Le landerneau politique national n'en finit pas de spéculer sur les déclarations du secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, et les intentions cachées, sinon les fondements, de paroles qui apportent un vent de fraîcheur dans l'espace politique national. Ses déclarations posent en filigrane un problème crucial de gouvernance en Algérie. Mais le fait que cela vienne du premier dirigeant du parti au pouvoir, le FLN, voilà qui est à tout le moins insolite et quelque peu spécieux. En tout état de cause, on pouvait tout attendre de M.Saâdani, certes pas qu'il défende l'Etat de droit, la liberté d'expression, l'indépendance de la justice et tutti quanti... Du coup, connaissant la véritable stature du personnage, on demande à voir. Et d'aucuns de s'interroger par qui est-il aiguillonné, briefé et instrumenté le «nouveau» secrétaire général du FLN lequel n'est pas suffisamment branque pour dire ce qu'il a dit. Alors, pour qui roule Amar Saâdani? C'est étonnant en fait qu'il eut fallu entendre ces «vérités» de la bouche de M.Saâdani. L'Etat de droit et pour tout dire, la démocratie - pratiques qui font le citoyen et créent la citoyenneté - sont demeurés dans notre pays à l'état virtuel. Ainsi, la gouvernance, les libertés, les droits de l'homme ont perdu chez nous leur sens premier et leur signification pour une population dépossédée de ses droits les plus élémentaires de dire, agir et penser. Confirmée par le premier responsable du FLN, c'est tout à fait amusant. Or, c'est de l'intérieur même de l'Etat que des actions sont diligentées pour perpétuer l'amalgame entre pouvoir et Etat, entre gouvernants et institutions, neutralisant de facto, le fonctionnement normal de l'Etat. En démocratie, certes, les hommes de pouvoir (les politiques) rendent aux citoyens les comptes de leurs actes de pouvoir et de gestion. D'autant que dans un pays gouverné par la loi et uniquement par la loi, les citoyens peuvent à tout moment révoquer les dirigeants en ne leur renouvelant pas leur confiance et mandat. En extrapolant des déclarations du secrétaire général du FLN - réitérées dans une interview avec le journal électronique TSA - on peut estimer que c'est ce qu'il voulait dire: personne n'est au-dessus des lois et tout un chacun est tenu de travailler dans le cadre des lois et plus singulièrement dans le cadre de la loi fondamentale, plus souvent piétinée. Reste toutefois cette interrogation persistante et essentielle: qui est derrière ces sorties tonitruantes de M.Saâdani qui lui donnent d'oser dire tout haut et à claire voix ce que les Algériens pensent tout bas? Une autre énigme du fonctionnement d'un Etat sous la mainmise des clans qui ont maintenu en stand-by un pays qui avait tous les moyens et capacités de dépasser la situation qui est la sienne présentement. Quand des hommes, en marge des lois, usent des moyens de l'Etat pour neutraliser toute opposition, monopolisent les moyens de communication de l'Etat tout en contribuant au dysfonctionnement des institutions de cet Etat, nous ne sommes pas alors loin de l'Etat de non-droit. Les différents épisodes de «redressement» du FLN témoignent de pratiques qui offensent le droit et les lois, d'autant que ce parti accapare l'ensemble des institutions de l'Etat et aurait dû donner l'exemplarité du respect des lois. Des faits qui jurent avec ce qui est attendu de la bonne gouvernance et de l'Etat de droit. Aussi, quels garde-fous prémunissent-ils l'Etat des dépassements de ses commis qui sont préjudiciables à son crédit? Même si le propos du secrétaire général du FLN reste confus, dès lors que subsiste l'interrogation de savoir pour qui court M.Saâdani, il n'en demeure pas moins qu'il donne une grande opportunité à l'ouverture d'un débat national sur l'Etat de droit et la gouvernance. Opportunité que la classe politique nationale se doit de saisir comme de prendre au mot le secrétaire général du FLN. En fait, les étonnantes déclarations de M.Saâdani ne doivent pas rester sans suite - ou être un pétard mouillé - et donner aux politiques, qui aspirent à gérer le pays, de saisir au bond cette pertinence, en songeant aux moyens de redresser les dysfonctionnements qui ont miné l'Algérie comme de mettre un terme aux carences qui ont affaibli l'Etat. C'est seulement à ce prix que les propos de Saâdani auront du sens, sinon cela restera une manoeuvre clanique de basse oeuvre pour conserver le pouvoir. A-t-on ouvert une parenthèse ou donné un augure? Telle est la question!