La 23e édition n'est déjà plus qu'un souvenir C'est le célèbre groupe de musique ivoirien Magic System qui devait clôturer, hier en beauté, la cérémonie de clôture. Vendredi 1er mars, dernière ligne droite pour le plus grand festival du cinéma africain au monde. En attendant le verdict du jury présidé par une femme, lequel devait être donné hier, les cinéphiles ont continué à arpenter, vendredi dernier les salles de cinéma en allant voir tout type de films populaires qui côtoient le film d'auteur. Ce qui fait d'ailleurs la richesse et la diversité du Fesapco. Un peu moins de fréquentations, cela dit cette année, avons-nous remarqué. Alors que le cinéma burkinabé des plus rafraîchissants à créé l'événement au Fespaco cette semaine, notamment grâce à son film Moi Zaphira, fresque sociale et populaire filmée à la manière d'un téléfilm bourré de clichés sur la culture africaine, l'histoire des indépendances s'est invitée au cinéma le dernier jour du festival. Vendredi, deux longs métrages en compétition ont abordé l'aspect politique de deux pays africains. D'abord, le Rwanda avec Imbabazi (le Pardon) de Joël Karekezi. Après avoir été incarcéré pour le meurtre de Tutsis pendant le génocide rwandais, Manzi doit faire face aux conséquences émotionnelles et psychologiques de son crime le plus personnel: l'assassinat de la famille de son meilleur ami. Si le film évoque de façon frontale le massacre du Rwanda, un sujet fort intéressant rarement traité au cinéma, le traitement lui, très primaire, donnait un aspect des plus écoliers à cette histoire qui ne tient pas très bien la route. Car pardonner à un assassin n'est pas comme pardonner à un gamin qui nous a frappés. Un raccourci bien simple auquel le réalisateur a eu recours pour placer son happy end. L'autre film projeté cette fois à l'Institut français est Toile d'araignée, premier long métrage du Malien Ibrahima Touré. Un film qui, là aussi, touche à un sujet sensible, celui de la mauvaise gouvernance dans les sociétés africaines, mais en le faisant très mal. La Toile d'araignée, en lice pour l'Etalon d'or du 23e Fespaco, montre le combat d'une jeune femme, une adolescente plutôt, puisqu'elle n'a que 17 ans quand elle est forcée de se marier et refuse d'épouser le mari choisi par ses parents. Malgré la pression du village et les tortures et brimades au commissariat et en prison, elle n'abdique pas et reste fidele à son amoureux. Dans Toile d'araignée, la vie privée se mêle des affaires publiques. Qu'il s'agisse d'une désobéissance parentale ou étatique, le résultat est le même: on te met au cachot. Personne n'a son mot à dire. La liberté n'existe pas. Pas même l'esprit d'indépendance. Alors que dehors plane l'interdit, paradoxalement c'est en milieu carcéral que cette jeune fille trouvera réconfort et soutien, notamment de la part de ce vieux sage et cet intellectuel. Tourné en six semaines avec un seul acteur professionnel et un petit budget de 180 millions de francs CFA (274.000 euros), ce long métrage dresse un portrait assez noir du Mali, servi par un décor assez misérabiliste forçant par moment les traits de caractère de ses personnages jusqu'à la caricature. Un bémol de taille, car le film aurait gagné en profondeur au lieu de se limiter à la pochade et la singerie comme si on voulait à tout prix pousser le public à ressentir des choses. Si l'idée du film passe comme une lettre à la poste en raison du langage cinématographique très rudimentaire, le film perd de sa valeur, du moment qu'il se complait dans le pastiche et la raillerie. Manquait la finesse qui vous introduit dans l'intimité du cadre et vous ensorcèle. Dans Toile d'araignée, si certains personnages sont bons, reste que l'écriture fait défaut. Il est bien à noter que le Fespaco 2013, en plus des projections dans différentes salles de cinéma, a comporté aussi un colloque portant sur le cinéma et les politiques publiques en Afrique. Les recommandations du colloque dévoilées le 27 février dernier se sont articulées autour de la question du financement du cinéma africain dans le respect de la «liberté d'expression, du ton et de l'imaginaire». Mais le plus important est que les professionnels prennent leurs responsabilités au sérieux. Le Fespaco c'est aussi le fameux «Mica», le «super» marché international du cinéma et de la télévision où l'on vient faire des contacts fructueux en attendant de signer des contrats alléchants. Laborieux, le Fespaco 2013 et bien éprouvant, la moisson cinématographique de cette année aura été surprenante, éclectique, mais pas très passionnante.