L'annulation du sommet de l'Union du Maghreb arabe dont la tenue était prévue hier à Alger, n'est pas, en vérité, une surprise mais une issue logique à des années de tergiversations, de faux fuyants et de dogmatisme. Contrairement à ce qui a été écrit ici et là, cette fois-ci, il ne s'agissait pas d'un report, mais d'une annulation sine-die d'un sommet qui, manifestement, n'avait plus aucun intérêt. Cette annulation marquée par le transfert de la présidence de l'UMA, qui échoit désormais à la Libye - sans que le dirigeant de ce pays n'ait été présent à Alger - constitue, en fait, un cuisant échec pour la diplomatie algérienne. Déjà, en juin 2002, c'est à la demande du guide libyen, Maâmar El Gueddafi, que le 7e Sommet de l'UMA fut reporté, suppléant ainsi à l'absence du souverain chérifien, Mohamed VI, et accessoirement à l'absence du président mauritanien par délicatesse à l'égard de ses voisins maghrébins suite à l'établissement par Nouakchott de relations diplomatiques avec Israël. Or, de juin 2002 à décembre 2003, la situation n'a pas évolué d'un iota, en dépit des efforts fournis par l'Algérie pour arrondir les angles et les déclarations optimistes et rassurantes du ministre des Affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem. Bien au contraire, tous les paramètres politiques régionaux et internationaux, indiquaient, en fait, le peu de chances qu'avait le sommet maghrébin de se tenir à la date arrêtée par Alger. De fait, il est patent que dans les circonstances qui sont actuellement celles du Maghreb, il était illusoire de croire à une réunion des responsables maghrébins quand les obstacles récurrents, bloquant la marche en avant de la construction du Grand Maghreb, non seulement subsistent, mais se sont même aggravés ces dernières années et font que les relations entre les cinq Etats du Maghreb sont devenues aléatoires. Et ce n'est pas seulement la question du Sahara occidental qui fait obstacle à la tenue d'un sommet maghrébin mais également la perception même, qu'ont les dirigeants maghrébins de l'Union du Maghreb, cela sans évoquer les luttes de leadership. L'UMA, qui pèse d'un poids humain de 82 millions de personnes, s'est révélée ainsi, de par l'intransigeance de ses responsables, une coquille vide, alors que les peuples maghrébins, qui voient à l'unité dans l'UMA l'interlocutrice privilégiée de l'Union européenne et des autres rassemblements politiques et économiques de par le monde. En réalité, cet échec pouvait-il être évité par un roi et des présidents engoncés dans leur quant à soit et jaloux de leurs prérogatives dans leurs petits «royaumes» où ils jouent aux dictateurs? En fait, les dirigeants maghrébins n'avaient ni la sérénité ni la largeur d'esprit et encore moins la volonté, sinon la magnanimité, les prédisposant à la construction d'un ensemble maghrébin compétitif au plan international et vecteur de développement et d'enrichissement pour les peuples du Maghreb. Hier, il fallait se rendre à l'évidence : le voeu d'un Grand Maghreb demeurera un rêve inachevé, pour ne point dire que ce rêve de Grand Maghreb est remisé aux calendes grecques.