Dans une Algérie riche, il y a beaucoup de pauvres, et dans une Algérie riche, certains prennent ce qu'ils veulent et ne se font pas attraper L'une des missions du ministère du Commerce n'est-elle pas de veiller à ce que le marché soit approvisionné correctement? Pourquoi ne faire cela que la veille de Ramadhan ou pendant le Ramadhan? Il semble que des directives aient été données pour tenter d'améliorer le quotidien des citoyens. Aussi, pour nous rassurer quant à notre ventre, des ministres nous apprennent que, pour ce mois de Ramadhan, il y aura «de la bouffe à gogo». Pour nous tranquilliser quant à l'emploi, certains affirment que l'on va refaire le tissu industriel que l'on détruit pendant trente ans, sourire à la bouche et joie au coeur, et que l'on va même reprendre ceux qu'on avait mis sur les trottoirs pour les beaux yeux d'un capital privé pas toujours correct. Pour que nous ne paniquions pas, d'autres vont même jusqu'à nous dire qu'après tout, il n'est pas nécessaire d'avoir un président en excellente santé et, pour envelopper le tout dans un burnous bien heureux, d'autres voix s'élèvent pour dire qu'il faut laisser les commerces ouverts de nuit et essayer de faire semblant qu'il fait bon vivre. Tout cela est beau, mais où est l'essentiel? Ramadhan, on connaît pourtant! Le peuple a appris à vivre avec les mensonges. Ce n'est pas une ou deux farces de plus qui vont y changer quelque chose. Ailleurs, lorsqu'on échoue, on part. Ici, lorsqu'on ne réussit pas, on est maintenu en poste pour la vie. Et même au-delà. La réussite, au fil du temps, a pris une autre signification car ne réussissent que ceux qui savent tourner avec le vent, même plusieurs fois par jour s'il le faut. Et plus ils changent de cap, plus ils ressemblent à des girouettes, et plus ils sont appréciés. Ramadhan ne vient pas pour la première fois frapper à nos portes. Nous le connaissons depuis quinze siècles. Est-ce compréhensible que seulement, à chaque Ramadhan, on se réveille pour s'inquiéter de ce qui va s'y passer comme spéculation et comme flambée de prix? C'est pourtant quelque chose qui pourrait - et devrait - se faire chaque jour que Dieu fait car si d'aucuns qui vivent dans le luxe indu et l'opulence volée ne le savent pas, il y a encore des Algériens qui souffrent la misère en 2013 et que la cherté de la vie tue tout simplement!!! L'une des missions du ministère du Commerce n'est-elle pas de veiller à ce que le marché soit approvisionné correctement pour empêcher les spéculateurs de jouer sur le manque et d'augmenter sensiblement leurs prix? Pourquoi ne faire cela que la veille de Ramadhan ou pendant le Ramadhan? De toute façon, c'est ce qu'on nous dit, chaque fois, et c'est ce qui s'avère non vrai, chaque fois, car les prix s'envolent et les commerçants de mauvaise foi ne manquent pas sur un marché que plus personne ne contrôle. Certes, les prix sont libres à la concurrence, mais à ce que nous sachions, on n'est pas le seul pays où ils le sont. Alors pourquoi ailleurs, cela ne se passe pas comme ici? Quant au tissu industriel, tout le monde sait ce que nous avions au lendemain de la mort de Boumediene. Après tout avoir détruit, on vient nous dire qu'il faut retourner vers le tissu industriel et, bien sûr, on oublie de nous préciser qu'il s'agit de construire des entreprises publiques. Qu'on nous dise d'abord pourquoi celles existantes ont été bradées contre le gré du peuple! Il est parfois difficile de comprendre certaines choses, mais lorsqu'on constate un minimum de bonne volonté ou de bonne intention, on peut toujours faire l'effort de comprendre et de fermer l'oeil. Mais il est des situations où rien ne passe comme, par exemple, vouloir faire croire qu'il est tout à fait normal que ceux qui avaient applaudi la construction des entreprises du temps de Boumediene soient ceux-là mêmes qui en applaudissent la destruction du temps de Chadli et qu'ils reviennent aujourd'hui pour applaudir l'idée de construire des usines pour résorber le chômage!! Ah, les girouettes... Cinquante ans de mensonge, de farces et de promesses insensées ne peuvent pas donner beaucoup de résultats. La preuve: dans une Algérie riche, il y a beaucoup de pauvres. Dans une Algérie riche, il y a beaucoup de chômeurs et dans une Algérie riche, certains prennent ce qu'ils veulent et ne se font pas attraper à l'image d'un Khalifa pour la banque duquel orientation avait été donnée aux entreprises de transférer leur argent ou d'un Khelil qui a été longtemps protégé par le silence complice. Il est des gens qui continuent à parler comme en 1962. Le même discours, les mêmes intonations, les mêmes mots. Ils parlent de l'ennemi interne et externe, de la force du rassemblement, de l'unité, du courage de l'Algérien, du complot contre le pays et qui terminent en hurlant, poing levé, qu'ils n'ont pas peur de militer parce qu'ils sont les militants de la cause noble. C'est beau, c'est bien beau tout cela! Mais ce discours est, d'abord, dépassé. Ensuite, c'est ce discours qui nous a laissés à la traîne derrière les nations du monde et, enfin, c'est un discours qui n'a rien donné au peuple que des promesses vaines, savamment entretenues et des désillusions adroitement tissées. La cause noble c'est le peuple et, surtout, ces faibles gens qui peinent à parvenir à la fin de leur journée. La cause noble n'a jamais été de défendre le pouvoir car, pour qui sait, lorsqu'on se dit du côté du travailleur, on doit forcément défendre les faibles contre les dérives du pouvoir, ses oublis, ses inattentions et, parfois, ses excès parce qu'être du côté du travailleur ne signifie pas être contre le pouvoir, tout comme être du côté du pouvoir ne signifie pas qu'on est automatiquement du côté des travailleurs ou des plus faibles. C'est l'amalgame que certains ont, malheureusement, entretenu depuis longtemps, depuis trop longtemps même! Au moment où les autres pays, qui se sont mis au travail pour se développer, portent le regard vers les horizons lointains afin de préparer les meilleures conditions pour les générations à venir, chez nous, on fixe le présent et on s'accroche au passé pour raconter des bobards et dire n'importe quoi. Absolument n'importe quoi. La différence entre ceux qui se sont développés tout en étant beaucoup moins riches et nous c'est que, pour paraphraser Malek Bennabi, et alors que ces gens-là utilisent tout leur temps pour trouver ce qu'il y a lieu de faire pour résoudre leurs problèmes, nos responsables et nos politiques utilisent leur temps à chercher ce qu'il y a lieu de... dire pour faire semblant, pour tromper et, surtout, pour endormir le peuple jusqu'à nouvel ordre. L'une des causes, c'est qu'ailleurs, ce sont les compétents qui parlent, qui décident et qui gèrent, chez nous ce sont les laudateurs qui le font. Et c'est normal qu'il y ait tant de différence! Le bonheur des peuples n'est pas dans les veillées On peut, si on le souhaite, ordonner d'ouvrir - par la force s'il le faut - les commerces de nuit et même 24h/24 du 1er janvier au 31 décembre de l'année. Ceci ne rendra pas les citoyens plus heureux ni plus souriants. Ceux qui traînent un rictus depuis le temps qu'ils cherchent un emploi qu'ils ne trouvent pas, ceux qui sont à fleur de peau depuis qu'ils courent après un logement et qu'ils n'obtiennent pas et ceux qui souffrent du fait de ne pas avoir de quoi nourrir leurs enfants ne deviendront pas heureux simplement parce que le café du coin est ouvert toute la nuit. Ils ne sentiront pas la vie s'améliorer à cause du marchand de glace qui ferme à deux heures du matin au lieu de neuf heures le soir et ils ne se sentiront pas plus heureux du fait que, sur la plage, il y ait plus de bruit que d'habitue après minuit. Ces gens-là demandent à manger, à travailler, à être respectés dans leurs droits les plus basiques comme être logés et avoir une ressource. Surtout que le pays ne manque pas de moyens. Encore une fois, nous excellons dans l'art de mal résoudre les problèmes. Et, comme Marie- Antoinette, à ceux qui n'ont pas trouvé de pain à manger, nous proposons de manger des gâteaux, car n'est-ce pas que pour veiller, les jeunes ont besoin d'argent? Et que pour avoir de l'argent, ils ont besoin d'avoir, d'abord, un boulot, un chez- soi....etc... Ce que les gens veulent, c'est d'avoir la possibilité de passer «une journée honnête de travail», le reste, tout le reste, viendra tout seul, car on n'a pas besoin de décréter les veillées, tout comme on ne peut pas décréter le bonheur des peuples. Ce n'est pas en dormant tard que nous serons plus développés et ce n'est pas le fait de dormir tôt qui explique notre mal-vie et notre sous-développement.Cherchons donc l'erreur!