Quand il s'agit de censure au cinéma, Yamina Benguigui part immédiatement au front «Nous nous devons d'être solidaires dans ce grand partenariat francophone, même si l'Algérie n'en est pas membre, mais elle est amie et est très présente». Solidarité. Un mot décidément que la ministre déléguée auprès du ministre des Affaires étrangères et chargée de la Francophonie, Yamina Benguigui, affectionne particulièrement. Et adore le décliner sous toutes ses coutures. Ainsi, après l'affaire de L'Attentat de Zied Doueri, le sentiment de la ministre va directement vers les cinéastes des pays «sous dictature qui ne peuvent pas s'exprimer» selon ses termes, là où la liberté de créer fait donc défaut et les moyens encore plus. Et pour cause, quand il s'agit de censure au cinéma, Yamina Benguigui part au front immédiatement. Elle ne manquera pas de le rappeler, vendredi dernier, où en grande pompe et avec une heure de retard, elle a inauguré le Pavillon «Les Cinémas du Monde 2013». A ses côtés, le cinéaste Raoul Peck (ancien président du Fond Sud), parrain de la Fabrique «Les Cinémas du Monde», Xavier Darcos, président de l'Institut français, Clément Duhaime, administrateur de l'Organisation internationale de la Francophonie, Marie-Christine Saragosse et la présidente-directrice générale de RFI, France 24 et Monte Carlo, Doualiya. Cette cérémonie était l'occasion de présenter la délégation des neuf jeunes réalisateurs des pays du Sud dont l'Algérie est représentée par le réalisateur Mohamed Latrèche, présent avec son producteur Boualam Ziani. Tout ce beau monde a inauguré le pavillon et monté les marches à l'occasion du 5e anniversaire du Pavillon «Les Cinémas du Monde». «C'est un honneur et un grand plaisir pour moi d'accompagner les cinéastes retenus par la «Fabrique des cinémas du Monde», pour ce bout de chemin qui n'est finalement que la porte d'entrée vers la plus belle aventure qui soit: la fabrique de la vie», dira Raoul Peck. Après les master class du parrain et les derniers échanges d'expériences entre le réalisateur accompli et les réalisateurs en devenir, La Fabrique «Les Cinémas du Monde» est déjà au travail. C'est un programme de travail complet, conçu en étroite collaboration avec le Festival de Cannes et le Marché du film. Il est destiné à concrétiser le développement de projets de premier et deuxième longs métrages issus des pays du Sud. Depuis 5 ans, la qualité des ateliers et la richesse des rencontres professionnelles ont déjà permis à plusieurs projets de trouver des opportunités de coproduction et de distribution internationale, nous affirme-t-on. Cette année, neuf jeunes réalisateurs et leurs producteurs sont invités à bénéficier d'un accompagnement personnalisé de leur projet à travers des rendez-vous individuels avec les acteurs-clés de l'industrie cinématographique. Quatre pays sont pour la première fois représentés: l'Arménie, le Burkina Faso, Haïti et les Philippines. En 2012, 80% des projets ont conclu des accords de coproduction dans les six mois. Depuis 5 ans, plus de 75 réalisateurs et producteurs en provenance de 30 pays, dont 26 originaires des pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) ont bénéficié de La Fabrique «Les Cinémas du Monde». Quand on sait que l'Algérie souffre cruellement de manque de financement malgré l'apport du Fdatic qui reste bien maigre, cet atelier de travail n'en sera que bénéfique pour notre heureux élu algérien. Dans son allocution d'ouverture, Yamina Benguigui a affirmé être attachée à la diversité culturelle dont le pavillon et la Fabrique «Les cinémas du Monde» constituent le symbole. «Le cinéma a le pouvoir d'éveiller les consciences, de soutenir la diversité des cultures et de changer le regard sur l'autre», fera-t-elle remarquer avant de louer le cinéma «militant, nécessaire et humain» de Raoul Peck. Et d'évoquer l'objectif de la Francophonie et le rôle de la France dans le soutien de la «création cinématographique des pays du Sud». Elle rappela qu'en 2012 a été lancé le Fonds Sud dont le budget annuel a été augmenté à hauteur de six milliards d'euros. «Une chance pour le cinéma». En mettant l'accent sur les pays où ne règne pas de démocratie, elle déclarera un peu plus loin, qu' «on ne peut pas séparer ces non productions sans regarder l'état d'un pays. Là où il y a de la démocratie il faut pousser le cinéma. L'espace de Francophonie est un espace de valeurs. Nous défendons les démocraties, la culture, nous avons une langue en partage. Nous avons quelques pays où nous travaillons fortement. Nous sommes à égalité avec les pays, c'est de notre devoir d'aider ces pays-là où il y a eu une révolution comme la Tunisie, aider sans ingérence bien entendu, nous devons pousser cette industrie cinématographique parce qu'elle est vitale et essentielle pour les démocraties». Qu'en est-il de l'Algérie? Nous lui avons demandé en aparté, et la ministre de répondre: «Il est vrai que quand je parle du cinéma algérien, je parle plus du cinéma florissant des années 1970 et 1980 où l'on a vu émerger un cinéma très abouti. Des films algériens distribués à l'étranger ont gagné des Oscars. Nous ne sommes pas partis de rien. Il y a une histoire, une mémoire d'une industrie du cinéma. C'est vrai qu'entre 1980 et 2000, c'est un espace mortifié pour le cinéma où on a dû fermer toutes les salles. Mon regard sur le cinéma algérien? J'ai l'impression qu'il y a, depuis quelques années, un nouveau mouvement, quelques salles qui ont rouvert. Nous nous devons d'être solidaires dans ce grand partenariat francophone même si l'Algérie n'est pas membre de la Francophonie, mais est amie et elle est très présente.»