Erdogan hausse le ton et parle de «pillards» et de «fauteurs de troubles» Pendant plus d'une heure, M.Erdogan a dénoncé une nouvelle fois les «pillards» et les «anarchistes» qui ont occupé la rue, les «médias internationaux» coupables de «désinformation». Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a célébré hier sa victoire sur les manifestants qui ont défié son autorité pendant plus de deux semaines et commencé à régler ses comptes en lançant un vaste coup de filet contre les fauteurs de troubles. Au lendemain de l'échec de la mobilisation de deux grands syndicats venus soutenir la fronde, le chef du gouvernement a profité de son discours hebdomadaire devant les députés de son Parti de la justice et de la démocratie (AKP) pour tourner la page de la contestation sans précédent qui a agité son pays. «Notre démocratie a de nouveau subi un test et en est sortie victorieuse», a-t-il lancé sous un tonnerre d'applaudissements, «le peuple et le gouvernement de l'AKP ont déjoué ce complot tramé par des traîtres et leurs complices à l'étranger». Pendant plus d'une heure,M.Erdogan a dénoncé une nouvelle fois les «pillards» et les «anarchistes» qui ont occupé la rue, les «médias internationaux» coupables de «désinformation» et les critiques qui ont mis en cause son intransigeance pendant la crise et la brutalité de la répression policière. «Je remercie encore et encore la police pour sa patience et son bon sens», a-t-il lancé, justifiant son recours massif aux gaz lacrymogènes. «En fait, notre police a adopté une attitude démocratique contre la violence systématique et a passé avec succès le test de la démocratie», a insisté M.Erdogan. Après l'avoir accusée de manipuler la contestation, le Premier ministre a reproché à son opposition son absence. «C'est parce que l'opposition n'a pas fait son devoir que des gens ont voulu manifester», a-t-il estimé. Sûr de sa force, M.Erdogan a mis en garde contre toute velléité de manifestation, après l'évacuation samedi des occupants du parc Gezi et de la place Taksim à Istanbul. «A partir de maintenant, il ne sera pas question de montrer la moindre tolérance envers des gens ou des organisations qui s'engagent dans des actions violentes», a-t-il menacé. Si la nuit de lundi à mardi a été plutôt calme à Istanbul, la police a utilisé des canons à eau et des grenades lacrymogènes pour déloger des manifestants qui avaient installé des barricades à Ankara, ceux-ci répliquant par des jets de pierre. Hier matin, la police a procédé à des dizaines d'interpellations dans les milieux d'extrême gauche soupçonnés d'être liés aux manifestants. A Istanbul, quelque 90 membres du Parti socialiste des opprimés (ESP), une petite formation active dans les manifestations, ont été arrêtés, selon le barreau d'Istanbul. Les médias turcs ont rapporté l'interpellation de 30 personnes à Ankara, 13 à Eskisehir (nord-ouest) et des descentes de police dans 18 autres provinces. Le ministre de l'Intérieur Muammer Güler a lui évoqué 62 arrestations à Istanbul et 23 à Ankara, dans le cadre d'une opération préparée de longue date contre «l'organisation terroriste Mlkp (Parti communiste marxiste-léniniste), qui a également participé aux manifestations du parc Gezi». Les forces de l'ordre avaient déjà arrêté près de 600 personnes dimanche à Istanbul et Ankara, selon les barreaux de ces deux villes. Selon le quotidien Hürriyet Daily News, le ministère de la Justice a par ailleurs commencé à travailler sur un projet de réglementation de la criminalité sur Internet pour restreindre le rôle des médias sociaux dans la propagation des appels à manifester. Au début de la fronde,M.Erdogan avait qualifié de «fauteur de trouble» le réseau Twitter, le moyen de communication favori des manifestants.