Le vote des grands électeurs, curieusement, coïncidera avec le verdict de la chambre administrative à propos de la crise du FLN. Hier, dans toutes les permanences des partis ayant des chances d'obtenir des sénateurs, le ton était à l'effervescence et aux tractations de dernière minute. Le vote des grands électeurs, qui intervient trois mois avant la présidentielle, sera déterminant, à plus d'un titre, sur la suite des évènements, ainsi que sur le futur débat politique dans le cadre de la campagne électorale. Tous les observateurs avertis, qui qualifient ce rendez-vous, de «primaires à l'algérienne», ne laissent pas de préciser que «le débat sera en grande partie tranché en ce qui concerne la crise qui secoue le FLN et dont l'issue sera déterminante pour les résultats de la future présidentielle». Entendre par là le bras de fer opposant le président Bouteflika à son ancien chef de gouvernement et actuel secrétaire général du FLN. Les dirigeants du mouvement de redressement, dont le soutien à un second mandat de Bouteflika ne fait plus de doute pour personne, affichent une mine optimiste. Ils revendiquent plus de 3500 élus locaux sur les quelque 5200 que compte le FLN. Le mouvement que dirige Abdelaziz Belkhadem, indiquent des sources proches de lui, «espère obtenir 22 postes de sénateurs, dont une dizaine grâce aux alliances contractées avec les partis membres de la coalition gouvernementale». Un chiffre relativement important s'il venait à se confirmer partant du principe que ce sont 49 membres de la chambre haute du Parlement algérien, sur les 144 qu'elle compte, dont 96 élus, qui doivent changer à cette occasion, deuxième du genre depuis le 30 décembre 2000. Le FLN légal, qui a préparé avec beaucoup de sérieux ce rendez-vous, affiche, lui aussi, une grande confiance quant à ses résultats, d'autant que la fraude est pratiquement proscrite lors des votes des grands électeurs, au nombre de 15.003. Mais le RND, à l'affût, comme le révèle son porte-parole Miloud Chorfi, compte bien garder ce qu'il appelle sa majorité, avec 35 sièges. De nombreuses alliances ont été contractées en ce sens. L'on croit savoir qu'elles l'ont été surtout avec les partis de la coalition, ainsi que les élus acquis du mouvement de redressement. Contrairement aux apparences, le parti de Ahmed Ouyahia est classé deuxième, après le FLN, en matière de nombre d'élus locaux. Il n'a pas tort, dès lors, de se prétendre de nouveau leader sur la base du conflit qui divise en deux les rangs du premier parti du pays. «Le tout, souligne avec le sourire M.Chorfi, est de savoir contracter les bonnes alliances». Hier, jusqu'à l'heure où nous mettions sous presse, des tractations de dernière minute se poursuivaient. La grande surprise peut également venir du mouvement El-Islah. Ce parti, déjà présent au niveau des APC, APW et de l'APN, est absolument certain d'entrer au Sénat, comme nous l'indique son porte-parole, M. Ould Abdesselam. Classé troisième en matière de nombre d'élus locaux, il peut lui aussi profiter de la crise du FLN, mais aussi des dissensions qui secouent les rangs du RND, pour créer la surprise. Mais pour le moment, le mouvement de Djaballah, qui représente actuellement le principal courant islamiste agréé par l'Etat, depuis le recul du MSP et l'effondrement du mouvement Nahda, joue les modestes en tablant, selon notre source, sur «seulement une douzaine de sièges». Le mouvement, nous indique également notre interlocuteur, a contracté des alliances au niveau d'une vingtaine de wilayas, notamment avec le MSP, un parti avec lequel il partage de nombreux points communs même si la stratégie de ces deux alliés diverge sensiblement. Le PT, présent uniquement dans quelques APW, nous indique un membre de sa direction, Karim Labechri, a «décidé de soutenir des candidats sans tenir compte de leur couleur politique, mais sur la base d'un engagement écrit à travers lequel les futurs élus revendiqueront l'utilisation des réserves de change au profit du secteur public et des zones sinistrées, mais aussi au renforcement de la démocratie et des libertés syndicales». Autre fait marquant de cette sénatoriale, nettement différente de celle qui l'avait précédée, le FFS, détenteur de deux sièges, va quitter officiellement le Sénat en appelant au boycott. La Kabylie, avec ce qui reste comme élus locaux représentés par le FLN et le RND ne votera pas, tel qu'indiqué par un communiqué rendu public hier par le ministère de l'Intérieur, cela en attendant la tenue de l'élection présidentielle. Ces dernières, de plus en plus incertaines, font que la région reste confinée dans son isolement.