Les partisans du président égyptien islamiste Mohamed Morsi destitué par l'armée continuaient samedi de défier militaires et policiers, après avoir non seulement refusé la veille de quitter deux places du Caire occupées depuis un mois mais appelé aussi les manifestants à marcher sur des QG des forces de l'ordre. Dans un message audio posté samedi sur des forums jihadistes, le chef d'Al-Qaïda a de son côté accusé les Etats-Unis d'avoir « comploté » avec l'armée égyptienne et la minorité chrétienne copte pour faire destituer Mohamed Morsi. La police a tiré vendredi des gaz lacrymogènes et chargé devant un complexe abritant des médias égyptiens, que les islamistes accusent de complaisance à l'égard du pouvoir mis en place par l'armée, alors que des émissaires occidentaux tentent d'ultimes médiations pour éviter un bain de sang. Le vice-président par intérim et prix Nobel de la Paix Mohamed ElBaradei a estimé qu'il ne pourrait pas contenir longtemps les faucons du gouvernement et de l'armée qui, fort d'un soutien croissant de la population, prônent la manière forte contre les manifestants islamistes. « Des gens sont vraiment furieux contre moi parce que je dis: prenons notre temps, parlons avec eux. L'humeur, maintenant, c'est plutôt +écrasons-les », a-t-il assuré dans un entretien avec le Washington Post, ajoutant: « Je tiens le fort, mais je ne tiendrai pas longtemps ». Les manifestants réclament le retour de M. Morsi, premier président égyptien démocratiquement élu, en 2012, destitué et arrêté par les militaires le 3 juillet. Jeudi, une déclaration du secrétaire d'Etat américain John Kerry, avait alimenté la tension et provoqué la colère des Frères musulmans, dont M. Morsi est issu. M. Kerry a en effet estimé que les militaires avaient en fait « rétabli la démocratie » en déposant M. Morsi à la demande de « millions et de millions » de manifestants. Des manifestations populaires massives réclamaient le départ de M. Morsi, reprochant aux Frères musulmans d'accaparer tous les pouvoirs et de ruiner une économie déjà exsangue. « Les croisés, les laïcs et l'armée américanisée (d' Egypte) se sont entendus (...), grâce à l'argent des pays du Golfe et un complot des Américains, pour renverser le gouvernement de Mohamed Morsi », a affirmé Ayman al-Zawahiri. En évoquant les « croisés », cet Egyptien qui a succédé à Oussama ben Laden vise spécifiquement les chrétiens de la communauté copte qui compose 6 à 10% de la population égyptienne. Il y a un mois, le commandant en chef de l'armée, ministre de la Défense et nouvel homme fort du pays, le général Abdel Fattah al-Sissi, a annoncé la destitution de M. Morsi, premier président démocratiquement élu du pays détenu au secret depuis, et mis en place un président et un gouvernement intérimaires chargés d'organiser des élections d'ici la fin de l'année.