Le nouveau pouvoir en Egypte, représenté par le général Al Sissi, ne tolère pas la liberté d'expression et toute idée de coup d'Etat militaire. Avant même la mise à l'écart de Morsi, les militaires ont coupé le signal de la caméra d'Al Jazeera qui avait les yeux rivés sur la place Rabea Al Adhaouya, lieu de rassemblement pour les pro-Morsi afin d'éviter de montrer la répression en cas de colère des manifestants islamistes. Quelques heures après, Al Jazeera Mobasher Misr, qui retransmettait les images de la place Tahrir en direct, a vu la perquisition par les forces de sécurité égyptiennes qui ont fait irruption violemment dans les studios. Les militaires reprochent à la télévision qatarie la diffusion d'un enregistrement vidéo dans lequel M.Morsi se disait «le président élu d'Egypte». Des employés de la filiale égyptienne de la chaîne qatarie ont été arrêtés et malmenés à la sortie des studios. Une attitude qui a provoqué la colère des responsables de la télévision qatarie qui s'est vite dépêchée de diffuser dans un bandeau portant la mention «Adjel» (urgent) au bas de l'écran: «Les forces de sécurité perquisitionnent les locaux d'Al Jazeera Mobasher et détiennent ses employés». Les salariés égyptiens de la télévision qatarie ont ensuite été libérés. Mais l'attitude des services de sécurité égyptiens ne s'est pas arrêtée là, puisque quelques minutes après la perquisition dans les locaux d'Al Jazeera, ils ont interrompu la diffusion de Misr'25, une chaîne de télévision appartenant aux Frères musulmans qui soutient le président déchu Mohamed Morsi. Les images de l'entrée en force des militaires ont été diffusées par une télévision privée libérale Draam TV, montrant le présentateur tentant de calmer les services de sécurité qui investissaient les studios. Le mot d'ordre est clair et manumilitari: suspendre toutes les chaînes de télévisions proches des islamistes. Aucune de leurs chaînes télévisées ne doit plus fonctionner. Les principales ONG des droits de l'homme en Egypte ont dénoncé hier la fermeture de plusieurs médias tenus par les islamistes. Dans un communiqué commun, sept ONG condamnent l'interruption de la diffusion de Misr 25, la chaîne des Frères musulmans, le mouvement dont est issu M.Morsi et la saisie d'une édition de leur journal Horeyya wal Adala, alors qu'une vaste campagne d'arrestations a été lancée contre le mouvement. Les télévisions El Rahma, El-Nas, Khaligeyya (salafiste) ont également été coupées, indiquent les ONG, dont l'initiative égyptienne pour les droits de la personne. Notant que ces opérations avaient été menées après «des incitations à la violence», elles soulignent que «demander des comptes à ceux qui incitent (à la violence) est une obligation, mais fermer des chaînes est une punition collective qui viole la liberté de la presse et l'un de ses fondements, la diversité du contenu médiatique». Les ONG «condamnent également la détention de personnel de ces chaînes dans des lieux inconnus», ce qui met en doute selon elles «la légalité des procédures». Critiquant le «manque de transparence» de la part des autorités, elles rappellent que «la situation politique ne doit pas être utilisée pour justifier la limitation des libertés et des droits fondamentaux». La fermeture de Misr 25, est tout un symbole. Créée au lendemain, de la Révolution arabe, le 25 janvier, cette télévision a été fermée par ces militaires qu'elle avait tant glorifiés d'avoir sauvé l'Egypte du pharaon Hosni Moubarak. [email protected]