Le divorce est consommé entre près de 56% (selon les chiffres officiels, Ndlr) des électeurs et ceux qui sollicitent d'eux leurs suffrages. Si l'abstention donne des cauchemars aux partis politiques, ces derniers n'en tirent aucune leçon. Dès que les urnes se referment on assiste à un spectacle désolant: les accusations de fraude fusent jetant le discrédit sur des élections dont on n'a eu de cesse de clamer la transparence et la propreté. Le vote des Algériens ne se serait donc point émancipé au point où à chaque rendez-vous électoral ce sont toujours les mêmes formations politiques qui sortent victorieuses des urnes. Une situation paradoxale si l'on en juge par les mouvements de protestation durs et tenaces (éducation nationale, santé, garde communaux, transports, émeutes du logement...) et la grogne sociale qui ont mis en ébullition le front social ces dernières années. A cette conjoncture s'ajoute la détérioration de l'environnement immédiat des populations (hygiène, ramassage d'ordures ménagères, coupures de courant et d'eau potable, éclairage public, état des routes...). On aurait pu penser qu'un pareil contexte serait défavorable aux partis politiques au pouvoir et que l'heure de l'alternance a sonné. Le verdict a été sans appel. L'équilibre des forces a été maintenu. Le FLN et le RND n'ont laissé que des miettes à leurs rivaux, sauf qu'une majorité d'Algériens ont décidé de bouder dorénavant et certainement pour longtemps les urnes. Est-ce de peur de voir leurs voix dévoyées? D'aucuns s'appuient sur cet argument pour tourner le dos aux élections. A force de tirer sur la corde, elle se casse. Le divorce est consommé entre près de 56% (selon les chiffres officiels, Ndlr) des électeurs et ceux qui sollicitent d'eux leurs suffrages. C'est le fruit de plus de cinquante années de vie politique où la fraude a régné en maître sur les rendez-vous électoraux avec comme cerise sur le gâteau, une administration minée par une bureaucratie qui a réduit l'Algérien au statut de sous-citoyen. Elle a fait le lit des passe-droits du clientélisme, de la cooptation...faute d'avoir su asseoir une véritable démocratie. «On peut affirmer, sans risque de se tromper, que depuis l'arrêt du processus électoral en 1992, l'Algérie n'a pas encore connu des élections libres et démocratiques. Cependant, nous avons assisté à des mascarades électorales auxquelles le peuple est invité, non pas pour décider de son destin, mais juste pour cautionner un jeu politique dicté par le pouvoir», a déclaré Abdallah Djaballah, le président du Front pour la justice et la démocratie (FJD) dans une interview publiée le 25 novembre 2012 par L'Expression. De leur côté, les candidats renvoient une image qui est loin d'être conforme à la mission qui leur incombe. Se mettre au service de la collectivité. La politique est devenue un moyen comme un autre de se faire une place au soleil. C'est en tout cas ce que pense et croie une majorité d'Algériens. Le mandat confié aux élus, qui consiste à être à l'écoute des doléances des citoyens pour améliorer leur cadre de vie et prendre en charge les affaires de la cité de manière générale a servi de tremplin à certains prédateurs qui ont mis les moyens de l'Etat au service de leurs intérêts au point de confondre Trésor public et porte-monnaie personnel. Des centaines de maires ont été mis sous les verrous pour cette raison...Un argument en béton pour expliquer l'attitude de ceux qui ont décidé de faire partie de la majorité silencieuse. Une position confortée par les irrégularités et les accusations de fraude dénoncées par de nombreux partis politiques lors du scrutin du 29 novembre.