«On est spolié de nos droits malgré les promesses plusieurs fois répétées». Il était 16h 30, le cortège officiel se dirigeait vers Témacine pour une courte halte à la zaouïa Tidjania. Tout semble calme. Subitement une ruée vers le cortège officiel, appuyée par des jets de pierres et des cris à «mort» ont surpris tout le monde. Le cortège du candidat-président accélère. La presse est prise à partie. Il a fallu quitter le bitume pour les vastes étendues de sable. Les voitures neuves réquisitionnées pour l'occasion ont subi des dommages. La course poursuite durera plus d'une demi-heure. Un cauchemar des plus noirs a été vécu. Le retour au centre-ville a été des plus normaux. Une demi-heure après, une fumée noire apparaît à l'autre bout de la ville. Des jeunes et moins jeunes, formant des troupes, s'acharnent sur les poteaux dressés à l'occasion. On piétine le drapeau. On déchire le portrait du président. La salle omnisports prend feu. On n'entend que les crissements de pneus et les sirènes des sapeurs-pompiers. La lumière des gyrophares illuminent le ciel noir. Toute cette masse humaine est guidée par un seul sentiment, celui «de participer à la casse» et «porter atteinte à tout ce qui est relatif au président-candidat». Pour la presse, ils étaient confinés à l'hôtel «Transatlantique». L'interdiction de sortir, d'ouvrir même la fenêtre leur est faite. Brusquement, rien ne fonctionnait, ni le téléphone, ni le fax pour joindre l'extérieur. L'électricité a été coupée. Un noir total envahit Touggourt. On ne distingue que des ombres furtives, fuyant l'émeute. Les jeunes assiègent tout ce qui est édifice public. Un sentiment de peur envahit la ville. Pour sa part, Touggourt, encadrée dès l'annonce des incidents survenus au chef-lieu de wilaya, s'est réveillée sous l'air d'une «révolte» populaire. Mais, une atmosphère «électrique » donne déjà les prémices d'une agitation. «Nos droits avant tout. Les ressources locales aux miséreux de Ouargla et de Touggourt» sont les mots d'ordre prononcés avec insistance. La visite du président-candidat a réveillé les vieux démons et la frustration s'est transformée en énergie dévastatrice. Il aurait fallu attendre deux heures du matin pour percevoir une certaine accalmie. Les dégâts enregistrés sont énormes. Le parc Sonatrach (voitures) a été le plus endommagé. Les émeutiers n'ont guère touché aux propriétés privées. Hier matin, Touggourt pansait ses blessures. Malgré les assurances du ministre de l'Intérieur, une déchirure profonde s'est faite entre cette population spoliée de ses droits et le pouvoir central. Cette «gifle» reçue par le président-candidat constitue un avertissement et risque de faire des émules. Demain: Biskra, Sétif, Annaba...seront-elles, elles aussi, revanchardes. Le président-candidat Bouteflika perdra-t-il cette «aura» acquise à coups de milliards distribués?