Celle-ci appelle les autorités à ouvrir «une enquête sur la gestion du secteur sanitaire». La Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh) que préside Ali Yahia Abdenour fait état dans un long communiqué adressé à notre rédaction de la mort dans des conditions dramatiques de «13 bébés en l'espace de 45 jours dans l'hôpital de Djelfa». Dans ce document, il est fait également mention de l'entassement de corps de bébés enveloppés dans des sacs en plastique en état de décomposition avancé et entreposés dans une salle isolée malgré les vives protestations des médecins. Le ministère de la Santé par la voix de son responsable de communication, Slim Belkessam dément catégoriquement le décès des 13 bébés et affirme sereinement qui'«aucun décès de bébés survenu dans des conditions anormales dans l'une des maternités de Djelfa n'est à signaler durant l'année 2004» mais il estime toutefois que des «décès de bébés survenus suite à des complications et qui ne relèvent pas d'une absence de prise en charge adéquate» ne sont pas à exclure. Le directeur de la santé de la wilaya de Djelfa qui était hier convoqué par le wali en personne, a dit-on, fait établir un rapport détaillé en réponse aux faits gravissimes contenus dans le document des responsables de l'association des droits de l'homme. Cette association a également indiqué que «la situation sanitaire dans cette wilaya est désastreuse» à tout point de vue. Elle a voulu tirer la sonnette d'alarme afin, dit-elle, de mettre fin aux «pratiques immorales» qui sont légion dans cette contrée et pour dénoncer parallèlement «le manque de prise en charge sanitaire flagrant» qui ne couvre que 10% de la wilaya, selon les rédacteurs du communiqué. En termes de besoin en médecins-urgentistes, l'association d'Ali Yahia Abdenour fait mention d'un seul médecin pour une population évaluée à 400.000 habitants. Le communiqué fait également état de l'absence de service de maternité au niveau des villages d'El Khemis, Medjbara, Hassi Elâach, Zâafrane, El Kedid et Benhar. Dans un rapport établi par cette association et détaillant les principaux manquements et autres dérives constatés au niveau du secteur sanitaire de la wilaya, le grief retenu contre le surveillant médical accusé «de harcèlement sexuel» envers l'adjointe du directeur d'hôpital, le recours aux «opérations chirurgicales dans l'enceinte même de l'hôpital et par des chirurgiens privés», l'achat de matériel médical à des prix astronomiques en témoigne l'acquisition depuis trois ans d'un appareil dentaire neuf mais qui reste inutilisé à ce jour, du laisser-aller flagrant en matière d'hygiène, une odeur nauséabonde se dégage lorsqu'on pénètre dans l'hôpital, la distribution au compte -goutte des médicaments contre des pots-de-vin au moment ou ils sont refusés aux plus démunis, l'utilisation d'une main-d'oeuvre (gardiens, chauffeurs, agents de sécurité et femmes de ménage tous issus de Sétif) à bon marché et hébergés aux frais de l'hôpital et enfin l'utilisation de la seule ambulance «à des fins personnelles» et en dehors des heures de travail et la liste reste encore très longue. Mais les accusations ne s'arrêtent pas uniquement à ces pratiques contraires à l'éthique mais elle concernent également des cas de malversations financières opérées au détriment des deniers de l'Etat. Ainsi, il est rapporté l'usage de la fraude sur «des factures d'approvisionnement de produits de restauration» dans les hôpitaux de Messaad, Djelfa, Ain Oussera et Hassi Bahbah, de surfacturation dans l'achat de «doses de vaccins» pour bébés et de «passe-droits» dans le recrutement des employés au niveau des divers centres de santé de la wilaya. Une grève de la faim a été déclenchée récemment par les différents employés de l'établissement sanitaire afin de sensibiliser les responsables du secteur sur l'état de dégradation des conditions de travail sans avoir eu l'écho escompté. L'association des droits de l'homme accuse directement le directeur de l'hôpital et le directeur de la santé de la wilaya d'avoir étouffé dans l'oeuf cette grève. A toutes ces accusations proférées par le bureau régional de la Ligue des droits de l'homme, celle-ci appelle les autorités à ouvrir «une enquête sur la gestion du secteur sanitaire» et considère que ces «agissements sont des crimes contre l'humanité et des violations du droit du citoyen garanti par la Constitution» et enfin demande «un châtiment exemplaire à l'encontre des responsables du secteur et principalement du directeur de la santé et de la population pour mauvaise gestion». De son côté, le responsable en communication au niveau du ministère de la Santé, Slim Belkessam reconnaît volontiers qu'à l'instar des autres régions, il existe dans la wilaya de Djelfa «des insuffisances dans la prise en charge médicale spécifique» notamment dans la couverture médicale spécialisée par l'absence de médecins spécialistes dans les 5 spécialités suivantes que sont l'ORL, la pédiatrie et la gynécologie etc. Selon lui, l'Algérie enregistre un déficit de l'ordre de 4000 praticiens spécialisés (médecins-généralistes): «Le ministère peut dire que tout va bien. Alors n'on aurait pas rajouté la mention de réforme hospitalière. Ce n'est pas uniquement le mode de financement qui se recherche mais c'est l'ensemble des conditions à mettre en oeuvre qui est visé à savoir les conditions matérielles, logistiques et organisationnelles» tient à souligner ce responsable du ministère de la Santé.