La réconciliation intervenue à l'APN n'a pas été profitable aux deux camps dont les affrontements se font à couteaux tirés. Comme annoncé précédemment, le comité central du FLN, issu de son 7e congrès, en session ouverte depuis le 19 avril, s'est réuni hier à Alger sous la présidence d'Abdelkrim Abada, porte-parole de la coordination provisoire chargée de gérer les affaires courantes du parti. Celui-ci, contrairement à ses habitudes, a improvisé un discours d'une extrême virulence à l'endroit du mouvement de redressement en général, et de son coordonnateur national en particulier. C'est en présence de pas moins 135 membres (alors que le quorum n'est que de 122), auxquels il faut ajouter 10 procurations et 17 absences justifiées, qu'Abada est revenu en détail sur la série de rencontres qu'il a eues avec Belkhadem au siège de son ministère. «Ce qui est étonnant, c'est que les accords que nous réussissons à dégager péniblement pour le bien du parti, de la légalité et de la démocratie, sont dénoncés le lendemain par Belkhadem.» Il en va ainsi de la fameuse déclaration de réconciliation commune signée par Abada et Belkhadem, qui avait circulé auprès des militants avant d'être démentie par le coordonnateur. Abada, qui n'hésite pas à parler de mauvaise foi, et à décréter «irrecevables» les fameuses cinq conditions, «comme Belkhadem l'avait lui-même reconnu avant de revenir sur sa déclaration», ajoute que «la situation est encore plus ubuesque à l'intérieur du pays.» Explication : «Nos mouhafedhs dépensent force temps et énergie pour trouver un terrain d'entente avec le coordonnateur local. Le lendemain, un autre, détenteur de décision dûment signée, vient contester la position de l'autre.» Ainsi, il existe dans certaines wilayas jusqu'à cinq coordonnateurs, tous nommés par décision. A la lumière de la rencontre d'hier, à laquelle ont pris part les anciens ministres et membres du bureau politique de Benflis, mais aussi Karim Younès, Boualem Benhamouda, Abderrahmane Belayat, Sadek Bouguettaya et Abbas Mikhalif, il semble que celle-ci est venue sceller définitivement la rupture entre les deux ailes qui se disputent le contrôle du FLN. «Si nous avons décidé d'accélérer le mouvement et de convoquer le comité central pour aujourd'hui, c'est que nous avons appris que le mouvement de redressement, après avoir décidé de rompre définitivement avec nous à la suite de la rencontre de ses coordonnateurs de wilayas, aurait décidé d'installer ce jeudi (avant-hier. Ndlr) la commission de préparation du congrès.» Abada, qui laisse libres les membres du comité de décider lors de la séance qui s'est poursuivie à huis clos, opterait pour un durcissement de ton en installant à son tour sa propre commission. «Même s'ils veulent prendre le contrôle et nous liquider, il faudrait au moins qu'ils respectent les formes et la réglementation partant de laquelle la seule référence est le 7e congrès depuis que la justice a décidé d'invalider le 8e», s'indigne ainsi Abada, qui ajoute que «s'il veulent recourir à la manière forte pour contrôler les sièges et le sigle, nous prendron à témoin le peuple et l'Histoire qui sauront les juger.» Abada, qui contrôlerait ainsi le comité central dans sa majorité, salue au passage la discipline dont font montre les élus et les cadres, demeurés tous fidèles à cette direction en attendant qu'une solution soit trouvée. Il souligne ainsi que «la journée parlementaire à laquelle avait illégalement appelé Belkhadem, avec l'aide de certains walis, comme l'attestent les documents en notre possession, n'a drainé que 82 personnes entre députés et sénateurs, contrairement au chiffre de 132 évoqué par eux.» Abdelhamid Si Afif, joint par téléphone, a contesté cette rencontre, qualifiée par lui de «non-événement». Le chiffre qu'ils avancent est archi-faux, martèle-t-il, en voulant pour preuve le fait que pas moins de 142 membres de cette instance ont souligné par écrit leur soutien à Bekhadem en sa qualité de président de la commission de préparation du congrès, auxquels il faudrait ajouter une quinzaine qui ont rompu avec la direction depuis longtemps. Pour rappel, ce CC comporte 243 membres encore vivants. Si Afif, qui salue «la manière responsable avec laquelle s'est comporté le groupe parlementaire, et le magnifique discours qui a été fait ce jeudi», s'indigne que «les autres n'en tirent pas les leçons idoines au lieu de s'obstiner dans leur politique suicidaire.» Dans une longue déclaration abondant dans ce sens, Si Afif précise que «l'installation de la commission de préparation du 8e congrès, rassembleur, se fera dans le courant de cette semaine.» Les évènements de ce week-end, après l'embellie parlementaire, annoncent-ils de nouvelles tensions, et une aggravation de la crise? Rien n'est moins sûr, même s'il est encore difficile de savoir de quel poids réel dispose chacune de ces deux parties dont l'une, selon Abada, «agit ouvertement au nom des plus hautes autorités du pays, à commencer par le président Bouteflika.»