Le pnda dans l'esprit et dans la lettre a réussi la gageure de briser bien des tabous et d'ouvrir de radieuses perspectives pour un secteur vital. La nouvelle politique agricole, dont le Plan national de développement agricole constitue un segment privilégié, sinon une véritable charte de référence pour l'ensemble des opérateurs concernés au demeurant, commence déjà à porter ses fruits au sens propre et figuré par ailleurs. Car c'est la première fois depuis l'indépendance du pays que les décideurs ont posé d'abord un diagnostic sérieux et fiable, ensuite veillé scrupuleusement à son aboutissement progressif et dans l'espace et dans le temps. Pour preuve, ce regain d'intérêt pour tous les métiers de la terre qui s'est transformé depuis le lancement officiel du PNDA en une extraordinaire ruée vers le rural. Phénomène tout aussi exceptionnel et significatif s'il en est, les jeunes en particulier affichent et manifestent parce que les nouveaux textes (l'armature juridique notamment) et la volonté politique les y incitent, un désir ardent d'investir et de s'investir dans un créneau qui suscite, désormais, un engouement général rarement égalé. Cela est si vrai toutes les statistiques le confirment - que dans cette approche nouvelle de la gestion (ou plutôt du management) du secteur agricole, les décideurs ont eu la présence d'esprit, voire la lucidité de «dépolitiser» le débat sur l'agriculture pour ne l'inscrire que dans une démarche «résolument économique». Et c'est surtout ce facteur qui a fouetté et libéré les initiatives ainsi que les énergies créatrices qui ont compris qu'il leur est offert là «une occasion en or» de démontrer tout leur savoir-faire (le fameux know-how), tout en participant concrètement au développement et à la croissance économique du pays. Car il s'agit, avant tout, de «consolider la place du secteur agricole dans l'économie nationale» tel que le stipule clairement le PNDA à travers ses idées force et ses lignes directrices. Agir sur les mentalités C'est dans cette optique également qu'il convient de décrypter cette volonté réelle des décideurs de parvenir, à terme, à agir sur les mentalités au double plan des idées bien arrêtées qu'on s'est faites jusque-là sur l'exploitant agricole dont l'ambiguïté du statut prêtait à équivoque pour le moins, ainsi que de l'acte de production agricole, en lui-même, déconsidéré puisque non scientifiquement appréhendé dans un secteur vital qui ne saurait donc s'offrir le luxe de faire l'économie des technologies de pointe dans ce domaine névralgique. Mieux, les pouvoirs publics ont su éviter le piège fatal de la dichotomie privé-public (même si le privé occupe 70% de la SAU), pour ramener les choses à leur juste dimension, c'est-à-dire plus prosaïquement «placer l'exploitation agricole au coeur de la problématique de fond», le reste, n'étant en vérité qu'accessoire. Car c'est là, en effet, le noeud gordien du problème et il ne faut surtout pas se tromper, à ce niveau essentiellement, de débat. Une fois n'est pas coutume non plus, les détenteurs des leviers décisionnels dans ce que l'on pourrait appeler «le nouvel organigramme» du monde rural, par-delà toute une batterie de mesures visant à simplifier toutes les procédures d'accès au statut à présent enviable d'exploitant agricole (débureaucratisation, décentralisation de la décision, dépoussièrement de tout l'environnement, coup d'accélérateur pour la création des PMI, PME, partenariat tous azimuts, etc.), ont déroulé une véritable stratégie visant à prendre en charge l'ensemble des contraintes, entraves et obstructions (avérées ou non), qui ont découragé, dans un passé récent, bien des volontés. II est important de souligner dans la foulée de cet impressionnant dispositif rigoureux mis en branle par qui de droit aux fins de promouvoir et revaloriser toutes les fonctions liées directement ou indirectement au secteur agricole, que l'option «sécurité alimentaire» s'est fort judicieusement substituée à la notion un peu moins pertinente et révélatrice «d'autosuffisance alimentaire». Et ce n'est pas là simplement une vue de l'esprit dans la mesure où se suffire d'atteindre l'autosuffisance ne met pas pour autant le pays à l'abri de néfastes retombées. C'est dire donc que l'autosuffisance alimentaire n'est qu'une condition nécessaire mais non suffisante pour autant se prémunir contre de mauvaises surprises. Tandis que la sécurité alimentaire, elle, une fois garantie, assure de bien meilleures perspectives puisque reposant sur une non moins meilleure assise. Bien entendu, on se devra de poser le préalable suivant «assurer un seuil minimal de production des produits de base». Et là, on pense notamment à l'impérieuse nécessité d'échapper par les voies et moyens idoines tels que définis dans le PNDA, au terrible chantage alimentaire exercé par les pays développés à l'encontre des nations moins nanties et en matière de richesses naturelles et en matière de ressources humaines. Autre fait marquant qu'on ne saurait passer sous silence et qu'il convient donc d'inscrire à l'actif des promoteurs de ce projet, dans la hiérarchie des priorités (bien que tout soit relatif), le développement et l'impulsion de l'agriculture biologique occupent une place de choix et se taillent même la part du lion dans l'esprit des décideurs, sans doute conscients qu'il y a d'abord un retard à rattraper et que surtout la science et son pendant naturel la recherche scientifique, constituent la force motrice destinée à booster le secteur en lui injectant experts et compétences reconnus comme tels. Sécurité alimentaire D'ailleurs, et il est des signes qui ne trompent pas, on parle de plus en plus dans le secteur agricole de concurrence, de compétitivité et de performance, c'est-à-dire tous les ingrédients nécessaires à une mise à niveau qui conditionne l'accession du pays à l'OMC dont on ne connaît que trop les attributs de rigueur qui la caractérisent. Raison de plus justement pour redoubler d'ardeur, d'inventivité et de créativité pour déboucher sur «la satisfaction en priorité des besoins du marché et en quantité et en qualité». Ce qui serait franchir déjà un cap important, en attendant, pourquoi pas, de dégager des excédents et les exporter. Comme c'est présentement le cas pour la fameuse datte «Deglet Nour» universellement appréciée. Evidemment toutes ces actions qui forment la quintessence du PNDA seraient incomplètes si elles n'étaient accompagnées de l'extension de la SAU par la mise en valeur des terres, l'amélioration du taux de couvert forestier, la protection et l'aménagement de l'espace rural et agricole, le tout au service exclusif «d'un développement durable et intégré». Cela nonobstant, pour paraphraser les initiateurs de ce document de référence, le fait que le développement agricole ne saurait aboutir à des résultats tangibles et pérennes que si ses objectifs sont «socialement acceptables, économiquement viables et écologiquement durables» pour tout dire. Enfin et ce n'est pas là le moindre des mérites des décideurs, toute cette stratégie offre cet immense mérite de s'articuler fondamentalement autour de la dimension humaine et de se ramener exclusivement à elle du fait que «l'homme est en dernière instance au centre de nos préoccupations», comme le précisent, explicitement, l'esprit et la lettre du Plan national de développement agricole, lui-même prolongement naturel de la nouvelle politique agricole qui ouvre de radieuses perspectives pour un secteur qui en avait cruellement besoin.