Une étrange coïncidence existe entre certaines revendications du PT et les décisions prises en Conseil des ministres. Les membres du fameux groupe des Onze, joints hier par téléphone, se sont tous accordés à qualifier de «non événement» les mesures prises par Bouteflika en Conseil des ministres en matière d'application de la loi pour la neutralité et la démocratie lors du prochain scrutin. Une de nos sources explique cette «défiance» par le fait qu'«il existe un monde entre ces déclarations sereines et apaisantes destinées à la consommation internationale et la dégradation de la situation sur le terrain qui va toujours crescendo». Que l'on en juge. Même s'il est reproché au dernier communiqué des onze d'être resté dans le vague, les entraves à la collecte des signatures sont nombreuses et concernent uniquement les candidats de ce groupe. «L'opération se déroule dans des conditions draconiennes. Un véritable climat de terreur est érigé dans certaines APC où des portraits gigantesques de Bouteflika ont été mis en place pour la circonstance. Les citoyens désirant signer sont invités à attendre plusieurs heures durant afin de les décourager. Ce jeudi, une APC de Annaba était fermée sans la moindre raison notable. Les pièces supplémentaires exigées contrairement à ce que prévoit la loi restent toujours de mise. Des élus qui ont signé en faveur de certains candidats reçoivent de mystérieuses visites nocturnes, ce qui les pousse le matin à se rétracter.» La liste reste encore ouverte, ajoutent nos sources pour qui «la dernière déclaration était volontairement restée dans le flou dans le but de laisser une chance aux pouvoirs publics de se corriger si tant est qu'ils soient de bonne foi.» Or, comme il semble que ce ne soit pas le cas, nous apprenons en exclusivité que «la rencontre des onze, prévue aujourd'hui chez Benbitour, doit se pencher sur le dépôt d'une plainte contre le ministre de l'Intérieur, principal responsable de ces dépassements, destinataire des lettres de protestation, sans que les choses n'évoluent dans le sens positif». La question de cette plainte, croit-on savoir, avait déjà été évoquée lors de la rencontre de ce mardi au siège du FLN. Elle avait fini par être ajournée dans le ferme espoir que Zerhouni saurait se corriger, et montrer des signes de bonne volonté durant ce week-end. Or, il n'en a rien été. Pour ce qui est de l'Armée, nos sources indiquent, tel que rapporté dans notre édition de ce mercredi, que «les onze ont fait exprès de ne pas saisir directement l'ANP et de ne pas expliciter leurs revendications». Explication : «Les choses n'en sont pas encore à un point tel qu'il faille interpeller directement l'Armée et lui demander d'intervenir sur des points précis sous peine de vivre de graves et dangereux dérapages.» Ceci d'une part. D'autre part, «la démarche des onze consiste à aller toujours crescendo en fonction de l'évolution des évènements dans le cadre des ripostes aux dépassements de plus en plus graves commis par les hommes proches de Bouteflika». Mohamed Saïd, porte-parole de Wafa, cherche des actes concrets avant de pouvoir jubiler : «C'est un événement qui aurait pu être salué par toute la classe politique si la réalité sur le terrain était autre que celle que vivent les citoyens, à savoir un climat de terreur entretenu par une administration asservie par une bande décidée à garder le pouvoir coûte que coûte.» Si l'on excepte le RND qui continue d'afficher une béate admiration par rapport à tout ce que fait le président, le FFS précise ne pas être concerné par cette démarche alors que le PT pense retrouver une partie des revendications formulées par Louisa Hanoune lors de sa rencontre avec Bouteflika. Il n'empêche que la décision de radier des indus élus vient créer un nouveau foyer de tension au moment où le ton devrait être exclusivement donné aux mesures d'apaisement. S'agissant du PT et de la position de son secrétaire général relative au groupe des onze sur nos colonnes ce jeudi, des sources proches des onze soulignent que «les positions des uns et des autres vont automatiquement se rejoindre et se croiser sur le terrain au fur et à mesure que les candidats seront confrontés à la réalité».