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Une lueur pour les Sahraouis?
LE RESPECT DES DROITS DE L'HOMME
Publié dans L'Expression le 25 - 04 - 2013

Les Etats-Unis, avec John Kerry, ont compris que ce conflit a assez duré
Le Sahara occidental fait partie de l'imaginaire maghrébin depuis une quarantaine d'années. Depuis cette fameuse marche verte,faite à la hussarde par Hassan II qui s'est découvert à cette occasion la nécessité de faire revenir dans le giron du Maroc un territoire qui était sous occupation espagnole depuis 1885. A tort ou à raison, l'interprétation des dernières décisions des grands sont, à savoir, cette dimension nouvelle attribuée à la Minurso qui est différente selon que l'on soit du côté sahraoui ou du côté marocain. Même la presse algérienne comme un seul homme s'est prise au jeu annonçant que le conflit du Sahara connaitra son épilogue enfin, par la mise en place d'un référendum.
Petit aperçu de la géographie et histoire de ce territoire
Qu'en est-il exactement de ce Sahara occidental qui reste le dernier territoire africain avec les enclaves de Ceuta et Melilla à ne pas connaitre leur autodétermination? Le Sahara occidental est un territoire de 266.000 km2 du nord-ouest de l'Afrique, bordé par l'Algérie au nord-est, le Maroc au nord, la Mauritanie à l'est et au sud, tandis que sa côte Ouest donne sur l'Atlantique. Territoire non autonome selon l'ONU, cette ancienne colonie espagnole n'a toujours pas trouvé de statut définitif sur le plan juridique, plus de trente-sept ans après le départ des Espagnols, en 1976. Les principales sources de revenu sont le pastoralisme, la pêche et l'extraction de phosphate qui représentent plus de 60% des exportations. Les réserves de phosphate du Sahara occidental qui sont concentrées autour de Bou Craa sont importantes. Ainsi, selon l'Usgs, les Espagnols auraient également découvert des dépôts de minerai de fer. Malgré la pluviosité minime, qui ne permettait pas de production agricole durable en dehors de quelques oasis où on pratiquait une agriculture de subsistance, la culture sous serre a connu un grand développement dans la région de Dakhla, l'augmentation de la production de ces cultures devrait passer à 76.000 tonnes en 2013 et à 116.000 tonnes en 2020. Le commerce et l'activité économique sont contrôlés par le Maroc. Des sociétés marocaines du secteur énergétique ont signé en 2001 des contrats d'exploration de pétrole au large de la côte, ce qui a provoqué la colère du Front Polisario. (1) Enfin le Sahara occidental contient en son sein une immense nappe d'eau.
En 1884, l'Espagne place ce territoire sous son protectorat. Dès 1965, l'ONU pousse l'Espagne à décoloniser ce territoire ainsi que Cap Juby et l'enclave d'Ifni, et dans ce but engager des consultations avec le Maroc. En 1975, un avis consultatif de la Cour internationale de justice confirme l'existence de liens historiques entre les populations du Sahara occidental et le Maroc, ainsi que l'ensemble mauritanien, mais conclut qu'ils ne sont pas de nature à empêcher un référendum d'autodétermination, en y rendant inapplicable la notion de terra nullius. Et le rapport stipule: «...En revanche, la Cour conclut que les éléments et renseignements portés à sa connaissance n'établissent l'existence d'aucun lien de souveraineté territoriale entre le territoire du Sahara occidental d'une part, le Royaume du Maroc ou l'ensemble mauritanien d'autre part. La Cour n'a donc pas constaté l'existence de liens juridiques de nature à modifier l'application de la résolution 1514 (XV) de l'Assemblée générale des Nations unies quant à la décolonisation du Sahara occidental et en particulier l'application du principe d'autodétermination grâce à l'expression libre et authentique de la volonté des populations du territoire.» (1)
Quelques jours après cet avis, Hassan II, roi du Maroc organise la Marche verte (6 novembre 1975). Le 27 février 1976, la République arabe sahraouie démocratique (Rasd) est proclamée par le Front Polisario à Bir Lehlou, au lendemain du départ du dernier soldat espagnol du territoire. Dans les années 1980, le Maroc érige un mur de défense qui sépare le territoire en deux, les 20% à l'est du mur étant désormais sous le contrôle du Front Polisario. Depuis le cessez-le-feu de 1991, le Maroc contrôle et administre environ 80% du territoire, tandis que le Front Polisario en contrôle 20% laissés par le Maroc derrière une longue ceinture de sécurité, le «mur marocain». En 2002, un avis de droit de Hans Corell, vice-secrétaire général aux questions de droit, conclut que le Maroc n'est pas la puissance administrante du territoire. Dans un rapport publié en 2006 par Kofi Annan, alors secrétaire général des Nations unies, il est indiqué qu'aucun Etat membre de l'ONU ne reconnaît la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. (1)
Il y eut de multiples revirements dans ce dossier de la part du Royaume du Maroc qui a réussi à fédérer tous les Marocains autour de la cause sacrée de «L'unité nationale» exception faite de la prise de position bien connue de Abraham Serfaty ingénieur militant marocain des droits de l'homme qui a passé de longues années en détention et récemment d'un parti qui avait milité pour l'autonomie du Sahara occidental. Après des contacts officieux, le Maroc a accepté de traiter directement et officiellement avec le Polisario en 2007 en tant qu'un des protagonistes du conflit. Le Maroc préconise une large autonomie dans le cadre de la souveraineté du Royaume alaouite pour résoudre le conflit du Sahara occidental. Pour le Polisario, le Sahara occidental est un «territoire occupé», dont le gouvernement légitime est la République arabe sahraouie démocratique (Rasd).
En avril 2007, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte une nouvelle résolution
(n° 1754) qui engage les parties à négocier «en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l'autodétermination du peuple du Sahara occidental». Ces négociations directes se déroulent depuis à Manhasset dans l'Etat de New York. Le 30 avril 2008, le Conseil de sécurité des Nations unies adopte la résolution 1813 qui renouvelle en substance le mandat de la Minurso jusqu'au 30 avril 2009. Pour l'Union africaine (ancienne Organisation de l'unité africaine), la Rasd est un Etat membre avec toutes ses prérogatives. Pourtant dans la partie libérée,
20%du territoire enclavé ente l'Algérie et le Maroc, un embryon d'Etat fonctionne, des élections sont réalisées. Nous sommes en présence d'une structure étatique qui donne l'impression de gérer un pays en «régime établi» avec des élections. Et pourtant, ce pays vit l'un des plus vieux conflits au monde exception faite du conflit centenaire palestinien.
Un conflit quadragénaire et la nouvelle donne des droits de l'homme
Pendant plus de deux décennies c'était le statu quo. Depuis quelques années, la dimension «Droits de l'homme» invoquée par l'Occident est une nouvelle arme que les Sahraouis brandissent. D'abord, avec le combat de Aminatou Haïdar «La Ghandi africaine». Les manifestations récurrentes des Sahraouis sauvagement réprimées par l'armée et la police marocaine sont du pain bénit pour la cause. Cela a commencé en 2006. Khadidja Finan nous en parle: «Inextricable, le conflit du Sahara occidental rebondit. Pour avoir participé à des manifestations contre la présence marocaine au Sahara occidental, 14 Sahraouis emprisonnés dans des conditions extrêmement pénibles ont comparu devant la justice, à El-Ayoun, le 13 décembre, et ont été lourdement condamnés. Certes, l'Organisation des Nations unies juge que le problème de ce territoire, annexé en 1975 par le Maroc, doit être réglé à travers la tenue d'un référendum d'autodétermination, mais Rabat n'en veut pas. L'évolution du dossier du Sahara n'est pas favorable au Maroc. La monarchie aura beaucoup de mal à survivre à un tel échec, et le pays en paiera un prix élevé. Depuis mai 2005, les manifestations sécessionnistes se sont succédé à El-Ayoun et à Smara, les deux grandes villes sahariennes: leur violente répression a rendu la situation explosive, notamment à la fin octobre (...) En outre, les manifestations d'El-Ayoun et de Smara montrent que, par-delà le phosphate, les richesses halieutiques et les enjeux politiques pour les régimes marocain et algérien, la gestion du conflit au Sahara occidental dépasse, par la force des choses, les cercles restreints de décideurs enfermés dans des schémas désuets.» (2)
Pour la période récente, on se souvient que des manifestations violemment réprimées ont eu lieu à Gdeim Izik. C'est dans un tribunal militaire de Rabat - ́ ́une juridiction d'exception qui n'a pas à juger des civils ́ ́, souligne TelQuel - qu'a eu lieu entre les 8 et 16 février le procès de 24 civils sahraouis. ́ ́L'affaire remonte au 8 novembre 2010, quand les forces de l'ordre marocaines sont intervenues pour démanteler le camp installé à Gdeim Izik, à 12 kilomètres de Laâyoune. Selon la version officielle, des occupants de ce camp s'en sont violemment pris aux policiers et en ont tué dix ainsi qu'un sapeur-pompier ́ ́, rappelle l'hebdomadaire marocain. Poursuivis et jugés pour meurtre, les accusés ont insisté sur le caractère pacifique du campement.Ils ont presque tous écopé de lourdes peines allant de vingt ans à la prison à vie. Leurs avocats se sont pourvus en cassation.»(3)
Les derniers développements
«Figé depuis trente ans, le conflit du Sahara occidental, lit -on dans une contribution du Figaro,connaît ces jours-ci une nouvelle montée en tension diplomatique. Les Etats-Unis ont proposé la semaine dernière d'adjoindre une composante chargée des droits de l'homme. Le vote de la résolution sur la reconduction de la Minurso doit avoir lieu au Conseil de sécurité. Le départ de Hillary Clinton, ferme soutien du Maroc, le lobbying de la Fondation Kennedy, une institution entretenant des liens de longue date avec les indépendantistes sahraouis, et l'activisme de Susan Rice, la représentante américaine à l'ONU, ont joué un rôle déterminant. Washington a peut-être aussi voulu prendre en compte la nouvelle donne sahélienne: des combattants du Polisario sont allés faire le coup de feu au Mali et pourraient bien s'être repliés en zone sahraouie. (...) Même si les Américains ont la main, les diplomates français s'activent pour trouver une «solution acceptable». À défaut, Paris, qui n'a pas usé seul de son droit de veto depuis 1976, devrait s'abstenir.» (4)
Mohamed Touati pense que la France va lâcher le Royaume: «Paris n'utilisera probablement pas son droit de veto pour contrer la proposition américaine qui consiste à confier aux Casques bleus la surveillance des droits de l'homme au Sahara occidental. C'est sans doute le branle-bas de combat à Rabat. «La proposition américaine pour l'introduction d'un instrument de contrôle des droits de l'homme au Sahara occidental dans le cadre de la Minurso, est venue après que le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon ait déclaré au Conseil de sécurité qu'il plaidait pour soutenir ce projet», a souligné la même source. (...) Le Makhzen a été épinglé par le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, le département d'Etat américain ainsi que par de nombreuses organisations internationales de défense des droits de l'homme (Centre Robert Kennedy, Human Rights Watch, Amnesty International...)... avant qu'une délégation de parlementaires européens qui devait s'informer sur l'état des droits de l'homme dans les territoires occupés par le Maroc ne soit refoulée le 6 mars 2013 de l'aéroport de Casablanca.» (5) En proposant une résolution du Conseil de sécurité sur les droits de l'homme au Sahara occidental et en relativisant le projet marocain, les USA redonnent tout son sens au dossier sahraoui. Samuel Kaplan, ambassadeur des Etats-Unis au Maroc, a précisé qu'il ne s'est jamais déplacé au Sahara occidental car, dit-il, «il est toujours classé par l'Organisation des Nations unies comme sans souveraineté». Il a affirmé que les Etats-Unis considèrent que la proposition marocaine d'autonomie «ne peut pas servir de seule base à des négociations» pour trouver une solution au conflit du Sahara occidental. «Christopher Ross n'est pas notre envoyé, il représente l'ONU.» «Les Etats-Unis continueront à soutenir M.Christopher Ross jusqu'à la fin de sa mission, afin de trouver une solution au Sahara occidental», avait-il déclaré, en juillet 2012, dans une interview au journal marocain Al Massae» (6).
Entre Rabat et Washington, les relations semblent s'envenimer. Après que le commandement militaire marocain ait donné ses instructions pour suspendre l'opération African Lion 2013, Washington passe à l'action: le commandant des Etats-Unis pour l'Afrique (Africom) a annoncé qu'il allait anticiper le «redéploiement» de ses soldats se trouvant au Maroc. Depuis quelques jours, des responsables américains critiquent ouvertement le Royaume chérifien sur sa politique dans les territoires sahraouis occupés. «Vous devez vous souvenir que nous travaillons sous le parapluie des Nations unies», souligne l'ambassadeur Samuel Kaplan dans une interview accordée, en novembre 2012, au magazine marocain Tel Quel. Le rapport de Juan Mendez, établi suite à sa visite dans le territoire en septembre 2012, parle de torture quasi systématique sur les militants sahraouis. (7)
Le Front Polisario a appelé lundi le Conseil de sécurité de l'ONU à prendre rapidement les mesures nécessaires pour 'relancer et accélérer'' le processus de négociations entre les parties au conflit tout en insistant sur l'impérativité de l'élargissement de la Minurso à la surveillance des droits de l'homme. A ce propos, il a cité notamment les précédents rapports du Haut commissariat des droits de l'homme de l'ONU, et les récentes conclusions du Rapporteur spécial pour la torture, M.Juan Mendez, ainsi que le cas du procès de Gdeim Izik où 25 civils sahraouis ont été condamnés à de lourdes peines par le tribunal militaire de Rabat, et dont le verdict a été fortement critiqué par la communauté internationale (...) Dans ce sillage, il s'est félicité de l'affirmation du Secrétaire général de l'ONU dans son nouveau rapport sur le Sahara occidental dans lequel ce dernier a insisté sur ́ ́la nécessité d'une surveillance indépendante, impartiale, globale et soutenue des droits de l'homme'' au Sahara occidental occupé. (8)
Les Etats-Unis, avec John Kerry, ont compris que ce conflit a assez duré. Au même titre que Timor, le Sahara occidental doit aspirer a son indépendance à travers un referendum sur son autodétermination ou à son rattachement au Royaume du Maroc. La légalité internationale ainsi préservée, cette région pourra vivre en paix et prospérer économiquement, socialement et politiquement. C'est cela l'Union maghrébine à laquelle aspire les peuples de la région.
1. Le Sahara-Occidental Encyclopédie Wikipédia
2.. Khadija Finan, http://www.monde-diplomatique.fr/2006/01/FINAN/13129
3.http://www.courrierinternational.com/article/2013/02/28/proces-des-sahraouis-a-la-peine
4.http://www.lefigaro.fr/international/2013/04/22/01003-20130422ARTFIG00602-tensions-a-l-onu-sur-le-sahara-occidental.php
5.. Mohamed Touati La France ́ ́isole ́ ́ le Maroc L'Expression 20 Avril 2013
6.http://www.lexpressiondz.com/internationale/172471-elle-ne-peut-pas-servir-de-seule-base-a-des-negociations.html
7.http://www.elwatan.com/international/le-plan-marocain-ne-fait-plus-le-poids-17-04-2013-210597_112.php
8. Le Front Polisario appelle le Conseil de sécurité à agir pour le 22 avril 2013 (SPS)


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