Une visite qui intervient à un mois de celle de Hollande Au programme de M.Raffarin, des dossiers économiques d'importance capitale à même de déterminer les futures relations politiques entre Alger et Paris. La luminosité est impressionnante à Alger en ce mois de novembre 2012. Les nuages se dissipent et laissent apparaître un ciel d'un bleu qu'on ne peut trouver que dans les cartes postales dédiées aux touristes. Mais les employés de l'ambassade de France à Alger n'en profitent pas. Ereintés par une terrible charge de travail pour avoir accueilli plus de sept ministres de leur gouvernement, ils ne jurent que par le 20 décembre prochain, date de la fin de la visite du président François Hollande. En attendant, il y a l'envoyé spécial de la France en Algérie pour les relations économiques, Jean-Pierre Raffarin, qui arrive aujourd'hui. Au boulot! Au programme de M. Raffarin, des dossiers économiques d'importance capitale qui vont, de par leur poids et leur impact, déterminer les relations politiques entre Alger et Paris. Ils seront les marqueurs de cette nouvelle ère que veut inaugurer le président Hollande. «Le président de la République (François Hollande, Ndlr) abordera, sans complexe, tous les sujets lors de sa visite à Alger. Il parlera de la mémoire, de l'économie et des questions internationales», note une source proche de l'Elysée avec la précision que M.Hollande ne se contentera pas de généralités inutiles et myopes. «Il trouvera les mots appropriés pour parler de cette question de mémoire», note encore cette source. Un dossier sur lequel le président socialiste a osé affronter une droite française, certes, actuellement fragilisée par ses turpitudes, mais qui ne ratera jamais l'occasion de remettre le dossier sur le tapis pour faire payer à M.Hollande son «audace». En écho, un responsable diplomatique algérien réplique que «l'Algérie ne gênera pas son hôte par cette question». Les rentiers de la mémoire se sont trop défoulés sur ce sujet. Il est, donc, temps de sonner la fin de la récréation et leur rappeler que la Guerre d'Algérie a pris fin il y a cinquante ans. «Le reste, tout le reste, il faut faire confiance au génie du peuple français qui saura exorciser le poids des inhibitions d'un passé douloureux», indiquent des observateurs à Alger. Cette visite, très attendue des milieux politiques algériens, du président Hollande ne fera pas que télescoper les réminiscences d'une histoire commune tumultueuse. La source diplomatique française précise qu'il placera le curseur sur le présent pour aller vers l'avenir. «Le président insistera surtout sur les sujets qui engagent l'avenir, qui intéressent les citoyens des deux pays dans leur quotidien immédiat. On pense notamment à la circulation des personnes, au visa, au travail et aux opportunités économiques», confie notre source. L'arrivée de M.Raffarin à Alger 30 jours avant le président Hollande a, donc, pour but de finaliser les dossiers économiques. «Nous avons tout intérêt à nous unir dans des alliances industrielles qui vont permettre de produire plus, mieux et de gagner ensemble des parts de marché. La filière automobile peut être un bon exemple parmi d'autres où chacun peut y trouver son compte grâce à un partage d'une valeur ajoutée en croissance», a souligné M.Raffarin dans un entretien qu'il a accordé à notre confrère El Watan. «Nous tenons sincèrement à établir des relations économiques durables, profitables aux deux côtés. Autant la France a besoin de débouchés pour les entreprises en cette période de crise financières mondiale, autant l'Algérie a besoin de diversifier son économie et de transformer sa richesse pétrolière en plus-value» confie la source diplomatique française regrettant cette «inexplicable» loi des 49/51% qui conditionne tout investissement. «Nous comprenons le souci des responsables algériens à vouloir préserver certains secteurs stratégiques, nous pouvons comprendre quand il s'agit des grandes entreprises mais pas quand il s'agit des PME. Dans ce cas précis, c'est un sérieux blocage et, donc, de très grandes opportunités ratées pour nos deux peuples». Sujet également incontournable, est cette fièvre qui a gagné la communauté internationale au sujet de la crise au nord du Mali. Cette fièvre qui a de quoi inspirer un certain malaise entre Alger et Paris? «Nous sommes sur la même longueur d'onde dans ce dossier. Si certains responsables français, dont le ministre de la Défense, ont évoqué avec insistance le recours à l'intervention militaire, c'est qu'il fallait faire bouger les choses dans le sens d'une négociation, le plus vite possible. Il faut convenir que les choses bougent maintenant», confie encore la même source française soulignant, par ailleurs, que «la guerre contre Al Qaîda est une chose acquise pour peu que les organisations agissant au plan local se déterminent». La visite du président Hollande s'annonce grandiose. Les employés de l'ambassade de France ont presque fignolé tous les dossiers. Mais le ciel restera-t-il toujours dégagé? Jean-Pierre Raffarin à Alger Une leçon à méditer Quelle leçon retenir de cette visite de trois jours qu'effectuera, à partir d'aujourd'hui à Alger, l'ancien Premier ministre et vice-président du Sénat français Jean-Pierre RaffarinJean, si ce n'est celui de la pérennité de l'Etat? L'envoyé spécial de la France à Alger a été chargé en 2011 par l'ancien président français, Nicolas Sarkozy, de gérer un certain nombre de projets français en Algérie. Entre-temps, le peuple français a élu un nouveau président en la personne de François Hollande. M.Sarkozy est parti, mais M.Hollande n'a pas opéré une chasse aux sorcières surtout dans le dossier Algérie très sensible et important pour la France. Les hommes partent, mais les affaires de l'Etat continuent à fonctionner dans la normalité. Comme quoi, la force des grandes nations réside dans l'Etat et son aptitude à traverser, mieux que les autres, les bourrasques. Belle leçon à méditer.