Vendredi soir, l'antique Cirta clôturait en apothéose avec Louis Winsberg au TRC sa manifestation haute en couleurs mélodiques, «Musique plurielle»... Après avoir été mené jusqu'au bout de la transe mystique, mercredi dernier, grâce à Athmane Bali et ses amazones choristes du Sud, Colombine Films et le centre culturel d'Annaba nous convient à une autre superbe soirée placée sous le signe de l'innovation et du vertige soufi. Se produisait en première partie de concert, le groupe trio Drom d'Autriche. Avec George Beinschmid à la basse, Agnès Heginger au chant et Edi Kohldorfe à la contrebasse. Ce dernier a animé en matinée un master class très intéressant, pratique à l'appui, bien sûr, mettant en lumière à titre d'exemple la différence entre l'harmonie et le rythme. Le groupe se produit généralement en duo. Le guitariste a été son invité. Que dire de Trio Dram si ce n'est la parfaite maîtrise de chacun des musiciens de leurs instruments. Un excellent travail de scène et une belle démonstration vocale qui fait rappeler Brayan Mc Ferreeen. La chanteuse jouait et transformait sa voix à sa guise comme si elle s'amusait sur un instrument imaginaire. La joie et la bonne humeur étaient de mise. Mais personne ne présageait ce qui allait suivre : Une avalanche de rythmes maghrébins, venus tout droit de Kenadsa dans le sud-ouest de Béchar, s'est abattue sur le théâtre régional de Constantine. Il s'agit de la formation El Ferda. Une formation composée de 12 musiciens dont le répertoire est partagé entre le chaâbi et le haouzi. Le genre musical de la formation est également appelé Ferda. La percussion centrale étant faite d'un tambour découpé dans un fût métallique sur lequel le percussionniste bat la mesure à l'aide d'une savate. Pour désigner la savate, le terme utilisé en arabe est ferda. Le répertoire est composé de pièces que l'on retrouve dans le chaâbi, les houaza de Tlemcen, des textes dits par des poètes de Kenadsa, ainsi que des chants confrériques de la région. La source principale des musiciens de la ferda reste incontestablement la mémoire des plus âgés parmi les hommes et les femmes. Larbi Bestami est le chanteur principal du groupe, puisque d'autres musiciens assurent aussi une partie du chant. L'ensemble utilise un grand nombre d'instruments traditionnels: oûd, violon, banjo, mandoline, derbouka, tâaridja, mahrez (pilon), guembir et bendir. La prestation de Ferda était tout simplement un pur moment de magie survoltée et un hymne au passé. Le répertoire chanté est tiré des textes de poésie populaire et écrits en majorité par les grands maîtres de la tarika (Soufi) encore très présente dans les us des hommes du désert. Au quart de tour, toute la salle battait la cadence à tout rompre. Une chaleur torride y régnait. Sublime soirée, la rencontre du public avec Ferda de Béchar aura été l'un des temps forts de cette manifestation culturelle. Vendredi dernier, le théâtre antique de Constantine recevait en clôture de ces rencontres de Musique plurielle, Louis Winsberg et ses acolytes de musiciens pour une soirée musicale aux couleurs du flamenco, du jazz et autres ou oriental ou indien. Eminent guitariste du groupe Sixum, pionnier de la scène fusion jazz française, Louis Winsberg nous proposait un voyage initiatique au coeur de son album Jaleo le bal des sudo. Son phrasé guitaristique, pétri de jazz moderne croise avec bonheur la guitare acoustique flamenco de Jean-Baptiste Maines. A la voix «d'ange», José Montealagre domine la complainte andalouse, il est relayé par le Cajor (la percussion traditionnelle du flamenco) de Miguel Sanchez. Le beau Jean- Christophe Maillard enrichissait l'ensemble par un apport nettement oriental: il joue notamment du Saz (le oûd turc) avec un grande sensibilité. «C'est encore mieux que dans nos rêves. C'est vrai que c'est important de venir jouer ici. Quel public! On a beau être averti...», confie Louis Winsberg pour dire son grande satisfaction de se produire en Algérie. La guitare de Louis Winsberg sonne à des moments comme une cithare. «Jaleo ce sont tous les encouragements que vous nous donnez depuis le départ littéralement, cela veut dire: Brouhaha». Louis Winsberg et ses musiciens nous font découvrir en exclusivité leurs prochaines compositions que l'on découvrira sur leur nouvel album qui sortira en octobre prochain, Kakito Fandango, Une estiella se apaga, Ami vera. Après un rappel, les musiciens reviennent sur scène pour jouer leur très beau morceau qui figure dans leur album Jaleo, le bal des Suds, Sacromonte où l'éclatante touche indienne dans ce jazz flamenco est évidente. Jaleo est en effet une invitation au voyage à la découverte de sons nouveaux, de savantes fusions musicales. Un riche spectacle qui allie chant, percussions loops et guitare. Un monde «vierge» où l'on peut réinventer la musique en toute liberté. Fidèle à ses promesses, Colombine Films a sorti chez Belda Diffusion le majazz de l'année dernière en compilation de deux volumes sur lesquels on peut apprécier la musique de Karim Ziad, Fawzi Chekili, Thôt et Ouajdi Chérif. Un 3e opus est consacré au jazzman tunisien, Fawzi Chekili. Toutes les belles musiques que l'on a eu à écouter lors de cette «Musique plurielle» seront également disponibles bientôt chez Belda Diffusion.