L'exposition est centrée sur la manière d'apprivoiser la lumière dans un espace fait d'intime harmonie et de pureté. Forger la lumière, quelle brillantissime idée! «Un jour, je construirais pour l'Algérie. Je le sais, je le sens», a déclaré une fois le designer Yamo, de son vrai nom Yahiaoui Mohamed. On dit de lui que c'est l'un des designers les plus prisés de Paris. Son rêve va aujourd'hui peut-être se réaliser, puisque Yamo va exposer pour la première fois dans son pays. «Yamo sculpteur de lumière» est le nom générique de sa nouvelle exposition qui sera inaugurée cet après-midi au Musée national des Beaux-Arts. Placée sous le patronage du président de la République et organisée par le ministère de la Culture et de la Communication, elle est présentée comme un événement culturel exceptionnel. «Le résultat d'une somme d'énergie et de volonté.» «L'exposition est centrée sur la lumière où la manière d'apprivoiser est de capter la lumière», dit Mustapha Orif, le commissaire d'exposition, et de souligner lors d'un point de presse animé avant-hier au musée: «Elle est principalement axée sur une réappropriation du patrimoine culturel algérien, duquel Yamo fait partie intégrante». Axée sur la scénographie, l'exposition met en scène le «vide» dans un jeu subtil de lumière que produit une lampe ou une bougie qui par le génie du créateur insuffle à «un vase luminaire» une aura particulière, une note d'universel dans un univers fait de raffinement et d'inspiration aquatique. Clin d'oeil aux pêcheurs de la pointe Pescade, sable, narguilé, mobiliers aux motifs tunisiens, accessoires aux accents africain, mangole ou ottoman, toutes ces oeuvres sont le fruit de ses connaissances et le flux intelligent de leur mariage unissant l'esprit à la matière. Pas étonnant que cet homme qui fête ses 46 ans, ait pu accrocher l'univers et recevoir de nombreux prix à travers le monde. Déjà brillant élève à l'Ecole nationale des beaux-arts, l'artiste éclatera son talent outre-mer. Il revient toujours aussi humble et généreux. Nul n'est prophète dans son pays. Yamo, être à part et comme tout les Algériens à la fois, aime accaparer l'espace pour mieux maîtriser le vide, le dompter et cultiver ses zones positives est peut-être l'apanage de tout architecte d'intérieur et par ricochet de Yamo, qui se plaît, dit-il, à «susciter une attention» par des exercices de forme et de réflexion. Installation gigantesque, des lampes aux fils longilignes qui plantent leurs antennes vers le ciel: une façon de dire: «Regardez-moi!» et «pour se faire remarquer, il faut être remarquable et donner des signes très forts. Et pour communiquer, il faut être intéressant», explique Yamo qui, comme chaque artiste qui se respecte, cultive un peu la folie des grandeurs mais dans le bon sens. Une orientation avant-gardiste qui lui permet de dire sa passion et exprimer enfin sa différence. La verrerie est l'autre matériau qu'il façonne selon son tempérament, clair et chaud à la fois. De la pureté en fait, qu'il aime à façonner dans un monde de magie. Un milieu intime qui respire la paix et le confort mêlé à la beauté d'un décor où l'on voudrait se lover pour longtemps. «Si l'émotion passe, c'est que l'objectif est atteint». L'artiste aime fabriquer lui-même ses objets. Rien n'a de secret pour ses mains. Tout y passe. D'ailleurs, sa seconde exposition sera consacrée aux bijoux. Il travaille actuellement avec la bijouterie Antri Bouzar, et la prochaine sera consacrée au tapis. En plus de la découverte de nos talents qui font merveille à l'étranger, cette exposition sera la preuve si besoin est, que notre Ecole nationale des beaux-arts a su enfanter de la bonne graine qu'il faut savoir préserver. Cette exposition tâchera ainsi de mettre à l'honneur une discipline assez méconnue finalement en Algérie, qui peut très bien s'épanouir, aussi bien sur le plan économique si l'on connaît sa valeur qu'artistique. Ceci est l'autre objectif de Yamo qui compte bien faire découvrir aux industriels algériens son savoir-faire pour d'éventuelles collaborations. Ne s'arrêtant pas à l'exposition, le designer mû par le sérieux et la rigueur qui caractérisent ses ambitions, a tracé tout un programme qui accompagnera de manière rationnelle son séjour. Ainsi, après l'ouverture de l'expo le 16 janvier, Yamo lance le 7 février, un atelier design d'une semaine avec les étudiants de la section design de l'Ecole nationale des Beaux-Arts. Le 10 février, une visite guidée sera réservée aux industriels et managers en vue d'intégrer le design dans l'entreprise algérienne. Enfin, le 15 février l'atelier de design sera clôturé suivi de débats avec les étudiants et professeurs de l'Ecole nationale des Beaux-Arts. Le 16 mars prendra fin l'exposition au Musée. A voir absolument.