Des trophées plein les mains pour Nasroun Bouhil, le représentant de l'Aarc L'Algérie se distingue haut la main en remportant cinq prix dont trois pour Yema de Djamila Sahraoui et deux pour Zabana! de Saïd Ould Khelifa. Le rideau est tombé, samedi dernier, sur la 23e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), le grand rendez-vous du cinéma d'Afrique. Un événement qui n'a pas su créer la surprise cette année, question émerveillement cinématographique tant les bons films qui sortaient du lot, nous les avions déjà appréciés ailleurs. Pas de coup de coeur donc. Toutefois, il y avait bien un film qui arrivait à nous parler pour l'avoir déjà vu à Alger, car projeté dans le cadre du Festival du film engagé. Un film très émouvant et d'une valeur cinématographique indéniable, embelli par des plans photographiques époustouflants parlant à l'âme et au coeur. Il s'agit bien sûr de Tey (Aujourd'hui) du cinéaste franco-sénégalais Alain Gomis, qui aborde avec poésie une réflexion, la notion de vie et de mort. Si Tey a remporté avec succès donc, samedi à Ouagadougou (Burkina Faso), le premier Prix, à savoir le prestigieux Etalon d'or de Yennenga, c'est l'Algérie qui le talonnera de près, après l'attribution à Yema de Djamila Sahraoui, l'Etalon d'argent. Un Prix qui vient s'ajouter à celui de la meilleure image, en plus d'une mention spéciale du jury pour l'interprétation féminine. Le troisième Prix du meilleur long métrage de fiction, l'Etalon de bronze a, quant à lui, été attribué au Sénégalais Moussa Touré pour La Pirogue, un film sur le thème de l'émigration clandestine qui a, par ailleurs, reçu les Prix spéciaux des Etats-Unis et de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest. Dans la catégorie documentaire, Même pas mal de la Tunisienne Nadia El Fani a remporté le Premier Prix, tandis que Calypso rose de Pascal Obolo (Cameroun) et Président Dia de Ousmane W. Mbaye ont respectivement remporté les deuxième et troisième Prix. Des récompenses amplement méritées pour des films aux thématiques aussi fortes que diverses et au propos sous-jacent des plus percutants. Pour Même pas mal, cela va de soi que le prix soit un signe politique fort adressé de la part du Fespaco pour soutenir la liberté d'expression dans les pays africains. Comme nous le soulignera, en effet, Nadia El Fani, qui déclarera en exclusivité à L'Expression tellement cette récompense est extraordinaire, en la dédiant «à la Tunisie des lumières, à sa jeunesse qui danse aujourd'hui pour protester contre les islamistes. Je pense que la meilleure des réponses contre la violence c'est de continuer à être pacifique et à faire des films, des oeuvres d'art, écrire des livres, car eux, ils n'en sont pas capables». Nadia El Fani n'omettra pas, cela dit, de tomber sur la Tunisie qui ne l'a jamais sélectionnée au festival de Carthage, contrairement au Fespaco. «C'est un message fort en effet de la part de l'Afrique de dire que tous les pays ne sont pas prêts à censurer les cinéastes!» Côté court métrage, notons que c'est au Tunisien Anis Lasoued que le Poulain d'or a été décerné pour Les Souliers de l'Aïd alors que les Poulains d'argent et de bronze sont successivement revenus au Malgache David Randriamanana pour Photographies et à la Gabonaise Nadine Ostobogo pour Dialemi. Aussi, le Marocain Nabil Ayouch, absent au Fespaco, a été le récipiendaire du Prix du meilleur scénario pour Les Cheveux de dieu, tandis que la fiction historique Zabana! de Saïd Ould Khelifa, lui aussi absent, a remporté les prix du meilleur décor et de la meilleure musique. Des trophées que le représentant de l'Aarc, responsable du département promotion et diffusion (Agence algérienne pour le rayonnement culturel, coproducteur de film) Nesroun Bouhil, a dû réceptionner en adressant ses vifs remerciements au Fespaco et à Ouagadougou. Le Prix de la meilleure interprétation masculine est revenu à l'acteur américain Saul Williams qui joue dans Aujourd'hui de Alain Gomis. Une mention spéciale a été accordée à Hamadoun Kassogué dans Toiles d'araignées d'Ibrahima Touré du Mali. Le Prix de la meilleure interprétation féminine a été décerné à Mariam Ouédraogo dans Moi, Zaphira d'Apolline Traoré (Burkina Faso). Le prix Oumarou Ganda de la première oeuvre est revenu à Les Enfants de Troumaron de Harrikrisna Anenden et Sharvan Anenden (île Maurice). Outre le palmarès, cette cérémonie de clôture des plus festives a été rehaussée par le concert du groupe ivoirien Magic System ainsi que le spectacle chorégraphique Le Masque. Des recommandations ont aussi été émises par le jury, notamment l'acceptation enfin et l'introduction lors de la prochaine édition du Fespaco, de la projection de films tournés en mode numérique. Ce qui n'est pas encore le cas et qui nous amène à conclure par ricochet que Le Repenti de Merzak Allouache a été bel et bien écarté de la compétition. Enfin, les montants des prix seront revus à la hausse et verront même leur coût doubler pour l'édition de 2015. Se déroulant du 22 février jusqu'au 3 mars, l'édition de 2013 a proposé au public de voir en somme 101 oeuvres de 35 pays africains, lesquels concouraient dans les différentes catégories du 23e Fespaco consacré cette année au thème «Des politiques publiques du cinéma africain». Un festival qui a mis les femmes cette année à l'honneur au niveau de la présidence des jurys, ce qui fera dire à de nombreux réalisateurs récompensés sur scène «Vive les femmes!»