Le ministre de l'Intérieur a juré publiquement de «faire payer le directeur du Matin» pour avoir révélé l'affaire Sadaoui et étalé son passé de ministre tortionnaire. Pour continuer à paraître, le quotidien le Matin doit verser la somme de 39 millions de dinars. Le directeur du journal, Mohammed Benchicou, a été destinataire lundi dernier, d'une mise en demeure de l'administration fiscale, le sommant de régler cette somme avant samedi 6 mars. «Passée cette date, le journal sera condamné à l'arrêt» a indiqué un communiqué du journal dont nous avons reçu une copie hier. «L'administration fiscale a averti qu'elle passera à l'action et procédera à la fermeture des locaux professionnels ainsi qu'à la saisie des biens mobiliers et au dépôt de plainte», a précisé le communiqué. Cette mise en demeure est adressée à M.Benchicou en tant que gérant du Matin mais qui est aussi un actionnaire dans cette entreprise. «L'administration fiscale a décidé d'attaquer le journal par un autre flanc: ce n'est plus seulement l'entreprise mais son directeur, Mohamed Benchicou, qui se voit sommé par une mise en demeure (...) «a écrit le communiqué du Matin qui ne laisse aucun doute quant aux visées réelles de cette action. «Il est bien entendu difficile de ne pas faire le lien entre cette décision arbitraire et les récentes initiatives éditoriales du journal, parmi lesquelles la publication du livre «Bouteflika une imposture algérienne» qui n'a pas eu l'heur de plaire au clan présidentiel». Pour le collectif du journal ainsi que pour son directeur «le président Bouteflika veut en finir avec le Matin avant le lancement de la campagne électorale». Le communiqué note: «Nous sommes en présence d'une riposte revancharde de l'équipe de Bouteflika qui ne répugne pas à utiliser l'administration fiscale pour accomplir la basse besogne. Pour ce faire, le clan présidentiel ne s'embarrasse pas de scrupules; il piétine toute la réglementation.» L'affaire du journal le Matin avec l'administration fiscale remonte au 15 octobre 2003, date du premier redressement fiscal sur les exercices 1998 à 2001 estimé à 92.263 408,00 DA. Contestant la somme, le journal a introduit un recours et procédé au règlement de 50% du montant en attendant l'établissement d'un calendrier de paiement. Le sursis obtenu, l'administration a procédé entre-temps au blocage de l'ensemble des comptes du journal tout en ajoutant des pénalités de retard d'un montant de 16.000.000,00 DA. En outre, les biens immobiliers du journal ont fait l'objet d'une mesure de saisie conservatoire transformée en saisie exécutoire. Depuis le 27 août à ce jour, Le Matin a déboursé 21 milliards de centimes aux imprimeries d'Etat et au fisc pour paraître. Benchicou a fait son oeuvre et Zerhouni est en passe de commettre la sienne. Le ministre de l'Intérieur a juré publiquement de «faire payer le directeur du Matin» pour avoir révélé l'affaire Sadaoui et étalé son passé de ministre tortionnaire.