L'armée américaine d'occupation fait de la neutralisation de Moqtada Sadr son objectif prioritaire. Alors même que le siège de Falloujah se poursuivait hier et des accrochages toujours en cours, une autre bataille se prépare à Najaf, ville sainte chiite, où s'est retranché l'ennemi public numéro un des Etats-Unis, le chef radical chiite, Moqtada Sadr, recherché mort ou vif. En fait, depuis mardi, de nombreuses troupes américaines ont commencé à affluer en une grande concentration autour de la ville sainte de Najaf, où est réfugié Moqtada Sadr, de même qu'autour de Koufa, son fief principal, et Kerbala. Selon le général Ricardo Sanchez, chef adjoint des opérations de la coalition, des renforts ont été envoyés à Najaf, indiquant «Nous avons fait manoeuvrer des troupes à proximité de Najaf pour être prêts à mener une offensive pour éliminer les derniers éléments de Moqtada Sadr là-bas» ajoutant «Je peux vous dire que la force acheminée dans la région est importante (...) elle peut faire tout ce qu'on lui demande» soulignant encore «l'objectif n'était pas Najaf mais Moqtada Sadr et sa milice (...) Nous allons les pourchasser et les détruire» conclut le général Sanchez. Abattre le chef radical chiite est devenu pour les forces américaines l'objectif prioritaire, comme l'a évoqué hier le président Bush lors de sa conférence de presse. Pour sa part le général Richard Myers, chef d'état-major interarmées américain en visite dans les pays du Golfe, en vue de rassurer les monarchies, a indiqué hier à Bahreïn que «le problème Sadr sera résolu», sans doute par la puissance de feu qui est celle des forces d'occupation américaines. Les populations des trois villes saintes irakiennes menacées par la guerre annoncée ont commencé à se préparer aux batailles qui risquent d'éclater à tout moment comme en témoignaient les renforts militaires qui ne cessaient d'arriver aux portes de Najaf et de Koufa. Cette bataille décisive, contre Moqtada Sadr, semble avoir été retardée par les pèlerinages à Kerbala, organisés à la mémoire de l'imam Husseïn, la semaine dernière. Au moment où tous les ingrédients sont réunis pour l'explosion du front chiite, où se font face forces armées américaines et miliciens de l'Armée du Mehdi -retranchés à Najaf, Koufa et Kerbala-, le front sunnite connaît des hauts et des bas. Après les craintes de reprise de combat soulevées par l'alerte de mardi induite par les bombardement de l'aviation américaine contre deux immeubles à Falloujah où s'abritaient des résistants, les choses semblaient se stabiliser hier alors que le cessez-le-feu, indique le médiateur du parti islamique irakien, est reconduit pour quarante-huit heures. Cette trêve doit en principe permettre la réouverture des deux hôpitaux de la ville fermés lors des combats de la semaine dernière. Le médiateur, Fouad Raoui, a indiqué que «la trêve a été prolongée de 48 heures à partir d'aujourd'hui (hier) par accord entre les deux parties» ajoutant «l'objectif est de permettre la réouverture de l'hôpital général (dans l'ouest de la ville de Falloujah) et de l'hôpital de campagne jordanien (à sa sortie est) qui ont été fermés en raison du siège imposé par les marines». En fait, les deux fronts peuvent s'embraser à tout moment alors que de nouvelles prises d'otages sont signalées, comme celle d'un journaliste français capturé hier. Ces nouvelles difficultés, que sont les prises d'otages, embrouillent quelque peu les plans américains pour l'Irak. En réalité, d'aucuns se demandent, après la prestation mardi soir du président Bush, si les Etats-Unis ont effectivement un plan pour l'Irak, si l'on excepte la détermination du président américain à respecter l'accord de transfert de la souveraineté aux Irakiens le 30 juin prochain. Ce qui implique que la situation en Irak se stabilise, que les impératifs de transfert soient réunis et que le retrait américain ne soit pas une débandade qui laisserait l'Irak en porte-à-faux. De fait, George W.Bush n'a pas réussi à convaincre les analystes et commentateurs pour lesquels le président Bush n'a rien apporté de nouveau. Scepticisme que résume parfaitement le commentateur politique du Washington Post qui écrivait hier que George W.Bush a été «long sur sa détermination, court sur les détails» alors que l'éditorialiste du New York Time enfonce le clou indiquant que Bush a «échoué à répondre aux questions prioritaires des Américains». Clairement, l'administration Bush ne semble pas avoir d'autre plan de rechange en Irak que l'usage de la force à outrance. Ce qui n'est pas fait pour lui rallier la population irakienne traumatisée par les centaines de morts de ces derniers jours et excédée par la violence dont font montre les marines américains, confortant, a contrario, la position des résistants sunnites à Falloujah et celle des chiites à Najaf.