A leur arrivée hier à Bruxelles pour leur réunion mensuelle, tous les ministres européens des Affaires étrangères ont exprimé leurs protestations et leur fermeté face à la Russie. Les pays européens s'apprêtaient hier à sanctionner des responsables russes au lendemain du référendum en Crimée, en se gardant de couper les ponts diplomatiques avec Moscou afin de ne pas aggraver la crise ukrainienne. A leur arrivée hier à Bruxelles pour leur réunion mensuelle, tous les ministres européens des Affaires étrangères ont exprimé leurs protestations et leur fermeté face à la Russie. «Nous essayons d'envoyer le message le plus fort possible à la Russie» afin qu'elle «comprenne combien la situation est grave» au lendemain du «soi-disant» référendum en Crimée, a résumé Catherine Ashton, la chef de la diplomatie de l'UE. Ce «message fort» va se concrétiser par l'adoption dans la journée de sanctions «ciblées» visant des responsables russes ou ukrainiens pro-russes sous la forme de restrictions de visas et de gels d'avoirs. De telles sanctions sont inédites dans l'histoire des relations UE-Russie depuis l'effondrement de l'Union soviétique. Elles marquent l'application de la deuxième étape de la «réponse graduée» sur laquelle s'étaient entendus les chefs d'Etat et de gouvernement européens lors de leur réunion extraordinaire sur l'Ukraine du 6 mars. La liste des «sanctionnés» devrait inclure une vingtaine de noms de responsables russes et de Crimée ayant soutenu l'organisation du référendum, selon des sources diplomatiques. Aucun membre du gouvernement russe ne devrait en faire partie, du moins initialement. Car les Européens estiment qu'il n'est pas trop tard pour qu'une solution politique soit trouvée et éviter ainsi une aggravation de la crise ukrainienne. «Il faut faire preuve de beaucoup de fermeté et en même temps trouver les voies du dialogue et ne pas aller vers l'escalade», a déclaré le ministre français Laurent Fabius, à l'instar de plusieurs de ses collègues. Pour son prédécesseur au Quai d'Orsay, Alain Juppé, «l'Union Européenne et les Etats-Unis sont confrontés à un véritable dilemme». «Ne rien faire ou, ce qui revient au même, se contenter de quelques déclarations de principe, c'est donner à (Vladimir) Poutine un terrible message d'impunité. D'un autre côté, personne n'est assez irresponsable pour prendre le risque d'une escalade militaire», écrit-il sur son blog. «Il n'est pas question d'une Guerre de Crimée», a également affirmé le ministre britannique William Hague. L'option militaire exclue, les Occidentaux comptent sur l'impact d'un isolement croissant de la Russie sur la scène internationale. Ils se gardent ainsi la possibilité d'imposer des sanctions économiques et commerciales, susceptibles d'avoir des conséquences bien supérieures car les Etats-Unis et l'UE comptent parmi les trois principaux partenaires de Moscou. Le ministre luxembourgeois Jean Asselborn a souligné que la Russie allait commencer à «souffrir», citant la «dévaluation du rouble», «un isolement au Conseil de sécurité» de l'ONU et «même des critiques de ses partenaires comme le Kazakhstan ou l'Arménie». «On a peur de la Russie maintenant et, lorsqu'on a peur, les investissements reculent et l'économie en souffre», selon lui. Parallèlement, les Européens mettent les bouchées doubles pour aider le nouveau pouvoir ukrainien à s'affirmer. Après avoir promis un soutien économique de 11 milliards d'euros, les dirigeants de l'UE s'apprêtent à signer le volet politique de l'accord d'association UE-Ukraine, probablement vendredi, soit le jour où le Parlement russe devrait avaliser le rattachement de la Crimée.