Après les élections locales, place au projet d'amendement de la Constitution comme nouvelle phase dans le processus des réformes politiques. D'ores et déjà, les spécialistes s'interrogent: «Va-t-on vers une Constitution sur mesure ou plutôt une loi fondamentale durable, valable et favorable à la succession? Aussi, sur quoi doivent porter les prochains changements?» Sans s'attendre à une «révolution» ou un quelconque bouleversement, les spécialistes s'accordent à dire qu' «il vaut mieux garder le compromis de façade dilatoire et lier toute éventuelle décision à l'évolution de la pratique et des mentalités». «La société algérienne est le type de société basée plutôt sur la prééminence d'un seul pouvoir, autrement dit l'Exécutif, plus précisément la fonction présidentielle (...). Notre société n'est pas basée sur la séparation des pouvoirs et moins encore sur le modèle plus moderne et en vogue dit de l'équilibre des pouvoirs», dira Mme Fatiha Benabbou, spécialiste en droit constitutionnel. En tout cas, le concept de la séparation des pouvoirs est déjà dépassé, étant devenu obsolète et rigide dans les sociétés libérales. Actuellement, on fait appel plutôt au principe dit «d'équilibre des pouvoirs», dit-elle. Ce type d'équilibre dit de la «terreur», consiste à «doter chaque pouvoir de tous les moyens dont il en a besoin sans qu'il puisse pour autant les utiliser entièrement ou à sa guise. Ce type d'équilibre assure la sagesse politique», ajoute-t-elle. En tout état de cause, «il vaut mieux garder le compromis de façade dilatoire que de changer certains principes dans la Constitution et laisser le choix à la pratique», affirme-t-elle. Cela est d'autant important qu'exception faite de l'arithmétique, les forces politiques en présence en Algérie ne sont pas suffisamment connues et fixées, cela d'une part. D'autre part, il y a la conjoncture régionale, favorable aux éventuelles manipulations politiques et l'état de la conscientisation politique de la société, qui est loin d'avoir atteint sa maturité», a-t-elle estimé. De ce fait, on ne peut dans les conditions actuelles, s'aventurer à créer une situation ex-nihilo dans une société qui connaît une dépolitisation importante. Toutefois, le texte de la Constitution doit traduire la réalité et les rapports politiques existants. La révision ou l'amendement de la loi fondamentale se fait sentir quand la société évolue dans son processus de conscientisation politique et surtout dans sa perception de la légitimité de ses représentants. Or, «il est évident que la légitimité révolutionnaire consacrée par les précédentes Constitutions est aujourd'hui révolue», indique-t-elle. «La légitimité traditionnelle religieuse est aussi consommée et méconnue par la génération actuelle et l'élite portée sur la rationalité». Sur un autre plan, la Constitution fera-t-elle l'objet d'amendements mineurs ou profonds? «Le président de la République qui détient seul le pouvoir de l'initiative de la révision de la Constitution composera certainement par lui même le brouillon comportant les grandes lignes et l'orientation des amendements à apporter», de l'avis de Mme Abbou. «La commission d'étude de ces amendements devrait être composée des hommes de confiance du président», estime-t-elle. Les amendements pourront être mineurs conformément à l'article 176 de la Constitution comme ils peuvent être profonds suivant les articles 174 et 175 de la loi fondamentale. Dans le premier cas, l'adoption se fera par l'entremise du Parlement en ayant l'avis du Conseil constitutionnel. Dans le second cas, ou la révision dite profonde, le texte sera soumis à l'instar de toute autre projet de loi au vote de deux chambres parlementaires, et adopté à la majorité des 3/4 des membres de l'APN, et du Conseil de la nation. Par la suite, il fera l'objet d'un référendum populaire passé un délai de 50 jours. Par ailleurs, cette commission technique serait «exclusivement chargée de rédiger le texte de la Constitution amendée», selon quelques observateurs.