prix de la meilleure interprétation masculine au Festival de la Rochelle pour le film de Charles Némès: Il était une fois... Peut-être pas du roman éponyme d'Akli Tadjer. Il prépare aussi, tout doucement mais sûrement, un nouveau film dont les faits se dérouleront à Oran. Nous l'avons croisé au TNA, la semaine dernière, juste à la sortie d'une présentation d'une pièce de théâtre...Le passionné de 4e art qu'il est se lance ainsi incessamment dans une nouvelle aventure cinématographique. Ecoutons-le...
L'Expression: Lyès Salem a un peu disparu de la circulation. Qu'est-il devenu?
Lyés Salem: pendant deux ans j'ai écrit. Je n'ai pas fait le beau comme on dit. J'ai écrit un film que je vais tourner au mois de mars, normalement à Oran. Aussi, j'ai joué dans une pièce comme acteur à Toulon. Une pièce mise en scène par Philipe Berling, directeur du théâtre de Toulon. La pièce était L'art de la comédie d'Eduardo de Filipo. Après, on a tourné avec en France. Juste avant, j'avais tourné un téléfilm qui m'avait été proposé un peu de temps, c'est l'adaptation du livre de Akli Tajer Il était une fois peut-être pas. On a tourné le film en juin dernier et il a été présenté au festival de la Rochelle qui est le meilleur festival de télé en France. On y a décroché deux prix, celui de la meilleure musique et le prix de la meilleure interprétation masculine.
Un mot sur ce rôle et félicitations pour le prix
C'est un très joli personnage qui s'appelle Mohamed. L'histoire du film c'est comment un homme d'une quarantaine d'années se retrouve avec le petit copain de sa fille qui fait ses études à Toulon et lui largue son petit copain chez lui. Ces deux vont mener un duo comique. Ils ne s'entendent pas très bien au début, tandis qu' elle, elle va se poser des tas de questions sur ses origines, son identité. Elle va par l'intermédiaire d'un professeur d'arabe et imam avoir un retour à ses sources identitaires par le biais de la religion qu'est l'Islam, ce qui va pousser Mohamed tout au long du film à lui raconter toute la vérité sur son identité, ses origines, à savoir que lui ce n'est pas son père biologique mais juste son père adoptif. Il l'avait récupérée pendant les années 1990 après un massacre dans un village où il est venu lui-même enterrer son père. Lui est Lyonnais. Pendant son séjour, il y eut comme dans plusieurs villages à l'époque, une descente d'islamistes. Elle était la seule rescapée, il l'a prise avec lui en France et ne lui a jamais dit. Le film raconte la période où Mohamed va être obligé de lui dire la vérité..
Peut-on parler du long métrage en préparation pour lequel vous avez lancé un appel de candidature exclusivement dans l'Oranie pour deux enfants aux yeux et cheveux clairs?
Cela s'appelle l'Oranais. C'est une fresque sur trente ans qui raconte l'évolution de deux amis qui sont entrés au même moment, dans la guerre mais pas pour les mêmes raisons. L'un a fait une guerre politique à travers le monde pour porter le message de la guerre algérienne dans les chancelleries du monde entier et l'autre a fait une guerre de maquisard. Les deux fronts étaient importants à l'époque pour libérer notre pays, autrement celui de l'armée et celui qui sera au niveau international. Ils se retrouvent en 1962. L'histoire du film c'est comment entre 1962 et 1986 vont -ils évoluer. Comment de révolutionnaires ils passent à autre chose..
Pourquoi une histoire liée à la Guerre dAlgérie?
Ce n'est pas une histoire sur la Guerre d'Algérie. Le début du film se passe pendant la guerre, mais cette dernière est le prologue. Le film commence vraiment au sortir de la guerre. Je pense que j'emploie toujours la même démarche c'est-à-dire je travaille sur mon identité. Qu'est-ce que mon identité algérienne? Comment elle s'est construite? D'où elle vient? Quel est notre héritage? Qu'est-ce qu'on nous a dit et ce qu'on ne nous a pas dit? En fait, celui qui rentre de la guerre de maquisard, Jaâfar, découvre en arrivant dans son village que sa femme est morte en couches après avoir donné naissance d'un enfant de viol perpétré par un soldat de l'armée française. Le viol a eu lieu le jour où lui est entré dans la clandestinité mais on ne lui a rien dit pendant les cinq ans de clandestinité. Quand il rentre, sa femme est morte et découvre un petit garçon de quatre ans et demi, blond au yeux bleus.
Peut-on connaître le casting de ces deux personnages principaux?
Ce sera Khaled Benaïssa et moi. J'interprèterai le rôle du maquisard.
Cela n'a-t-il pas un rapport avec le terrorisme et les enfants issus de cette tragédie nationale?
Cela n'a absolument rien à voir. Ce que je tente de faire avec le personnage de Bachir, du petit, c'est de montrer comment après l'Indépen-dance, on va essayer de lui dire la vérité - ou non - sur ses origines. L'enfant, quand on le voit, il parait «gawri». Le but est de savoir aussi comment va t-il se positionner dans la société algérienne. L'enfant aura quatre ans et demi au départ et le film se termine quand il aura 28 ans. C'est une fresque.
Vous n'êtes pas blond aux yeux bleus, mais vous parliez tout à l'heure de problème d'identité... vous êtes aussi issu de deux cultures. Peut-on dire qu'il y a un trait de similitude ou un petit parallèle à faire?
Oui bien sûr. Après, l'histoire de Bachir n'est pas la mienne. Mais bien sûr dans son histoire j'explore un peu tout ce qui est mon identité puisque effectivement je suis de double culture. Mais la mienne est beaucoup plus assumée. Je n'en souffre pas. Mais j'ai dû composer avec, que ce soit en Algérie ou aujourd'hui en France, d'une manière différente. Maintenant que je vis en France, il y a des gens qui essayent de m'expliquer comment les Algériens sont, alors que j'ai grandi ici et j'ai une partie complètement algérienne. Là-bas, je suis aussi Français car j'ai une partie de ma famille qui est française. Je suis toujours considéré d'un côté comme de l'autre comme l'homme de là-bas. Aujourd'hui, j'ai 40 ans. Je vis avec et cela ne me pose aucun problème mais je l'explore. Je me pose des questions. Ce film s'adresse aux deux côtés de la Méditerranée. C'est quoi un Algérien pure souche? C'est quoi une identité algérienne? Je défis quiconque de me répondre. Il y a en a qui vont me répondre en disant que c'est une identité arabo- musulmane. C'est faux. Y en a qui vont dire berbéro-musulmane, c'est faux. C'est tout ça. C'est un savant mélange de tout ce qu'a traversé cette terre depuis des siècles. Intellectuellement et presque politiquement j'appartiens à la mouvance qui pense qu'il faut assumer toute cette diversité et en faire sortir une identité algérienne qui viendrait bien sûr, des influences diverses mais qui arrive à faire éclore une identité totalement algérienne, maghrébine, méditerranéenne, africaine même.
Le film est produit par qui?
Produit par les mêmes que pour mon précédent film. C'est une coproduction franco-algérienne. La même configuration pour Mascarades.. Laith média du côté algérien et Dharamsala côté français.


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