Nos sources parlent de trois courants dont les propositions sont diamétralement opposées. Contrairement à 1999, la formation islamiste Ennahda a manqué au rendez-vous du scellement de «l'alliance présidentielle» appuyant le président sortant à briguer un second mandat. Selon des sources proches du parti, cette indécision est due aux réserves qu'ont émises certains dirigeants sur un soutien inconditionnel à la candidature de Abdelaziz Bouteflika. En effet, nos sources parlent de trois courants dont les propositions sont diamétralement opposées. Il y a, en premier lieu, la tendance favorable à l'alignement sur le trio RND-MSP et les «redresseurs» du FLN qui ont paraphé un pacte de soutien en faveur de l'actuel chef de l'Etat. Cette aile est représentée par les partisans de Lahbib Adami, ex-secrétaire général du parti, lequel, rappelons-le, a porté son choix lors de la précédente présidentielle sur Bouteflika au détriment de son frère ennemi Djaballah. Les défenseurs de cette voie semblent miser sur la logique «donnant -donnant» qui leur permettrait de garder un pied dans le gouvernement. Ultime recours pour ne pas s'effacer sur l'échiquier politique. A l'opposé, des voix se sont élevées contre ce choix qui a déjà «mené le parti vers le déclin». Elles veulent, toujours selon nos sources, «pousser» Djabellah dans son ambition d'atteindre El-Mouradia. En dépit du froid qui caractérise les relations entre Ennahda et El-Islah, il n'en demeure pas moins que des affinités idéologiques les rassemblent. Et c'est cet argumentaire, précisément, qui motive la direction prise par ce deuxième courant. Cependant, du côté d'El-Islah cette option est prise avec des pincettes. «Ce revirement soudain à cautionner la démarche d'un leader politique après l'avoir voué aux gémonies, véhicule des arrière-pensées politiciennes», nous a révélé un proche de Djaballah. La même personne, préférant garder l'anonymat, soupçonne la tendance favorable au MRN de «vouloir récupérer nos militants en donnant l'impression de nous faire la courte échelle».C'est dire qu'une bonne partie de Ennahda a pris conscience de la nécessité d'en finir avec l'entrisme qui lui a coûté un désaveu populaire patent. Le troisième courant, comme indiqué par nos sources, insiste sur «la primauté du libre choix». Par contre, même s'il se refuse à tout acte d'allégeance, il n'encourage pas, non plus, l'option du boycott. De ce fait, ce courant s'est interposé en tant qu'intermédiaire entre les deux autres blocs. Un simple retour rétrospectif démontrera que ces divergences affichent des similitudes avec celles vécues en 1999. A cette époque la guerre de clocher a dégénéré donnant lieu à l'effondrement du parti en deux blocs antagonistes, Ennahda, version Adami et El-Islah de Djaballah. Le premier a adhéré à la coalition de Bouteflika tandis que le second a compté sur ses potentialités intrinsèques. Ce dernier l'a presque dépouillé de sa base militante. Et depuis, Ennahda a entamé une décrue terrible. Le parti n'a remporté qu'un seul siège aux dernières législatives, chancelé aux communales, connu trois secrétaires généraux en deux ans seulement et s'est éclipsé sur le terrain de l'action. Ces remous qui refont leur apparition dans un moment crucial, risquent d'aggraver la dégringolade d'il y a cinq ans.