Vingt participants présumés à l'attaque en septembre de l'ambassade américaine à Tunis ont clamé leur innocence mardi et attendent désormais le jugement après une demie-journée de procès, alors que certains risquant en théorie la peine capitale. « L'audience est levée, l'annonce du jugement suivra », a déclaré le juge Faouzi Jebali. La décision peut dès lors être rendue dans les heures comme dans les jours à venir. En Tunisie, les jugements ne sont généralement pas prononcés en audience mais remis au greffe où les avocats des accusés peuvent les consulter. Autre particularité, l'examen des preuves et les interrogatoires de témoins n'est réalisé qu'au moment de l'instruction sauf requête de la défense ou de l'accusation ce qui n'a pas été fait mardi. Les avocats des accusés ont dénoncé dans leurs plaidoiries les accusations les plus graves retenues (articles 74, 75, 77 et 119 du code pénal) et qui traitent d'attaques préméditées orchestrées par une bande armée organisée, des crimes passibles suivant les cas de cinq ans de prison à la peine capitale. « Ces protestations (devant l'ambassade) s'inscrivaient dans une réaction spontanée dans tout le monde (musulman) contre les atteintes à nos symboles sacrés », a déclaré maître Slah Barakati. « Ces Tunisiens sont traduits devant le tribunal pour faire plaisir aux Etats-Unis et à l'Union européenne », a-t-il martelé, réclamant un non lieu. La Tunisie observe un moratoire sur les exécutions depuis le début des années 1990 et les condamnations à mort ne sont que très rarement prononcées. Interrogés un à un par le juge, chacun des prévenus, a nié avoir, suivant les cas, participé à la manifestation ou d'avoir attaqué l'ambassade et les policiers présents. Une autre avocate a dénoncé des « aveux arrachés par la police sous la pression et les menaces ». Des centaines de manifestants avaient attaqué le 14 septembre 2012 l'ambassade américaine à Tunis pour dénoncer la diffusion sur internet d'un film islamophobe produit aux Etats-Unis. Des manifestations similaires avaient eu lieu dans de nombreux pays musulmans ce jour-là. Quatre assaillants avaient été tués et des dizaines de personnes blessées lors des violences à Tunis. La représentation diplomatique et l'école américaines avaient été partiellement incendiées et saccagées. Selon le gouvernement, ces heurts avaient été organisés par Abou Iyadh, un vétéran d'Al-Qaïda en Afghanistan et le chef du principal mouvement salafiste jihadiste tunisien Ansar Asharia. Aucun des hauts responsables de cette organisation ne sont jugés dans cette affaire, alors qu'Abou Iyadh échappe à la police depuis huit mois. La Tunisie est confrontée depuis la révolution de janvier 2011 à l'essor de groupes salafistes responsables de plusieurs attaques contre la police ou encore des manifestations culturelles. Le gouvernement, dirigé par les islamistes d'Ennahda, a longtemps été accusé de laxisme vis-à-vis de ces groupes, mais depuis la découverte de groupes armés liés à Al-Qaïda près de la frontière algérienne en avril, les autorités ont durci leur position. Des heurts entre militants d'Ansar Asharia et policiers à Tunis ont fait un mort et une vingtaine de blessés le 19 mai, les forces de sécurité étant intervenues sans ménagement pour empêcher un rassemblement interdit.