Aujourd'hui pour la troisième journée consécutive, les vendeurs de matériel TV, les marchands de paraboles et de démodulateurs numériques ne savent plus où donner de la tête. Et pour cause, cela fait trois jours que les chaînes des bouquets TPS, Canal-Sat et AB-Sat ont disparu du ciel béni du paysage audiovisuel de l'Algérien moyen. Les chaînes ayant changé de code, les téléspectateurs se sont rués pour recharger leurs cartes: c'est la cohue. Déjà, ils se voyaient revenir aux années 80, rechercher des antennes UHF et guetter le moindre cumulus pour capter les émissions de là-bas. Pire qu'un cauchemar, ils se revoyaient renvoyés aux années 70 où ils avaient le choix entre regarder l'Unique et lire un bouquin ou... faire autre chose. Il y a de quoi ! Tiens! Pas plus tard que mercredi, j'ai vu sur la chaîne «Planète» un portrait captivant : il s'agit de celui d'Edgar J. Hoover, patron de la toute puissante machine qu'était le FBI. Ce n'est pas le genre de portrait qu'a l'habitude de faire notre Unique: elle, elle est plutôt spécialisée dans les portraits robots, exécutés à grands coups de crayon avec plus de zones d'ombre que de scènes éclairées. Des portraits où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, tout le monde est patriote, bien pensant, volontaire, sain d'esprit mais quelquefois malade, car le portrait qu'on lui consacre arrive comme un chrysanthème, en bout de course... Le film sur le flic n°1 des USA aurait pu s'intituler «l'Ennemi public n°1». Le portrait est impitoyable. Il est présenté comme un homme de petite taille portant des talons compensés. Il a une tête de boxeur à la James Cagney. Il a débuté comme employé à la justice, a brillé dans l'expulsion des étrangers sans papiers durant les années 20. Au FBI, il a traqué les bootleggers puis a collaboré avec les maccarthistes. C'est durant cette période que la mafia connaîtra un essor particulier. Il y préférait dit-on «un gangster qui veut s'enrichir qu'un communiste qui défend les pauvres». Il était un pur produit de l'église calviniste : un Wasp. De nombreux témoignages ont été apportés par ses contemporains ou ses collaborateurs sur son efficacité, son opportunisme et son sens du travail. Il fit des dossiers (sexuels) compromettants sur toutes les personnalités : de Martin Luther King jusqu'à JFK. C'est le secret de sa durée. Mais lui aussi avait son côté pervers: c'était un déviant qui organisait des parties où il s'habillait en femme. Voilà un portrait réussi, sans indulgence, sans non-dits, ni retenue, un portrait comme on aimerait voir réaliser sur les idoles de chez nous.