Des velléités qui remontent à la nuit des temps et qui réapparaissent en 2004. Le problème ne date pas d'aujourd'hui. Avant le 14e siècle déjà, les deux communautés M'zab et Chaâmba se retrouvaient face à face. Si pour la première, son activité principale s'étend au commerce, la deuxième quant à elle, pratique l'élevage et par là même, la transhumance. Ainsi, la première convention entre ces deux tribus date de ce siècle. Plusieurs autres textes sont venus par la suite mettre fin aux luttes, souvent violentes entre ces deux communautés. Depuis l'indépendance de notre pays, plusieurs échauffourées sont devenues monnaie courante. On se rappelle l'année 1980, où on dénombrait des milliers de blessés. Vint la guerre de 1985 entre ces tribus et le même scénario se reproduit en 2004 à M'lika, mais vite circonscrit cette fois-ci. Heureusement d'ailleurs, car sinon les proportions auraient été grandes et incontrôlables. Manipulation disent certains. Empiétement sur nos biens répondent les autres. Mais, il y a «un dessous» encore non compris et les différents questionnements sont restés lettre morte. Ainsi, à la fin de la semaine passée, les populations mozabite et chaâmbie se sont livrées à une «guerre» sans merci et qui a occasionné plus d'une trentaine de blessés. Le motif n'est qu'un litige sur une parcelle de terrain, qui, historiquement appartient aux Mozabites, mais qui est devenue plus tard, propriété publique. Ce lot de terrain, au premier regard n'a rien de particulier. Jusqu'à la fin de la semaine passée, il constituait une aire de jeux, en plus, il est délimité tout autour par les cimetières de deux communautés. Pour la famille mozabite, elle a introduit une demande pour l'attribution de ce lot afin d'y réaliser un collège. L'administration locale a jugé répondre favorablement et ce, pour permettre aux jeunes collégiens des deux tribus de suivre normalement leurs études, de ne pas parcourir chaque matin de longues distances et enfin, créer cette osmose entre les jeunes des deux communautés. Les Mozabites aussi, ont appuyé leur requête par le droit inaliénable sur trois critères qui sont «Abusus», «Usus» et le «Fructus». Une trentaine de blessés Mais en face, les Chaâmba ne l'entendaient pas de cette manière. Pour ceux-là, le terrain appartient à la communauté chaâmbie et c'est à eux d'en profiter. Dans leur esprit, il sera rattaché à l'ancien cimetière car ce dernier, devient exigu. Ces deux positions contradictoires ont ameuté les villageois qui se sont affrontés durement. Grâce à l'intervention des autorités locales, une accalmie mais des plus précaires vient, un tant soit peu, calmer les esprits. Le wali est intervenu juste à temps pour enrayer la coulée de sang. Aujourd'hui, chacune des deux communautés campe sur ses positions de départ. La visite du ministre Ould Kablia sur le terrain a laissé le sentiment qu'une solution serait trouvée. Les sages des deux communautés ont été réunis et les pleins pouvoirs leur ont été confiés pour une solution définitive. Mais comme l'histoire l'a toujours montré ces deux communautés ont vécu des phénomènes similaires, depuis la nuit des temps. Si une solution qui arrange tout le monde était mise en application, d'autres cas seraient soulevés demain. Cette tradition s'est perpétuée depuis des siècles et donne l'impression d'un volcan en sommeil. En fait, toutes ces pratiques sont révélatrices d'une société jeune en mutation, mais dont les «sages» veulent maintenir à l'état primaire. La jeunesse de la vallée du M'zab conteste aujourd'hui, l'ordre établi dont les notables de la région tirent profit. Etre notable à Ghardaïa c'est s'entourer de trois critères à savoir «avoir beaucoup d'argent», «Etre propriétaire de biens» et enfin, «accaparer une responsabilité au sein de la communauté». Ces trois critères semblent aujourd'hui, remis en cause par cette jeunesse assoiffée de vivre et d'apprendre. Les personnes âgées veulent maintenir cette société loin de toute évolution sociale dans le but de sauvegarder certains particularismes. Les Mozabites et les Chaâmba ont toujours été en lutte et à chaque occasion, on fait revivre cette haine basée sur des réminiscences d'un autre âge. C'est ainsi, que, jaloux de leurs coutumes et des règles bien établies, chaque fois qu'un «désobéissement» apparaît, on a recours à la «matraque». Le dernier conflit qui a opposé les deux communautés, nous renseigne à plus d'un titre sur les dessous de cette «tactique». La jeunesse mozabite et chaâmbie veut passer le cap pour vivre ses désirs et se «dissoudre» dans cette Algérie. Pour arriver à leurs fins, elle «endoctrine» la benjamine à recourir au moyen de la brutalité contre son semblable. Et, c'est toujours la guerre qui se termine souvent dans le sang. Il est évident cependant, que le prétexte «du CEM» n'est que la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Cette réalisation coûtera, au moins trois fois le prix d'un collège normal. Il est situé entre trois cimetières. De là, déjà, quelle vue aurait cette réalisation? Ouvrir une fenêtre, se promener autour de la bâtisse, se familiariser avec les morts... sont autant de points négatifs pour le jeune d'aujourd'hui qui n'aurait que «la mort autour de lui!!» C'est en fait, toute la question du détachement de la jeunesse de cette société confinée dans ses traditions et ne répondant à aucun épanouissement, qui est posée aujourd'hui. Au regard de notre tournée sur le terrain, les Mozabites et les Chaâmba semblent loin de ce conflit qui ne fait que ranimer le feu. «Il faut regarder la réalité en face, voir le Nord et acquérir ce développement pour arriver à une société des plus justes et qui nous offrira ses fruits demain.», diront ces jeunes de Melika. N'empêche que ce genre de conflit existe. En effet, on se rappelle que lors de la visite du président de la République dans cette localité, les inaugurations, auxquelles il a procédé. Rappelons ici, que la localité de Ghardaïa possède la plus grande zone d'activités privées du pays. Là, même, le président a procédé à l'inauguration d'une nouvelle ville appelée Mitlili Djedida. Pourtant la capitale Chaâmba n'est qu'à une soixantaine de kilomètres. Pourquoi cette nouvelle ville avec ce nom ? Pourquoi, déplacer toute une région vers une autre? A-t-on voulu raviver ce volcan en veilleuse? Pousse-t-on les Mozabites à la révolte en les insultant de la sorte? Les Mozabites se sentent trahis En ce temps, les langues s'étaient déliées. Les Mozabites ont soulevé cette question en s'appuyant sur les dividendes qui leur échappent. Hier, cette zone était rattachée à l'APC de Ghardaïa. Aujourd'hui, elle leur échappe pour la daïra de Ben Dahou. Tout sera transféré aux Chaâmba. Les recettes ne viendront plus renflouer les caisses, tenues jusque-là par la communauté mozabite. Zone industrielle, recettes procurées par la traversée du pipe-line, le marché de gros, l'aéroport, la future université, la zone commerciale et ses habitants auront des bénéfices et ce, pour les Chaâmba. Les Mozabites se sentent un peu trahis. Tout cela est dû notamment, à la conquête de l'administration par cette communauté influencée par l'ex-Premier ministre, originaire de Metlili. Finalement, la localité de Ghardaïa nous renseigne à plus d'un titre sur tout ce qui bloque le développement régional. Les esprits sont loin de saisir d'une manière rationnelle que chaque région qui se développe profitera à tous. Il est temps de faire un pas vers cette Algérie de demain où la compétence, la science et l'art de gérer... doivent constituer des paramètres nobles. Aujourd'hui, c'est Melika, demain ça pourrait être Laghouat, Goléa, Touggourt... ou d'autres localités. On ne peut gérer un pays en s'appuyant uniquement sur les tribus. Il faut arriver à une osmose entre toutes les communautés. La tournée du ministre dans cette région ne répond nullement aux attentes car même si la solution reste à trouver, les susceptibilités demeureront. On peut assimiler cette soi-disant solution à une fuite en avant. Un problème existe et persiste, il lui faut une solution quels que soient les moyens choisis et l'action à entreprendre. Perdre le peu pour gagner beaucoup. A quand la fin du tâtonnement?