Edward Snowden, l'ex-consultant de la NSA qui fit savoir l'espionnage du monde par les Etats-Unis Les gouvernements européens sont dans tous leurs états qui n'en reviennent pas d'apprendre qu'ils étaient espionnés par leur partenaire américain Le programme mis en place par les Etats Unis pour espionner leurs partenaires de l'UE a causé une «rupture de confiance» et pourrait déclencher une «crise politique sérieuse», ont averti hier les Européens, prêts à sanctionner un comportement jugé inacceptable. «S'il est vrai que les Américains ont espionné leurs alliés, il y a aura des dégâts politiques. Cela dépasse de loin les besoins de sécurité nationale. C'est une rupture de confiance et on est parti pour quelque chose de très sérieux», a confié un responsable européen. Pour le président français, François Hollande, «les éléments sont déjà suffisamment réunis», et il a demandé aux Etats-Unis que «cela cesse immédiatement». Le gouvernement allemand est plus circonspect, faute de preuves, mais tout aussi contrarié. «L'espionnage d'amis est inacceptable», a averti Steffen Siebert, porte-parole de la chancelière Angela Merkel. «La confiance doit être rétablie», a-t-il ajouté. Même si la main était laissée hier à la diplomatie, les Européens ne sont pas inactifs et cherchent des preuves aux pratiques révélées par l'ancien consultant de la NSA Edward Snowden. La représentante de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a demandé hier au secrétaire d'Etat américain John Kerry de «clarifier au plus vite» la situation, au cours d'une brève rencontre en marge d'une réunion à Brunei. Ce dernier lui a promis de «chercher à découvrir exactement de quoi il s'agit», mais, a-t-il poursuivi, «chaque pays (...) exerce de nombreuses activités afin de protéger sa sécurité nationale». «Ce n'est pas inhabituel pour un grand nombre de pays», a-t-il ajouté. La ligne de défense n'a pas surpris à Bruxelles. «Les Américains vont nous répondre +vous le faites aussi+ et nous rappeler le comportement des Britanniques lors d'un G20 en 2009», a confié un responsable européen. Le «concours européen du plus indigné par l'espionnage américain est un peu pathétique. Comme si tous ces responsables vivaient chez les Bisounours», a ironisé sur twitter l'eurodéputé conservateur français Arnaud Danjean, un ancien de la DGSE, les services de renseignements extérieurs français. Mais les dirigeants européens n'entendent pas faire profil bas. Si les faits d'espionnage sont avérés, le gouvernement allemand réclame «une réaction européenne claire et à l'unanimité», a indiqué M.Siebert, précisant que des discussions étaient en cours avec le gouvernement français. La commissaire européenne chargée de la Justice, Viviane Reding, est plus précise. «On ne peut pas négocier sur un grand marché transatlantique s'il y a le moindre doute que nos partenaires ciblent des écoutes vers les bureaux des négociateurs européens», a-t-elle mis en garde. Les groupes politiques du Parlement européen sont également très remontés et certains, comme les Verts, veulent le gel de l'ouverture des négociations de libre-échange et le blocage de l'accès au données bancaires du système Swift pour inciter le gouvernement américain à répondre rapidement. La bonne volonté du gouvernement américain est en effet mise en doute. Mme Reding a demandé à deux reprises au ministre américain de la Justice, Eric Holder, de tenir son engagement de fournir toutes les indications sur le programme de surveillance Prism. Ses demandes sont pour l'heure restées sans réponses, a confirmé hier sa porte-parole. Un groupe de travail mis en place entre l'UE et les Etats-Unis pour «échanger des informations sur les volumes de données collectées par Prism et les garanties pouvant être apportées par les Etats-Unis pour les citoyens de l'UE» doit se réunir fin juillet. «On verra ce qu'on obtiendra», a commenté un représentant de l'UE. Mais le programme d'espionnage électronique des ambassades et des délégations de l'UE et de ses Etats membres dépasse Prism et la protection des données. «Je crois que les Américains ont très bien compris que c'était très sérieux», a assuré le responsable européen. Une réponse convaincante est exigée avant lundi prochain, jour de l'ouverture officielle des négociations pour un accord de libre échange entre l'UE et les Etats-Unis.