L'Egypte a vécu samedi dernier une journée meurtrière à l'occasion des trois ans de la révolte anti-Moubarak Au terme de 24 heures de violences, une cinquantaine de personnes ont été tuées, notamment au Caire et à Alexandrie, la deuxième ville du pays sur la côte méditerranéenne et quelque 1 079 manifestants ont été arrêtés. Les heurts entre opposants et partisans du pouvoir aux mains de l'armée ont fait 49 morts en Egypte où la presse affichait hier son soutien aux manifestants pro-Sissi, préparant le terrain à une possible candidature du nouvel homme fort à la présidentielle. Samedi, les célébrations du troisième anniversaire de la révolte qui avait chassé Hosni Moubarak du pouvoir se sont transformées en manifestation à la gloire du général Abdel Fattah al-Sissi, chef de l'armée mais aussi ministre de la Défense et vice-Premier ministre d'autorités intérimaires dont il a lui-même annoncé la mise en place avec la destitution du président islamiste Mohamed Morsi début juillet. Dans le même temps, les opposants aux nouvelles autorités emmenés par les Frères musulmans, l'influente confrérie de M. Morsi, et les mouvements de la jeunesse, fer de lance de la révolte de 2011, ont été violemment dispersés par la police massivement déployée dans le pays, à grands renforts de grenades lacrymogènes et de tirs de fusil à pompe. Au terme de 24 heures de violences, une cinquantaine de personnes ont été tuées, notamment au Caire et à Alexandrie, la deuxième ville du pays sur la côte méditerranéenne, et quelque 1.079 manifestants ont été arrêtés, de sources officielles. En outre, six attentats ont visé la police vendredi et samedi au Caire et les forces de l'ordre coupaient hier la plupart des grands axes du Caire et fermaient toutes les rues menant à des commissariats ou des postes militaires. Toutefois, dans un nouveau camouflet infligé à l'armée, quatre soldats ont été tués par des assaillants armés dans le Nord-Sinaï, selon des sources de sécurité. Egalement dans cette péninsule frontalière de la bande de Ghaza, devenue base arrière de nombreux groupes jihadistes, cinq soldats sont morts quand un hélicoptère de l'armée s'est écrasé samedi, sans qu'aucune explication sur ce crash n'ait filtré. Les forces de l'ordre, désormais visées quasi-quotidiennement par des attentats, assurent mener depuis l'éviction de M.Morsi une «guerre contre le terrorisme». La plupart des attentats meurtriers ont été revendiqués par un groupe jihadiste basé dans le Sinaï et disant s'inspirer d'Al Qaîda, Ansar Beit al-, Maqdess, mais les autorités accusent les Frères musulmans, récemment déclarés «terroristes». Depuis août, la quasi-totalité de leurs dirigeants ont été arrêtés. Parallèlement, les médias, qui diffusent régulièrement des clips à la gloire de l'armée et de la police, dénigrent sans relâche la confrérie, qui avait remporté toutes les élections depuis le départ de Moubarak. Les islamistes, bien que cible principale des appels à la délation et du climat de haine de plus en plus palpable, ne sont cependant pas les seuls «ennemis intérieurs» désignés et les médias dénoncent aussi inlassablement la «cinquième colonne», composée pêle-mêle des militants progressistes, des journalistes et des étrangers. Revenant sur la journée de mobilisation de samedi, l'une des plus sanglantes depuis près de quatre mois, les quotidiens égyptiens titraient hier sur les manifestations de soutien aux nouvelles autorités sur l'emblématique place Tahrir du Caire, y voyant «le défi du peuple au terrorisme». L'élection présidentielle aura lieu avant les législatives Le président égyptien par intérim a annoncé hier qu'une élection présidentielle serait organisée sous trois mois, avant des législatives, levant les ambiguïtés sur le calendrier de la transition promise par l'armée début juillet lorsqu'elle a destitué le président islamiste Mohamed Morsi. Le discours d'Adly Mansour, retransmis à la télévision, intervient au lendemain des célébrations du troisième anniversaire de la révolte ayant chassé Hosni Moubarak du pouvoir, qui se sont transformées en manifestations, appelant le chef de l'armée et nouvel homme fort du pays, le général Abdel Fattah al-Sissi, à être candidat à la présidentielle. Pour les experts, l'organisation de l'élection présidentielle avant les législatives devrait jouer en faveur du général, qui avait annoncé lui-même l'éviction du seul chef d'Etat élu démocratiquement d'Egypte, et ne cache plus son intention de se présenter à la magistrature suprême. Les scrutins présidentiel et législatifs avant l'été doivent clore la «transition démocratique» promise par les militaires et lancée mi-janvier par un référendum sur une nouvelle Constitution - révision à la marge de celle adoptée en 2012 sous M.Morsi - adoptée à plus de 98% avec une participation de 38,6%, soit six points de plus qu'en 2012.