Sale temps pour le terrorisme, aussi bien algérien qu'international. Depuis le 11 septembre, les donnes ont changé et, de fait, les groupes armés adoptent d'autres attitudes. Sur le plan international, l'exhortation du mollah Omar à l'endroit des musulmans du monde entier, et avant lui, l'appel à un soulèvement religieux international, ont été révélateurs de cet état d'esprit. Sur le plan interne, l'attentat du Gspc, qui a coûté la vie à trois gardes au village frontalier d'Oum Ali, en Tunisie, semble obéir à cette même logique de porter le terrorisme «hors base», pour plusieurs raisons. La première - et qui semble la plus évidente - consiste à desserrer l'étau et faire diversion, après les ratissages «en continu» des troupes de l'ALN contre les éléments du Gspc, auteurs du carnage de Aïn Fourisse, c'est-à-dire de l'autre côté de la frontière, près de Tébessa, et qui avait fait onze morts. La deuxième raison à retenir est que le terrorisme est devenu un produit «hautement exportable». Les attentats antiaméricains en ont confirmé la teneur. L'attentat sur le sol tunisien même est-il l'écho de l'appel de Ben Laden aux islamistes du monde entier? Plausible. Sauf que certains optent plutôt pour un acte commis pour emmener les autorités tunisiennes à paniquer ou les islamistes tunisiens «dormants» à s'activer. L'antécédent du Gspc sur le sol tunisien plaide pour la dernière thèse. En 1997,7 douaniers tunisiens en postes à Bouchebka avaient été égorgés par un groupe terroriste. Les suites de l'enquête n'ont rien révélé mais le Gspc étant né officiellement en 1998, le crime a été imputé au GIA pour les mêmes raisons qu'aujourd'hui, à savoir faire diversion et desserrer l'étau des militaires sur leurs compagnons, restés à l'intérieur du «périmètre d'action». Cette stratégie de porter le danger à l'extérieur a aussi ses avantages, sur le plan de la donne sécuritaire, car elle permet de porter le danger dans une zone sécurisée et donc sans garde, et de créer, de fait, une nouvelle zone de turbulences. Elle permet de bénéficier des dividendes de l'effet médias, en ce sens qu'elle maintient en l'état l'activité terroriste, qui, dans la réalité, bat de l'aile. Il y a deux jours, s'exprimant en direct à la télévision, Noureddine Yazid Zerhouni, disait qu'il ne restait désormais plus «que» 700 terroristes dans les maquis, dont 300 à 400 armés, et usant d'une guérilla urbaine. Pour optimiste que voulait être cette information, c'est l'effet contraire qu'elle a produit. 700 terroristes, dont 400 armés, c'est énorme, ébouriffant. Il avait suffi de 20 pour faire ébranler l'arrogance des USA et faire trembler sa puissance. Qu'en serait-il de l'Algérie avec 400 disséminés un peu partout et 400 autres dormants, prêts à surgir? En réalité, les choses ne sont pas encore là. Les groupes armés s'éteignent peu à peu. Ils persisteront, cependant, à petite échelle. C'est un phénomène qui a pris du temps à se former, à se construire et à fonctionner. Aussi, mettra-t-il du temps à s'éteindre. Déjà, on assiste, depuis deux ou trois années, à la lente agonie des GIA et du Gspc, groupés qui ont connu leurs heures de gloire par le passé. Treize terroristes abattus en quarante-huit heures, cinq qui se sont rendus à Ténès. C'est le lot de la dernière semaine. Le constat est amer et extirper à la racine le phénomène, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, n'est pas chose aisée. Les mêmes effets produisant les mêmes causes, le terrorisme peut reprendre de plus belle, pour peu que les raisons qui l'ont créé se remettent à fonctionner. C'est la logique du pire. Mais c'est la logique des choses, malgré tout.