La secrétaire d'Etat américaine a estimé que les révoltes qui ont secoué l'Afrique du Nord (Tunisie, Libye, Egypte, Ndlr) ont contribué à fragiliser les pays de la région. Les Américains regrettent-ils l'intervention militaire, pilotée par la France et menée sous la bannière de l'Otan entre le 19 mars 2011 et le 31 octobre 2011, qui a permis de mettre fin au régime de Mouammar El Gueddafi? Les Occidentaux, dont l'objectif de cette opération a été de mettre un terme à plus de 40 années de règne sans partage du guide de l'ex-Jamahiria tué le 20 octobre 2011 pour promouvoir la démocratie, n'avaient apparemment qu'une vision à court terme du conflit libyen. La chef de la diplomatie américaine ne le dit pas comme elle n'en reconnait pas le fiasco. Elle met cependant en garde contre le risque terroriste islamiste au Maghreb en particulier et en Afrique du Nord en général tout en affirmant que: «les révolutions arabes ont bouleversé la dynamique du pouvoir en place et porté un coup aux forces de sécurité dans la région». «L'instabilité au Mali a créé un refuge pour des terroristes qui cherchent à étendre leur influence et à perpétrer davantage d'attaques du genre de celle de la semaine dernière en Algérie», a poursuivi le 23 janvier Mme Clinton devant la commission des Affaires étrangères du Sénat américain. Une autre manière de dire que la coalition occidentale n'a pas mesuré l'impact de cette opération sur la région. Pendant le conflit libyen, les arsenaux du colonel libyen ont permis aux groupes terroristes islamistes (Al Qaîda, le Mujao, Ansar Eddine...) de se surarmer. Ils ont depuis, imposé leur loi au Mali. Poussant leur audace jusqu'à lancer une opération contre un des plus importants sites gaziers en Algérie (Tiguentourine à In Amenas) revendiquée par la katiba des «signataires par le sang», dirigée par Mokhtar Belmokhtar tandis que souffle sur la Tunisie voisine un vent d'intolérance véhiculé par une mouvance islamiste radicale. De son côté, l'Egypte célèbre le second anniversaire de sa révolution sur fond de protestations contre son président, l'islamiste Mohamed Morsi. Les Etats-Unis observent et demeurent sur le qui-vive. L'attentat qui a ciblé la représentation US à Benghazi leur a fait franchir un nouveau palier dans la lutte antiterroriste. Les «inquiétudes face au terrorisme et à l'instabilité en Afrique du Nord ne sont pas nouvelles... Mais après Benghazi, nous avons accéléré notre campagne diplomatique pour augmenter la pression sur Al Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi) et d'autres groupes terroristes dans la région», a reconnu la chef de la diplomatie américaine qui doit quitter son poste dans quelques jours. Auditionnée mercredi dernier par le Congrès au sujet de l'attaque contre l'ambassade des Etats-Unis à Benghazi, qui a coûté la vie à son ambassadeur Chris Stevens, et à trois de ses collaborateurs, elle a souligné que cette agression «ne s'est pas produite à partir du vide». Elle serait même annonciatrice d'une recrudescence d'actions de ce type. La menace serait imminente: elle ciblerait les Occidentaux résidant à Benghazi. Le Royaume-Uni, l'Allemagne et les Pays-Bas ont appelé, le 24 janvier, leurs ressortissants à quitter immédiatement cette ville côtière berceau de la Révolution libyenne. «Nous sommes maintenant au courant d'une menace spécifique et imminente contre les Occidentaux à Benghazi et demandons aux Britanniques qui sont là-bas, en dépit de nos conseils, de partir immédiatement», a prévenu jeudi dans un communiqué le ministère britannique des Affaires étrangères. Une note publiée par les services de la diplomatie néerlandaise déconseille à ses ressortissants de voyager vers et à travers Benghazi et à y demeurer sur place. Le ministère allemand des Affaires étrangères a carrément appelé ses ressortissants à quitter en urgence la ville de Benghazi et sa région en raison de risques qui viseraient essentiellement les Occidentaux... Le revers de la médaille pour l'expédition militaire occidentale en Libye.