C'est la première fois que l'Algérie réagit de manière très officielle aux activité du n° 1 de l'ex-FIS. L'ambassadeur de l'Arabie Saoudite en poste à Alger a été convoqué hier par le ministère des Affaires étrangères pour s'expliquer au sujet de la présence de Abassi Madani à la réception offerte, lundi dernier, par le roi saoudien, Fahd Ibn Abdelaziz, à l'occasion de la fête de l'Aïd El Adha. Dans un communiqué rendu public le même jour, le ministère des Affaires étrangères a indiqué que l'ambassadeur du royaume saoudien a été convié pour faire part des véritables motivations de l'initiative du roi wahhabite. Une réaction qui en dit long sur l'irritation des autorités algériennes face à «l'honneur» rendu au président du parti dissous par un pays connu pour ses accointances avec les mouvements islamistes radicaux. De plus, le gouvernement algérien semble décidé à faire la part des choses quant à la qualité de Abassi Madani. En effet, dans son communiqué le département de Abdelaziz Belkhadem a rappelé au représentant de la diplomatie saoudienne que le chef du FIS dissous n'a été autorisé à quitter le territoire algérien que «pour y suivre des soins de santé». Et de préciser: «La délégation algérienne des hadjis est représentée par M.Ghoulamallah ministre des Affaires religieuses». Quant à Abassi Madani, «il n'est habilité par aucune organisation algérienne officielle ou non officielle à la représenter dans le cadre du hadj». Une clarification que l'Etat algérien tient à faire, d'autant plus que la réception de lundi dernier était tout ce qu'il y a de plus officiel. La réaction algérienne ne s'arrête pas là, puisque l'ambassadeur d'Algérie à Riadh a été instruit aux fins «d'entreprendre la même démarche auprès des autorités saoudiennes» et ce, pour avoir plus d'éclaircissements à ce sujet, souligne le communiqué. C'est la première fois que l'Algérie réagit de manière très officielle à une activité de Madani qui, rappelons-le, a déjà été reçu par le prince du Qatar. Seulement, il semble que le roi Fahd a dépassé les bornes en recevant le chef de file des islamistes radicaux algériens dans des circonstances que les autorités d'Alger interprètent comme une provocation de leur part, voire une ingérence dans les affaires internes d'un Etat indépendant. Il y a lieu de rappeler, à ce propos, que le royaume wahhabite n'est pas à son premier acte d'ingérence, puisqu'il a très officiellement affiché sa préférence pour l'ex-FIS vers la fin des années 80, en le gratifiant de ses largesses financières et d'un soutien politique ouvert. Aussi, les proportions prises par cette nouvelle affaire Abassi sont-elles de nature à empoisonner les relations algéro-saoudienne qui, pourtant n'ont jamais été aussi bonnes que ces dernières années. L'Arabie Saoudite qui est présentement confrontée à une vague de violence terroriste sans précédent et subit d'énormes pressions de la part des Etats-Unis, n'est pas moins attachée à ses ambitions politiques de faire régner l'obscurantisme aux quatre coins du monde musulman. Ce soutien renouvelé à la mouvance intégriste radicale algérienne en dit en fait long sur les véritables intentions d'un régime monarchique, dont la raison d'être est justement la propagation de l'archaïsme. Quant à Abassi Madani qui n'a pas respecté l'engagement de ne pas faire de politique, signé à sa sortie de prison, il marque là un point important en s'alliant l'une des nations les plus riches du monde. Nul doute que sa proposition de «sortie de crise» émise sur la chaîne Al-Jazira a été évoquée avec les responsables du régime saoudien. Reste à savoir maintenant quelle sera la réaction de Riyad à l'interpellation des autorités algériennes. L'avenir des relations entre les deux pays dépendra des suites que donnera l'Arabie Saoudite à cette affaire.