Libéré jeudi, Moubarak a été directement transféré à l'hôpital militaire de Maadi au Caire L'ex-raïs égyptien Hosni Moubarak, renversé par une révolte populaire début 2011, a quitté jeudi sa prison et est désormais assigné à résidence dans un hôpital militaire du Caire, avant la reprise demain de son procès. Mercredi soir, l'armée qui dirige de facto le pays depuis qu'elle a destitué le 3 juillet son successeur, l'islamiste Mohamed Morsi, avait coupé court aux spéculations après l'annonce de la remise en liberté de M.Moubarak dans la dernière affaire qui le retenait en détention. Elle avait prévenu que le raïs déchu, âgé de 85 ans et à la santé vacillante, serait «assigné à résidence» dès sa sortie de la prison de Tora du Caire. Jeudi après-midi, il a été transporté par un hélicoptère médicalisé à l'hôpital militaire de Maadi, dans la capitale égyptienne, où il avait déjà séjourné depuis son incarcération en avril 2011. Ce rebondissement intervient alors que l'armée et la police mènent depuis plus d'une semaine une campagne de répression sanglante des manifestations des partisans de M.Morsi, premier président élu démocratiquement en Egypte et issu des Frères musulmans. Ce dernier est détenu au secret par l'armée et accusé de complicité de meurtres. Dans ce contexte, «le débat égyptien a déjà été déplacé sur des champs autres», note Barah Mikaïl, spécialiste du Moyen-Orient au sein de l'institut de géopolitique espagnol Fride. De ce fait, poursuit-il, «la charge symbolique restera forte, mais sans beaucoup de chances d'aller vers un retour franc à 'l'ordre ancien''. Pour Washington, le sort de Hosni Moubarak relève des affaires intérieures de l'Egypte. Quant au cas de M.Morsi, «notre position reste la même: nous pensons qu'il devrait y avoir un processus pour sa remise en liberté», a déclaré la porte-parole du département d'Etat, Jennifer Psaki. M.Moubarak, qui a dirigé pendant plus de 30 ans l'Egypte, reste accusé et son procès pour «meurtre de manifestants» lors de la révolte de janvier-février 2011 reprendra demain, au Caire. Il est aussi inculpé dans d'autres affaires de corruption et attend son jugement. Après l'annonce de la sortie de prison de l'ex-président, la Suisse a annoncé qu'elle allait à nouveau se pencher sur le dossier du gel des fonds de Hosni Moubarak, soit 700 millions de francs suisses (583 millions d'euros). Le jour de la reprise de son procès doit s'ouvrir celui des dirigeants des Frères musulmans arrêtés par l'armée après le coup de force contre M.Morsi et ses partisans. Le Guide suprême Mohamed Badie et ses deux adjoints, Khairat al-Chater et Rachad Bayoumi, doivent comparaître pour «incitation au meurtre» de manifestants anti-Morsi qui avaient attaqué le QG des Frères musulmans le 30 juin, journée de mobilisation massive pour réclamer le départ de M.Morsi. Face à cet engrenage de la violence, l'Union européenne a décidé la suspension des licences d'exportation vers l'Egypte d'équipements sécuritaires et d'armes et va réexaminer l'aide importante qu'elle apporte au Caire. Washington fait également peser la menace d'une rupture des aides financières, mais l'Arabie Saoudite a promis qu'elle compenserait avec ses alliés du Golfe tout arrêt de l'aide occidentale. En une semaine, au moins 970 personnes ont péri dans les heurts entre pro-Morsi et forces de l'ordre, incluant 102 policiers tués par des manifestants ou islamistes. Ce bilan en une semaine est plus élevé que celui de 850 morts en 18 jours de révolte contre M.Moubarak en 2011. Alors que la répression fait craindre un retour des islamistes à la clandestinité et une radicalisation de leur frange la plus dure, 25 policiers ont été tués lundi dans le Sinaï, l'attentat le plus meurtrier depuis des années contre la police. Jeudi, deux soldats ont encore péri dans une attaque contre leur convoi à Ismaïliya, sur le canal de Suez, selon des sources de sécurité. Enfin, Human Rights Watch a dénoncé des attaques contre 42 églises et de nombreuses écoles, maisons et entreprises tenues par des coptes, les chrétiens d'Egypte, et rapporté des témoignages accusant les forces de l'ordre d'avoir été absentes lors de ces attaques confessionnelles.