L'opposition occupe toujours le centre de la capitale Kiev. L'opposition ukrainienne devait tenir, hier à Kiev, un nouveau meeting devant des manifestants dont les revendications immédiates portent notamment sur la libération des personnes arrêtées après des heurts avec la police et sur la formation d'un nouveau gouvernement. La participation des principaux leaders de l'opposition à ce meeting n'était pas prévue. Mais leurs activités en Allemagne ont été largement rapportées par les médias d'opposition à Kiev. En effet, les chefs de file de l'opposition, Vitali Klitschko et Arseni Iatseniouk, mènent une vaste campagne de sensibilisation, rencontrant tour à tour le secrétaire d'Etat américain John Kerry et ses homologues français Laurent Fabius et allemand Frank-Walter Steinmeier, réunis pour la Conférence annuelle sur la sécurité de Munich. Plus de deux mois après le début le 21 novembre dernier de la crise déclenchée par la volte-face du président Viktor Ianoukovitch, qui avait refusé de signer un accord avec l'Union européenne et s'est rapproché de la Russie. Rappelons que pas plus tard que samedi dernier, le ministre ukrainien des Affaires étrangères Léonid Kojara a déclaré que l'opposant Dmytro Boulatov, opéré après avoir selon son récit subi des tortures pendant une semaine, était «en bonne santé» et avait juste «une égratignure sur la joue». «Il paraît que l'histoire présumée de son enlèvement et des tortures qu'il a subies n'est absolument pas vraie», a déclaré M.Kojara en anglais à la chaîne de télévision qatarie, Al Jazeera. «L'enquête se poursuit. Physiquement, l'homme est en forme, il a juste une égratignure sur sa joue», a-t-il poursuivi, interrogé en marge de la Conférence sur la sécurité à Munich. Ces propos, qui ont suscité une avalanche de commentaires indignés en Ukraine, «ne reflètent pas l'attitude réelle du ministre Kojara envers cette situation tragique», a déclaré le ministère dans un communiqué samedi soir. «Le ministre regrette profondément ce qui est arrivé à Dmytro Boulatov et lui souhaite un prompt rétablissement», selon la même source. L'avocat de Boulatov a indiqué pour sa part que son client avait été opéré la veille pour se faire mettre des points de suture, et était toujours en «soins intensifs». L'Allemagne a proposé samedi d'accueillir le militant pour des soins médicaux. Le récit de Dmytro Boulatov, un militant de l'opposition de 35 ans qui déclare avoir été enlevé le 22 janvier à Kiev et abandonné dans une forêt jeudi 30 après avoir été torturé par des inconnus, a suscité des craintes de répression cachée. Son cas a choqué en Europe et aux Etats-Unis. Il s'ajoute à d'autres passages à tabac et enlèvements, dont un mortel, survenus pendant la contestation sans précédent qui secoue l'Ukraine depuis la volte-face en novembre du président Viktor Ianoukovitch qui s'est tourné vers la Russie en renonçant à un rapprochement prévu avec l'Union européenne. Vitali Klitschko, l'un des principaux leaders de l'opposition ukrainienne a pour sa part dénoncé à Munich les pressions du pouvoir à Kiev sur M. Boulatov, «qui ne se sent pas bien». Le ministère de l'Intérieur avait indiqué auparavant que M. Boulatov était recherché depuis le 24 janvier comme «suspect de l'organisation de troubles massifs», ce qui laissait prévoir son placement en détention provisoire. Mais compte tenu de son état de santé, le juge d'instruction a demandé au tribunal de l'assigner à résidence. Le ministère a par ailleurs affirmé ne pas exclure «une mise en scène de l'enlèvement (...) afin de provoquer une réaction négative dans la société». «Ils m'ont crucifié, m'ont coupé une oreille et tailladé le visage, ils m'ont roué de coups sur tout le corps», a déclaré vendredi, Dmytro Boulatov aux chaînes de télévision privées Kanal 5 et 1+1. On distinguait sur les images télévisées du sang coagulé sur son visage, des blessures sur ses mains et des vêtements imprégnés de sang.