Pour de nombreux observateurs, les Algériens ont divorcé avec la politique Comme en 1995, en 1999, en 2004 ou en 2009, les Algériens vont aller vers un vote refuge et choisiront le candidat qui leur garantira, paix, sécurité, emploi et logement. Depuis l'avènement du pluralisme politique en 1989, les Algériens ont toujours voté selon la tendance générale, ou ce qu'on appelle dans le jargon politique «un vote refuge». Durant plus de 20 ans les Algériens ont voté avec «el wakef» ou celui qui détient le véritable pouvoir dans le pays. La présidentielle de 2014, pourrait s'inscrire dans la même logique politique puisque aucun candidat n'a réussi à capter l'intérêt des citoyens algériens, ce qui pourrait les amener à voter facilement pour le candidat Bouteflika pour un quatrième mandat ou pour tout autre candidat qui bénéficiera de son soutien. Lors de la première élection présidentielle en 1995, les Algériens avaient voté massivement pour Lamine Zeroual, considérant qu'il était le seul parmi les quatre candidats capable de ramener la paix et la sécurité. L'ancien général était considéré par le peuple comme une garantie politique et sécuritaire même si ce dernier était inconnu sur la scène politique. Les Algériens qui avaient adopté un vote sanction en 1990 contre le FLN en optant pour le parti dissous, le FIS, avaient adopté «un vote refuge» contre les autres candidats en lice qui étaient incapables de donner une garantie de retour à la paix sociale: l'islamiste Nahnah, le démocrate Saïd Sadi ou encore le réformateur Nourreddine Boukrouh. A l'époque, l'Algérie qui vivait sous le couvre-feu, au rythme des massacres collectifs et du verrouillage extérieur, avait besoin d'une légitimité internationale pour appliquer son programme de relance économique et politique. Le candidat Lamine Zeroual, qui avait pourtant fait face à une campagne de dénigrement de la part des médias étrangers en pleine polémique du «Qui tue qui», avait réussi le challenge de faire bouger les électeurs algériens en centaines de milliers, notamment à l'étranger où la communauté algérienne s'est déplacée en masse pour se réfugier dans le vote de la paix et la sécurité. Même attitude adoptée en 1999, en 2004 et en 2009 pour le candidat Bouteflika qui avait dès sa première élection, proposé des projets politiques oeuvrant pour la paix comme la réconciliation nationale et la concorde civile. Pour de nombreux électeurs, c'est Bouteflika qui a finalisé grâce à l'embellie financière venant du pétrole, les grands projets sociaux et économiques comme le métro, l'aéroport international, l'Aadl, le tramway, l'autoroute Est-Ouest ou encore la distribution du logement social. Pour de nombreux électeurs, Bouteflika est l'homme qui a ramené la paix et la sécurité, qui a freiné le terrorisme, qui a développé économiquement le pays et surtout remis l'Algérie dans le concert des grandes nations. En 2004, malgré des candidatures de personnalités politiquement fortes comme Ali Benflis, les Algériens avaient opté largement pour Bouteflika. Ce dernier avait été choisi largement par le peuple, car il a ramené la paix, le logement et le travail. Durant plus d'une année, en 2003, il a parcouru le pays en distribuant logements et soutien au développement pour les wilayas. Pour de nombreux observateurs, les Algériens ont divorcé avec la politique et ne sont pas prêts à changer de cap pour se retrouver, comme en 1990, dans une situation politique qui créerait le désordre social et l'insécurité dans le pays. Le meilleur exemple de ce choix électoral et de ce vote utile a été donné en 2012, au lendemain des révolutions arabes, au moment où tous les régimes ont changé de système, les Algériens ont voté largement pour le FLN, le parti au pouvoir, alors que la tendance a été favorable aux islamistes. Les résultats du scrutin ont largement favorisé le FLN quasi majoritaire avec 220 députés, ce qui a fait dire au ministre de l'Intérieur de l'époque Daho Ould Kablia que les électeurs ont adopté pour le FLN «un vote refuge», de peur de revivre la situation de la victoire de l'ex-FIS en 1991. Le ministre avait déclaré à cette époque que ce vote démontre le degré de patriotisme du peuple algérien «qui a répondu à l'appel du chef de l'Etat et à son discours de Sétif». En 2014, alors qu'aucun candidat sérieux ne s'est manifesté pour porter le pays dans les années à venir, les Algériens ont exprimé largement leur souhait de voir le Président Bouteflika se porter candidat pour un quatrième mandat. Si ce dernier entre dans la course, sa candidature passera comme une lettre à la poste, ce qui a donné beaucoup d'hésitation aux autres candidats qui savent qu'ils n'ont aucune chance si Bouteflika annonce sa candidature. Ainsi le «vote refuge» l'a largement emporté contre le vote démocratique et pluraliste.