La Ligue arabe vient de perdre ce qui lui restait de crédibilité. Entraînés par le Qatar sur le dossier syrien, les pays arabes, à l'exception de l'Algérie et de l'Irak qui se sont démarqués et du Liban qui s'est abstenu, ont donné à Doha un sacré coup à leur organisation dans ses relations avec les autres instances internationales. Ils l'on fait au cours du 24e Sommet de la Ligue, mené au pas de charge (il a été clôturé plus tôt que prévu de 24 heures). Un sommet qui marquera l'histoire du Monde arabe en déclin. Un sommet qui a piétiné sa propre charte pour installer l'opposition syrienne à la place de l'Etat syrien. Le ministre russe, Serguei Lavrov, ne s'est pas privé, jeudi dernier, de rappeler l'article 8 de la Charte de la Ligue arabe qui «souligne la nécessité de respecter les structures politiques dans les Etats arabes et interdit toute action visant à renverser les régimes dans ces Etats». Il rejoint, en ce sens, l'argument défendu par l'Algérie. Allant dans le même sens, c'est Mme Louisa Hanoune, cette femme politique algérienne qui chaque jour nous donne des leçons de patriotisme et de courage, qui a eu, avant lui, le mot, qui pour être le plus juste, ne pouvait qu'être le plus dur. Pour elle, la Ligue arabe est devenue «une Ligue de putschistes». Par cette décision contre nature, la Ligue arabe, croyait ouvrir la voie à l'obtention d'un siège à l'ONU à l'opposition syrienne. Le but était d'aller vers une intervention militaire directe contre la Syrie avec la bénédiction onusienne. C'est ce qu'a réclamé, dès l'ouverture du Sommet de Doha, le chef de l'opposition syrienne. Mauvais calcul. Comme on dit si bien chez nous: «Li yahsseb ouahdou, ichitlou.» Une citation dont l'esprit veut dire que «celui qui compte seul, sans tenir compte de la réalité, croira toujours avoir plus que ce qu'il pensait». Le Qatar et les pays arabes qui l'ont suivi n'ont pas tardé à s'en rendre compte. «La Ligue arabe a sapé les efforts de l'envoyé spécial (de l'ONU) Lakhdar Brahimi, ce qui est un développement malheureux qui a nui à la réputation de la Ligue arabe qui est devenue une force négative plutôt que positive», a déclaré le président du Conseil de sécurité des Nations unies, M.Vitaly Churkin. De Bruxelles, un responsable de l'Otan a déclaré que l'Alliance atlantique «n'avait aucune intention d'intervenir militairement en Syrie». Même Paris sur qui misait le Qatar et l'opposition syrienne, a décidé de ne pas livrer d'armes aux rebelles. Jeudi dernier, lors de son intervention télévisée, le président français, François Hollande, a été très clair à ce sujet. «Nous ne le ferons pas, car nous n'avons pas la certitude que l'opposition exerce un contrôle total», a-t-il précisé au sujet de ces livraisons d'armes aux Syriens installés par la Ligue arabe. Que reste-t-il «aux amis de la Syrie» à qui ont été remis les clés de l'ambassade de Syrie au Qatar? Le communiqué de la Ligue arabe souligne que «chaque Etat membre a le droit d'apporter tous les moyens d'autodéfense, y compris militaires, pour soutenir la résistance du peuple syrien». Comme hypocrisie, difficile de trouver mieux. Il est question de «soutenir un peuple» à qui, dans le même temps, on refuse de s'exprimer par les urnes. Venant d'Etats, pour la plupart pas très habitués aux élections, cela n'étonne guère. Le 25e Sommet aura réussi à discréditer davantage la Ligue arabe sur la scène internationale. Cette «force» devenue négative a été prise à son propre jeu. Celui de la grenouille et du boeuf de la fable. Les peuples arabes méritent mieux que cette organisation qui accepte de servir d'alibi à tous leurs ennemis. En contrepartie de quoi le Qatar livre-t-il ainsi les peuples arabes au chaos? L'organisation de la Coupe du Monde de football, avec stades climatisés? En 2022? D'ici là, beaucoup d'eau aura coulé sous les ponts...