Le président utilise la carte des disparus comme moyen de pression sur l'armée. Un rapport sur le dossier des disparus en Algérie sera présenté au mois de mars devant la Commission des droits de l'homme de l'ONU. Le document élaboré par la Ligue algérienne des droits de l'homme (Ladh) insiste sur la responsabilité du président de la République. «Il est vrai que Bouteflika n'était pas au pouvoir, mais il ne peut plus continuer d' ignorer cette question qui endeuille le peuple algérien» nous a déclaré le président de Ladh M. Ali Yahia Abdenour. De son avis le président utilise la carte des disparus comme moyen de pression sur l'armée. Or, et à l'occasion de ce rapport, il sera pris à son propre piège, puisque de son côté, il sera désigné du doigt face à l'opinion internationale. «Un président ne peut se permettre le luxe d'écarter de son champ le passif. La situation ne le permet pas.» Abordant le mécanisme ad hoc installé par le premier magistrat du pays, Me Ali Yahia Abdenour doute de sa capacité de régler seul cette épineuse question. «Ce mécanisme a des prérogatives très réduites», estime-t-il. D'autant plus qu'il ne peut mener des investigations. «S'ils sont morts qu'on le dise au peuple et à leurs familles», insiste-t-il. Pour l'invité de notre rubrique, A coeur ouvert, le mécanisme ad hoc sert de couverture à un président qui voudrait donner l'impression de s'engager dans le règlement de ce dossier. Or, la vérité est ailleurs. Elle est détenue principalement par les corps de sécurité engagés dans la lutte antiterroriste. De son côté, la Ladh a recensé jusqu'aujourd'hui près de 7200 dossiers individualisés. Dans un dernier rapport élaboré en collaboration de Reporters sans frontière. Il y a été inclus les disparus des évènements de la Kabylie. La ligue pourrait-elle se joindre à la commission de Ksentini pour lever le voile sur ce dossier? Paradoxalement notre invité répond par l'affirmative, lui qui a de tout temps exclu cette thèse arborant le fait que l'indépendance de la Laddh par rapport aux institutions de l'Etat et aux partis politiques est le gage de sa liberté. «Nous estimons que les droits de l'Homme sont toujours en dehors de l'Etat, une vision que M.Ksentini ne partage pas avec nous», a-t-il déclaré récemment dans une de ses conférences de presse.