L'Irak est à nouveau ensanglanté au moment où Ben Laden donne de ses nouvelles et appelle au jihad. Najaf était a feu et à sang ce week-end après que les marines américains aient décidé d'une vaste opération contre l'Armée du Mehdi du chef radical chiite Moqtada Sadr. Quoique la situation est redevenue calme hier, il n'en reste pas moins qu'il y eut une cinquantaine de morts, parmi les miliciens et des civils irakiens, lors de combats et de plusieurs explosions à Najaf, à Kerbala, les deux villes saintes chiites, et à Koufa, fief de Moqtada Sadr. Outre ces trois villes, des accrochages ont été signalés, jeudi et hier, à Nassiriyah, à Amara, à Sadr City (banlieue chiite de Bagdad) alors qu'un attentat suicide à Bagdad faisait sept morts. D'autre part, le commandement militaire américain a annoncé hier avoir tué dix «rebelles» irakiens. Ainsi, après une période plus ou moins calme, la violence a repris de plus belle, alors que les forces américaines se redéployaient sur le terrain, notamment dans le périmètre Najaf-Kerbala-Koufa où sont aujourd'hui concentrés des milliers de miliciens de l'Armée du Mehdi et de marines américains, qui ceinturent les environs des trois villes chiites. De fait, la situation s'est détériorée à Najaf après la désignation par l'autorité provisoire de la coalition, CPA, d'un nouveau gouverneur de la ville sainte chiite, en la personne de Adnane Al-Zirfi, un chiite koufi, ancien opposant à Saddam Hussein. Moqtada Sadr, a animé hier la prière du vendredi à Koufa, (distante de 10 km de Najaf), où il s'est rendu à pied encadré par des centaines de ses partisans et de miliciens de l'Armée du Mehdi, mettant en garde les forces d'occupation et avertissant «libérer tous les prisonniers et faites juger les criminels ou nous allons entreprendre une action inimaginable». Que veut dire par là le turbulent chef chiite, dont la tête est mise à prix par les Américains, qui ont remis à l'ordre du jour le vieux dossier de l'assassinat d'un imam à Koufa dans lequel Moqtada Sadr serait impliqué? De fait, le chef radical chiite commence à inquiéter sérieusement les habitants de Najaf pris entre les feux des miliciens et des marines américains au point de faire réagir certains dignitaires de la ville. Ainsi, un dignitaire religieux a conseillé à Moqtada Sadr et aux radicaux chiites de quitter Najaf. Ce dernier, Sadredine Al-Koubbanji, proche du Csrii (Conseil suprême de la Révolution islamique en Irak), s'adressant aux miliciens lors de la prière du vendredi, a indiqué «Ecoutez le conseil des sages. Vous êtes notre chère jeunesse et nous tenons à vous, mais retournez dans vos régions, défendez-les et chassez les occupants et les baasistes». Alors que la situation est explosive en Irak, le chef d'Al-Qaîda, Oussama Ben Laden choisit ce moment pour se manifester exhortant les Irakiens au jihad, déclarant, selon un site islamique sur Internet, «Il incombe aux Irakiens de lancer le jihad, non seulement contre les croisés, mais aussi contre le (futur) gouvernement des renégats (irakiens) et ceux qui l'aident», mettant aussi à prix d'or les têtes du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, celle de son émissaire spécial pour l'Irak, Lakhdar Brahimi et celle de l'administrateur américain en Irak, Paul Bremer (voir article en page 3). De fait, M.Brahimi est retourné jeudi à Bagdad où il doit étudier avec les autorités d'occupation et irakiennes provisoires la mise en oeuvre des conditions devant aboutir à la formation d'un gouvernement intérimaire avant le 20 juin prochain, date du transfert de souveraineté à l'Irak. En vérité, le temps presse et l'émissaire spécial de l'ONU entame une course contre la montre pour arriver à un consensus entre les diverses parties prenantes dans le drame irakien. Un drame assombri davantage par le scandale des sévices infligés aux prisonniers irakiens. D'ailleurs, recevant le roi jordanien, Abdallah II, le président américain George W.Bush, s'est excusé auprès du souverain hachémite, pour ce qui s'est passé dans la prison d'Abou Ghraib, estimant que ces actes (sévices et tortures contre les prisonniers) sont «une tache sur l'honneur et la réputation de notre pays. Je le comprends et c'est pourquoi il est important que justice soit rendue». Mais des excuses ne suffisent pas, d'autres mesures sont indispensables pour que de telles exactions ne se renouvellent plus, et à tout le moins le secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld, doit assumer la responsabilité du scandale des prisonniers irakiens en démissionnant de son poste. En fait, devant l'aggravation de la situation, le conflit irakien reste ouvert à toutes les options.